Paris : Tour Keith Haring, le totem pop art de l'Hôpital Necker Enfants Malades - XVème



La Tour Keith Haring de l’Hôpital Necker Enfants Malades, raconte la destinée singulière d’une oeuvre offerte par l’artiste en 1987, histoire de renaissance après les menaces de disparition. Désormais totem planté au cœur d’un jardin arboré de 9 000 m2, la tour est à l’origine un escalier de secours du bâtiment abritant la Clinique de chirurgie infantile. Keith Haring (1958-1990) peint directement sur le caisson qui abrite ce triste morceau de béton. En 2016, lors du grand projet de restructuration des locaux de l’hôpital, l’édifice désormais vétuste est promis à la destruction. Afin de sauvegarder la fresque remarquable par ses proportions - haute de vingt-sept mètres, large de treize - l’escalier devient tour autonome, étonnante sentinelle du nouvel espace vert. Précurseur du street art à New York, figure iconique du pop art, le style de Keith Haring s’affirme, immédiatement reconnaissable, caractère graphique puissant. Tout au long de son existence, il s’est engagé mettant son art au service de causes humanitaires, en lutte contre le racisme, l'apartheid, l'homophobie, les discriminations, les nucléaire, les ravages de la drogue, l’épidémie de Sida. La Tour Keith Haring, ancien escalier relevé de ses gravas, symbolise aujourd’hui son engagement auprès des enfants malades, espoir et résilience, son investissement dans des œuvres caritatives. Dans ses entretiens à propos du projet, Keith Haring mentionne avoir volontairement choisi un bâtiment disgracieux pour le transformer en quelque chose de beau, égayer le séjour des petits malades et de leurs familles, soutenir le personnel hospitalier.








La fresque réalisée par Keith Haring à l’Hôpital Necker Enfants Malades en 1987 est peinte à main levée sans croquis préalables, en trois jours, dans la pluie et le froid. Des conditions météorologiques particulièrement difficiles pour l’artiste et son assistant. Au cours des journées du 28 et 29 avril puis le 5 mai 1987, logés dans une nacelle suspendue à une grue, Keith Haring et Juan Rivera s’activent sans relâche. Haring peint tout d’abord les contours des formes en couleur que Rivera remplit au fur et à mesure. Trois couches successives sont nécessaires pour donner à ces grands aplats de couleurs vives, l’énergie du rouge, du jaune, du bleu, du vert. Dans un dernier temps, survient la farandole des silhouettes noires jouant au ballon. Cette fresque monumentale réalisée in sitù, l’une des rares fresques en extérieur de cette envergure encore visible participe d’une postérité entretenue notamment par la Keith Haring Foundation. Créée en 1989 par l’artiste, l’association vient en aide aux enfants et soutient des organisations qui luttent contre le sida. En apportant une expertise artistique, elle prolonge l’engagement de Keith Haring et perpétue son oeuvre humanitaire. 

En 2006, le projet de restructuration de l’Hôpital Necker Enfants Malades ainsi que les détériorations majeures, fruits des aléas climatiques menacent la fresque endommagée de disparition. L’ancien bâtiment de chirurgie désormais vétuste sera détruit quoiqu’il arrive.  Les bonnes volontés se réunissent pour sauver la création de Haring au caractère tellement unique et trouver des solutions techniques innovantes afin de préserver l’escalier. Au cours, d’une vaste opération de restructuration, ce dernier est détaché de l’édifice délabré et devient une tour autonome dont la structure est profondément modifiée. Durant les six années de travaux nécessaires à la réalisation, le budget global dépasse le million d’euros. Une fois le béton effrité rénové, Will Shank et Antonio Rava, experts des fresques murales de l’artiste, délégués de la Keith Haring Foundation, restaurent la fresque. Ils ravivent les couleurs avec des résines reprenant l’aspect des peintures acryliques et vinyles originelles.









 

Le galeriste Jérôme de Noirmont, la Fondation Keith Haring et l’Hôpital Necker réunissent les fonds nécessaires au financement de protection et restauration grâce à la conjugaison d’opération de mécénat et de donations privées. En complément, la Fondation Daniel et Nina Carasso, sous l’égide de la Fondation de France, de nombreux artistes et donateurs rendent possible la rénovation de la fresque et son intégration architecturale dans le nouveau paysage de l’hôpital. 

Le 1er mars 2012, chez Artcurial, une vente aux enchères de boîtes aux lettres customisées par une vingtaine d’artistes à l’initiative de la Poste pour le Musée en Herbe réserve la moitié de ses recettes à la restauration. Le 2 mars, à la Galerie Jérôme de Noirmont, les profits de la vente exclusive d’une série photographique signée Alexandra Golovanoff et intitulée « Do I need a lift ? » sont intégralement reversés. Le 17 avril 2013, chez Sotheby’s, une nouvelle vente aux enchères organisée en coopération avec le directeur de la salle et des artistes proches de Keith Haring ou engagés pour la cause des enfants, rassemble de nouvelles sommes reversée au projet de protection et la remise en état de la fresque 

Le 7 septembre 2017, trente ans après sa création, la fresque est à nouveau inaugurée lors d’une cérémonie officielle à l’hôpital Necker-Enfants Malades en présence du personnel de l'hôpital Necker, de Julia Gruen, directrice de la Fondation Keith Haring, de Martin Hirsch, directeur général de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, et de Michèle Barzach, Ministre de la Santé en 1987.

Tour Keith Haring 
Hôpital Necker Enfants Malades
149 rue de Sèvres - Paris 15



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.