En 997, Boson II, comte de la Marche, fait don à l'abbaye Saint Pierre d'Uzerche d’une église consacrée à Notre-Dame, édifiée au bord la Creuse près de la ville d’Ahun. De nos jours, il ne reste aucun vestige de cette construction originelle. Placé sous l'autorité de l'abbé d'Uzerche, le monastère soumis à la règle de Saint Benoît s’organise de façon autonome et prospère tant et si bien qu’il finit par s’émanciper en 1113. Au cours de la seconde moitié du XIIème siècle, les bénédictins font édifier une nouvelle église. Toujours debout, à cette époque sont créés le transept, le clocher carré supporté par quatre piliers, percé au sommet de vingt-quatre baies romanes en arcatures groupées de deux en deux, ainsi que le chœur. La nef est couverte d’une charpente. La coupole définitive sera établie plus tardivement.
Temps troublés, époque guerrière, l’abbatiale est en grande partie détruite au cours de la guerre de Cent ans. En 1440, lors des combats de la Praguerie, la révolte du duché de la Marche contre le roi, la façade est dévastée. La reconstruction de l’église débute vers 1489. De cette période date le porche d'entrée de style gothique flamboyant date de cette période ainsi que la nef, une partie du transept et du chœur. En 1511, un schisme au sein l’abbaye trouble sa direction. Elle tombe en commende en 1559. Au XVIème siècle, les Guerres de religion sèment ruine et désolation dans la région de la Creuse. En 1591, les ligueurs menés par Toizac, seigneur de Maslaurent, se retranchent dans l’église de Moutier d’Ahun. Ils sont assiégés par les troupes protestantes de Gaspard Foucauld, comte de Saint Germain, gouverneur de la Marche désigné par le roi. Ce dernier meurt lors de l’assaut. Il est vengé quelques jours plus tard par son fils qui tue Toizac et expose son corps au pilori du village de Saint-Germain-Beaupré durant trois jours. Les ligueurs délogés, le monastère est pillé, les bâtiments conventuels et l'abbatiale incendiés. La nef et le transept s’effondrent.
Les moines catholiques privés de sanctuaires se dispersent. Le site est laissé à l’abandon durant près de vingt ans. Les villageois se servent des ruines comme d’une carrière et prélèvent des pierres taillées afin d’édifier leurs maisons. La communauté religieuse investit à nouveau le lieu en 1610 dans des conditions de vie très précaires. La reconstruction de l’église débute en 1612 et se poursuit en plusieurs vagues. Le chantier le plus important dure entre 1616 et 1619. Le dortoir des moins ne sera cependant achevé qu’en 1648. L’abbaye est rattachée à l’ordre de Cluny en 1630. A ce titre, Moutier d’Ahun appartient depuis 2015 à la Fédération européenne des sites clunisiens. La communauté demeure très modeste au fil des ans. Elle ne dépasse jamais plus de huit moines et deux novices.
Au XVIIème et XVIIIème siècle, des différends opposent les moines désireux de rétablir la splendeur ancienne de l’abbaye et les abbés commendataires, nommés par le roi. Ces derniers ne résident pas sur place. Ils encaissent les revenus et estiment selon leur bon vouloir les montants reversés à la communauté pour son entretien incluant les travaux de restauration et d’embellissement. Les procès se multiplient jusqu’à la dissolution de l’ordre prononcé par le roi. En 1788, un bref papal prescrit la suppression de « l’ancienne observance » de Cluny.
En 1791, la Révolution confisque les biens de l’Eglise qui deviennent Biens Nationaux et sont vendus par adjudication. Les derniers religieux sont chassés. En 1844, sous le Directoire, l’église abbatiale est rendue au culte et devient église paroissiale de la ville de Moutier-d’Ahun. Les derniers reliquats de la nef sont rasés à cette époque. Dans le jardin déployé à sa place, le monument aux morts de la commune côtoie une ancienne borne leugaire gauloise qui remonte à l’an 243, règne de l’empereur Gordien III. Elle précise la distance entre Ahun, ancienne Acitodunum, et Limoges, Augustoritum, trente-quatre lieues gauloises.
De nos jours, il ne reste rien des bâtiments originaux. Les vestiges les plus anciens remontent à reconstruction du XIIème siècle. Le carré du transept, surmonté du clocher, et le chœur sont d’époque romane. Le portail ouest en granit date du XVème siècle. Une curieuse stèle funéraire enchâssée dans la paroi mentionne « Aux mânes et à la mémoire de Caïus Falvius Alpini ». Les croisillons du transept et la nef du XVème siècle n'ont pas été relevés à l’occasion des diverses réhabilitations.
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