Paris : Pont des Arts, impériale reconstruction, point de vue pictural - VIème


Le Pont des Arts, jeté entre deux rives, attire par le pittoresque panorama qu’il offre de nombreux peintres amateurs et autres étudiants aux Beaux-Arts. En aval, se trouvent le Louvre et le pont du Carrousel, en amont, le square du Vert-Galant, le Pont-Neuf, l'île de la Cité et les tours de Notre-Dame. La passerelle en arc est orientée dans l’axe de l’Institut de France. Elle offre un point de vue très prisé par les photographes amateurs sur l’ensemble dominé par la célèbre coupole sous laquelle se réunissent les Immortels. Reliant les quais Malaquais et de Conti aux quais François Mitterrand et du Louvre, elle emprunte son nom au musée, rebaptisé temporairement, sous le Premier Empire, « Palais des Arts ou des Beaux-Arts ». La passerelle est inscrite aux monuments historiques le 17 mars 1975. Néanmoins, l’actuel Pont des Arts actuel n’est pas la construction originelle de 1803. Affaiblie par les bombardements des deux guerres mondiales et la répétition des collisions avec des barges, la structure a été démontée en 1980 pour être remplacée par un pont moderne reprenant l’allure de son prédécesseur. 









Le Pont des Arts originels a été imaginé dans le cadre d’un projet comportant trois ponts sur la Seine lancé en 1801 à l’initiative de Napoléon Bonaparte alors Consul. Le premier, le pont d’Austerlitz, est établi entre le Jardin des Plantes et l'Arsenal, le deuxième, le pont de la Cité, entre les îles de la Cité et de la Fraternité. Le troisième, le pont des Arts, ouvre un passage piéton entre le Louvre et le quai des Quatre-Nations. En juillet 1802, Bonaparte demande, véritable décision politique, que ce dernier soit édifié en fonte nouveau matériau issu de l’industrie anglaise. Le Pont des Arts, premier réalisé dans cet alliage, doit incarner la modernité française.

Sa conception s’inspire de celle des ponts en bois et des techniques développées au Royaume-Uni.  L’ingénieur des Ponts et Chaussée Louis-Alexandre de Cessart présente les plans d’un pont léger doté de neuf arches de 16,80 mètres d’ouverture, large de 10 mètres, long de 157,50 mètres. Les neuf arches se composent de cinq fermes. Chacune des fermes forme un arc en fonte encastré dans la maçonnerie au sommet des piles. Le pont sans dos d’âne est surélevé par rapport aux quais. Jacques-Vincent de Lacroix Dillon est en charge du chantier.  










Le pont en arc avec tablier supérieur, pensé comme une promenade éclairée de candélabres, un jardin suspendu, se pare d’arbustes, d’orangers en pot remisés en hiver et bancs. Jean-Baptiste Launay, fondeur auteur de la colonne Vendôme et du Pont d’Iéna, réalise les différents éléments. Inauguré le 23 septembre 1803, son esthétique d’une grande modernité est vivement critiquée. Sa praticité se voit remise en question par les bateliers qui lui reprochent par l’étroitesse des arches de rendre difficile la circulation fluviale.

Tout d’abord passerelle à péage, les promeneurs doivent s’acquitter d’un versement d’un sou pour traverser la Seine. Ils tendent à l’éviter pour emprunter le Pont Neuf gratuit. Le péage cesse en 1848. Sous la Restauration, le Pont des Arts devient un lieu de rendez-vous pour la jeunesse. Dans son roman « La Rabouilleuse » en 1842, Honoré de Balzac l’associe à de plus funestes destinées. C’est le pont d’où les désespérés se jettent à l’eau pour mettre fin à leurs jours. Plus tard, Brassens chantera la friponnerie du vent s’engouffrant sous les jupes des dames. A l’occasion de l’élargissement du Quai Conti en 1852, le Pont des Arts est modifié. Il perd une arche.  


1842 Noël Paymal Lerbours

1857 Gustave Le Gray

1867 Pierre Auguste Renoir Le Pont des Arts

1878 Stanislas Lépine Le Pont des Arts

1880 Jean Béraud Un jour de vent sur le Pont des Arts

1928 Paul Signac Le Pont des Arts


Au XXème siècle, fragilisé à la suite des bombardements des deux guerres mondiales, endommagé en 1961 et 1973 par des accidents de bateaux, le Pont des Arts est menacé. Le rapport de l’Inspecteur général des Ponts et chaussées datant de 1976, entraîne un an plus tard sa fermeture à la promenade. Le pont est devenu dangereux. En 1979, une nouvelle collision de barge entraîne un écroulement sur une longueur de soixante mètres. Le Pont des Arts est démonté en 1980. Les quatre arches encore intactes rejoignent un lieu de stockage de la ville de Nogent sur Marne. Dix ans plus tard, la passerelle réduite est reconstituée sur les bords de Marne près du port de plaisance. Elle ouverte au public en 1992.

Le Pont des Arts est reconstruit sur la Seine en acier. Le chantier s’étend de 1981 à 1984. Le modèle alternatif, imaginé par l’architecte et urbaniste Louis Arretche, long de 155 mètres et large de 11, s’inspire du dessin originel de Louis-Alexandre de Cessart, avec néanmoins deux travées en moins. Elargi, le Pont des Arts nouvelle version comporte seulement sept arches. Il est inauguré le 27 juin 1984 en présence de Jacques Chirac alors maire de Paris. 












De 2008 à 2015, les touristes du monde entier prennent la fâcheuse habitude, entretenue par les vendeurs à la sauvette, d’accrocher des « cadenas d’amour » aux parapets grillagés de la passerelle. La polémique enfle. Véritable pollution visuelle, cette manie menace la structure du pont à cause du poids des cadenas. La Mairie intervient pour sauver le patrimoine. Fin septembre 2014, les parapets sont remplacés provisoirement par des planches sur lesquelles quatre street artistes Jace, eLs Seed, Pantonio, Brusk interviennent pour réaliser des fresques. A l’automne 2015, les panneaux de verre pérennes les remplacent. 

Le Pont des Arts - Paris 6



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


Bibliographie
Le guide du patrimoine Paris - Sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos - Hachette
Le guide du promeneur 6è arrondissement - Bertrand Dreyfuss 
Dictionnaire administratif et historique des rues de Paris et de ses monuments - Félix et Louis Lazare

Sites référents