Paris : La Pensée et l'Âme Huicholes, une oeuvre de l’artiste mexicain Santos de la Torre Santiago - Station de Métro Palais Royal Musée du Louvre - Ier



« La Pensée et l’Âme huicholes », une oeuvre de Santos de la Torre Santiago, dit aussi Santos Motoapohua de la Torre, se trouve dans le métro parisien à la Station Palais Royal Musée du Louvre dans un couloir qui mène au Carrousel. Cette mosaïque en perles dont le titre originel est « Pensamiento y alma huichol », reflète puissamment un art populaire développé par le peuple huichol, communauté indienne des montagnes de la Sierra Madre occidentale, au centre ouest du Mexique. Le relatif isolement de ces populations a eu pour effet de préserver leur culture originelle. L’esthétique de leur production est marquée par le foisonnement des décors colorés, des symboles et motifs hérités de leurs ancêtres. La trinité de vénération le cerf, le maïs et le peyotl domine une cosmogonie particulière. La fresque qui orne le métro parisien a été créée dans le cadre des échanges culturels entre la RATP et ses pairs internationaux, en l’occurrence la STC Metro (Sistema de Transporte Colectivo Metro), société qui gère le métro de Mexico. Cette collaboration fructueuse a été initiée dans les années 1960 en perspective des Jeux Olympiques de 1968. Les édiles de la ville ont fait appel à l’expertise technologique française afin de construire un métropolitain. A l’occasion du trentième anniversaire d’une riche coopération entre les deux entités, un échange artistique a été organisé afin de célébrer la relation d’amitié entre la France et le Mexique, la RATP et la STC. L’oeuvre de Santos de la Torre Santiago a été inaugurée en 1997 à Paris tandis qu’un édicule de style Guimard était installé à l’entrée de la Station Bellas Artes à Mexico en 1998, à proximité du Palais des Beaux-Arts. 













Le programme culturel mené par la RATP reflète au cœur même des installations de transport en commun la vie culturelle de la ville de Paris. En ponctuant le quotidien des usagers d’œuvres d’art, il est question de redonner du sens, de distiller des doses de poésie dans la mémoire collective. Les trajets deviennent, par cette intrusion esthétique, expériences sensibles. 

Santos de la Torre Santiago, né le 28 avril 1942 à Santa Catarina, dans l’Etat de Jalisco, est l’un des artistes huichols les plus réputés. A travers ses œuvres, il exprime une vision personnelle mystique des particularités de la cosmogonie huichole. Les récits associés à chacun des tableaux rendent compte des exploits des ancêtres, de la mythologie, précieux témoignages d’un mode de vie et de ses croyances associées. A la fois narration vivante et oeuvre de transmission, la pratique artistique huicholes cherche à attirer la protection des divinités par la représentation d’une réalité magique invisible pour les yeux. L’énergie spirituelle qu’elle traduit fait lien entre l’homme et les dieux dans une narration vivante.

Le peuple huichol ou wixàrika a développé une forme d’expression plastique autour de perles, en argile, pierre, turquoise, pyrite, jade, corail, coquillage, graine. Les artefacts richement ornés se parent de décors dans lesquels se multiplient les représentations stylisées du panthéon des divinités, des cérémonies et des croyances. La continuité des modèles perpétue la tradition. Outre la mythologie commune, les dessins imaginés par les artistes chamanes rendent compte d’expériences personnelles, les visions perçues lors des rituels de consommation de plantes sacrées comme le peyotl.












La fresque « La Pensée et l’Âme huicholes » se compose de quatre-vingt planches indépendantes, carrés de trente centimètres assemblés en une mosaïque de deux mètres de haut sur trois mètres de large. Deux millions de perles de deux millimètres ont été nécessaires pour réaliser ce tableau luxuriant. Les différents éléments sont disposés en triptyque horizontal. Les trente premiers panneaux représentent les mondes souterrains, les vingt suivants la terre, les trente derniers le ciel. 
 
Santos de la Torre Santiago puise son inspiration dans les mythes de Wixàrika. Il a représenté les divinités, les ancêtres et les légendes, la flore et la faune, autant de motifs iconiques de la culture huichole. En embrassant la technique des mosaïques de perles, il rend hommage à ses racines et à la production artisanale de sa communauté, expression artistique d’un peuple. Les oeuvres empreintes de mysticisme permettent d’expliquer aux générations futures les rituels, les cérémonies rythmées par les chants chamaniques des Mara’akames mais également d’exposer la vision personnelle des artistes. Santos de la Torre Santiago, devenu chamane à la suite de nombreux pèlerinage en territoires sacrés, convoque le fruit de ses cessions de méditation et se prête à l’interprétation des rêves. 

Jusqu’à ce jour, malgré un succès international et de nombreuses expositions dans le monde entier, du fait d’une pratique artistique puisant à la source d’un artisanat indien, les artistes huichols peinent à être reconnus dans leur propre pays. Le film documentaire, « Eco de la montaña » réalisé par Nicolas Echavarria et consacré à Santos Motoapohua de la Torre évoque une situation délicate. L’Etat mexicain devait prendre en charge la rémunération de l’artiste pour la création de la fresque offerte à la France. Mais il n’a pas été payé. Et dans la même veine, Santos de la Torre Santiago n’a pas été convié à rejoindre la délégation mexicaine à Paris à l’occasion de l’inauguration de son oeuvre. N’ayant pu diriger personnellement le montage de la fresque, les panneaux n’ont pas été installés correctement. La correction aura néanmoins été rendue possible a posteriori. 

La Pensée et l’Âme huicholes, une oeuvre de Santos de la Torre Santiago
Station de métro Palais Royal Musée du Louvre - Paris 1
Couloir d’accès au Carrousel du Louvre



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.