Ailleurs : Bastia, la vieille ville en 10 étapes, l'authenticité Corse, le charme historique



Bastia, capitale de la Bagnaja région du nord-est de l’île de Beauté entre le cours du Golo et le Cap Corse, préfecture de la Haute Corse, cultive une forte personnalité depuis sa fondation au XIVème siècle. Accrochée au flanc d’une montagne, la Sierra di Pigno, haute de 900 mètres, la ville historique s’est lové autour du Vieux Port, ancien village de pêcheurs. Sur l’éperon rocheux qui la domine, est perchée la Citadelle dont la tour de guet originelle, la « bastia », la bastille, construite à l’initiative des gouverneurs de Gêne, a donné son nom à la cité. Cette ville méditerranéenne authentique conserve dans ses couleurs, ses toits de lauze et son architecture, le souvenir de l’influence génoise. Au sud se trouve le Vieux Port et la Citadelle dite ville haute ou Terra Nova, au nord la ville basse, la Terra Vechja ordonnée autour de la place Saint Nicolas. Porte d’entrée sur le Cap Corse, principal port de l’île de Beauté, Bastia revendique son statut de ville d’histoire, d’art et de culture mais aussi de gastronomie et d’œnologie. Je vous propose dix étapes clé pour une visite du cœur historique de Bastia.








Au milieu des années 1370, à la suite d’un incendie, le gouverneur génois de la Corse, Leonello Lomellini quitte le château-fort de Biguglia qu’il juge difficile à défendre. Il fait construire un donjon, une bastille ou « bastia » en corse, sur un promontoire qui surplombe une anse étroite, protection naturelle contre les éléments naturels et les attaques diverses. Cette tourelle domine le port de pêche Porto Cardo, modeste marine qui deviendra l’actuel Vieux Port. De nombreux citoyens génois s’installent à l’ombre de ce donjon protecteur. Les habitations peu à peu se multiplient. En 1378, Leonello Lomellino acte l’existence de Bastia qui de place forte est devenue une ville. Les gouverneurs successifs conservent cette citadelle. Elle prend sa forme finale lors de la construction de remparts, achevés en 1480, pour devenir la Terra Nova. Au fil du temps, la cité fortifiée devient plus importante que le village de Cardo. Le chantier du Palais des Gouverneurs, adossé à l’ancien donjon, débute bientôt mais 150 ans seront nécessaires pour finaliser l’édifice qui ne devient pleinement résidence des gouverneurs de l’île qu’à partir de 1530. Au XVIème siècle et au XVIIème siècle de nombreuses communautés religieuses notamment franciscaines s’installent à Bastia. Elles y font construire divers sanctuaires, oratoires, églises. L’édifications de lieux de culte richement décorés attire architectes de talent et artistes variés. La vie culturelle prend un essor inédit ainsi que la population.  

Après un bref épisode, du 15 avril 1736 au mois de décembre 1740, durant lequel le Royaume de Corse est indépendant, l’île adopte en 1755, la première constitution démocratique de l'histoire moderne et donne pour la première fois en partie le droit de vote aux femmes. Rattrapée par son histoire, la Corse est cédée par la République de Gêne à la France en 1768, qui doit la conquérir militairement pour en prendre possession en 1769. Dans un sursaut pour échapper à la convoitise française, l’île de Beauté se place sous protectorat britannique de 1794 à 1796 avant d’être reprise par les troupes tricolores. 

Dès la fin du XVIIIème siècle et tout au long du XIXème siècle, la ville prospère. Le nombre d’habitants croit. La cité s’étend vers le nord et vers les hauteurs. Le tissu urbain est en pleine mutation. Le palais de Justice voit le jour. La place Saint Nicolas est agrandie. Au cœur même de la ville, des boulevards élargis bordés d’immeubles bourgeois sont créés. Au XXème siècle, le nouveau port face à la place Saint Nicolas est achevé. Bastia poursuit son développement vers les nouveaux quartiers de Toga et de Saint Joseph. De nos jours, deuxième ville la plus importante de Corse, Bastia a su conserver un centre historique au charme séculaire. Le lacis des venelles entraîne les visiteurs sur les traces d’un glorieux passé. Entre la montagne et la mer, Bastia cité de contrastes célèbre un art de vivre où la convivialité prime. Afin de découvrir la vieille ville, dix étapes clé de charme s’imposent.









1/ Le Vieux Port, le Porto Cardo des origines, déploie les attraits d’un délicieux voyage dans le temps. Sur le bassin enserré d’une anse naturelle, le ballet des embarcations légères, bateaux de plaisance et esquifs de pêche offre un spectacle des plus rassérénant. Restaurants, cafés, glaciers rivalisent de terrasses paisibles. En soirée, le quartier piétonnisé est le cadre de manifestations culturelles tels que les animations musicales traditionnelles, les fêtes religieuses et les célébrations du folklore local. A l’occasion de la fête de la Saint Jean, le 23 juin, qui coïncide avec le solstice d’été et souligne les origines païennes de ces célébrations, un feu est allumé sur le port. Il s’agit du « fucare ». La coutume suggère de prendre un bain de mer dans le port, l’eau serait à ce moment précis dotée de vertus régénératrices.

2/ L’église Saint Jean-Baptiste, curieusement coincée entre deux rangées d’immeubles sur le front de mer du Vieux Port, a été construite entre 1636 et 1666, sur le site d'une ancienne chapelle, entre la marine et la place du Marché. A l’époque génoise, Bastia se divise en deux paroisses, Sainte-Marie de l’Assomption pour la Terra Nova, Saint-Jean-Baptiste pour la Terra Vechja. Les deux clochers sont ajoutés tardivement au XIXème siècle, celui de gauche en 1810, celui de droite en 1864. Dans les années 1860, Augustin Viale restaure la façade partiellement dissimulée derrière les petits immeubles de front de mer. Il lui confère un type jésuite à trois travées surmontée d'un fronton. Plus grand sanctuaire de la ville, l’église Saint Jean-Baptiste se compose d’une nef unique et de trois chapelles latérales. Le riche décor intérieur se distingue notamment par une voûte peinte remarquable et de nombreuses œuvres d’art. Parmi les pièces majeures se trouvent un maître-autel en marbre polychrome de 1694, un tabernacle en argent ciselé au XIXème siècle réalisé par l’orfèvre siennois Gaetano Macchi et une statue de marbre de Saint Jean Baptiste du XVIIIème siècle. La tribune d’orgue en « nid d’abeille » datée de 1742 est ornée d’un triptyque représentant la vie de Saint Jean-Baptiste. L’église est classée au titre des monuments historiques depuis l’an 2000.












3/ Les jardins et l’escalier Romieu se trouvent en contrebas du Palais des Gouverneurs et du bastion Saint Charles. Aménagés entre 1874 et 1875, les parterres sont plantés d'essences méditerranéennes. La rampe Saint-Charles qui dévale des allées ombragées depuis la Citadelle est notifiée depuis 1819. Structurée en « pas d'âne », son sol est régulièrement pavé en ricciata, pierres plantées sur champs. L’escalier monumental imaginé par l'architecte bastiais Paul-Augustin Viale entre 1871 et 1874 se compose de trois volées droites alignées, séparées par deux repos. Longé par une rampe en fer forgé, il est abondamment orné de vases sur pied, de statues et d’une fontaine. Ces éléments ont été conçu par une fonderie du Val d'Osne. L’ensemble est inscrit aux monuments historiques en 2017.

4/ La Citadelle, haut lieu touristique, forme une sorte de petit village autonome perché au-dessus du port. Les étroites venelles piétonnes, le pittoresque des façades colorées convoquent le souvenir de la médiévale Terra Vechja et de sa tour de guet stratégique, la bastia, édifiée en 1380, par le gouverneur génois Leonello Lomelline. La place est rapidement transformée en castello, élément essentiel du dispositif de défense. Autour de ce donjon, le palais des gouverneurs voit le jour tandis que d’épais remparts délimitent la ville fortifiée dès 1480.










5/ Le Palais des Gouverneurs, sur la place du Donjon marquée par l’architecture caractéristique d’un palais fortifié génois, a été finalisé en 1453. Mais il ne devient résidence officielle des gouverneurs qu’en 1530, date à laquelle un campanile est ajouté à la façade principale. Ses quatre ailes s'ordonnent autour d’une cour centrale auxquelles sont ajoutés le donjon et le bastion Saint-Charles. Durant quatre siècles, le Palais des Gouverneurs a été le symbole de la domination génoise. Napoléon au XVIIIème siècle, le transformera en caserne. Il accueille désormais le Musée d’Histoire de la ville de Bastia alternant visites des collections permanentes et expositions temporaires.

6/ L’église Sainte Marie de l’Assomption, au cœur de la Citadelle, a succédé à un premier édifice érigé entre 1488 et 1495, devenu cathédrale en 1580. Entièrement reconstruite de 1604 à 1625, il ne demeure aucun vestige du bâtiment originel. Le décor baroque de la façade occidentale réalisée vers 1660-1670, deux niveaux surmontés de trois frontons, illustre la tradition architecturale génoise. Contre le côté sud de l’abside se dresse un clocher carré achevé en 1620. Ces éléments ont été restauré à la fin du XIXème siècle et en 1938. Le sanctuaire contient un grand nombre d’œuvres d’art. Le retable du maître-autel transmis de la première cathédrale représente l’Assomption de la Vierge, a été peint sur bois en 1512 par Leonoro dell’ Aquila. La statue de la Vierge en argent réalisé en 1852 l’orfèvre siennois Gaetano Macchi, est portée en procession à travers la ville lors des cérémonies du 15 août. Le décor original a été enrichi au XIXème siècle de tableaux, de statues en marbre et en bois polychrome, de stucs. Les fonts baptismaux du XVIIIe siècle remarquable, un groupe sculpté en marbre blanc, figurant le baptême du Christ, une vasque aux armes de Monseigneur Leonardo de Fornari font partie des éléments remarquables présents dans cette église. Curiosité cocasse, les chapeaux des anciens évêques du lieu sont suspendus aux voûtes du chœur. La Chapelle de la Saint Croix s’illustre par ses ornementations opulentes. Elle conserve un trésor singulier, une statue du Christ trouvée selon la légende flottant sur les eaux en 1428 par deux pêcheurs. L’église Sainte Marie de l’Assomption a été classée aux monuments historiques par arrêté du 3 février 2000. 











7/ La rue Napoléon, longue avenue entre la place Saint Nicolas et le Vieux Port, a été inaugurée en 2013. Cette voie piétonne pavé de pierre de Brando est l’une des artères commerçantes les plus animées de Bastia. Artisans, commerces de bouche, ateliers de créateurs, magasins de souvenirs, elle bruisse d’une animation qui ne se dément pas. Traversée de petites ruelles pittoresques typique de l’ancien tissu urbain, elle offre le spectacle radieux d’une vieille ville capable de trouver un équilibre avec les désirs de modernité. Sur le tracé de la rue Napoléon se trouvent deux édifices religieux remarquables, l’Oratoire de l’Immaculée Conception et son parvis en mosaïque de galets ainsi que l’Oratoire de Saint Roch.

8/ L’Oratoire Saint Roch, fruit du désarroi face aux grandes épidémies, remonte à la fin de la Renaissance. Lors des épisodes de peste de 1569, les Bastiais font le vœu d’élever un sanctuaire dédié à Saint Roch qui les protège du fléau. La Confrérie Saint Roch est fondée en 1588. Achevé en 1590, le premier oratoire victime d’un écroulement en 1604 doit être entièrement reconstruit. Depuis, il a été remanié en profondeur. Le grand portail de marbre blanc surmonté de la coquille des pèlerins date de 1860 tandis que l’actuelle façade néo-classique fronton triangulaire reposant sur quatre colonnes remonte à 1911. A l’intérieur de l’Oratoire de Saint Roch, selon la tradition de Gênes, les murs sont tapissés de damas de soie rouge. Le retable architectural du maître-autel a été sculpté à Bastia en 1692 par le marbrier génois Domenico Saporito. Le peintre florentin Giovanni Bilivert a signé le tableau du maître-autel qui est daté de 1626. Refait en 1798, la table d’autel et les gradins ne sont pas d’origine. Le décor de stuc doré a été restauré de manière drastique au XIXème siècle. L’Oratoire de Saint Roch est classé aux monuments historiques par arrêté du 26 juin 2007.

9/ La Place Saint Nicolas, principale place de Bastia, lieu de rencontre pour tous les âges, est l’une des plus vastes de France. Au cœur de la ville, cette esplanade d’envergure fait face au port de plaisance où se croisent goélettes et yachts. Elle doit son nom à une ancienne chapelle médiévale qui jouxtait un hôpital pisan. Sous les palmiers centenaires de nombreux cafés, restaurants et commerces rivalisent d’élégance. Au centre de la place Saint Nicolas se dresse une statue de Napoléon en empereur romain et un monument aux morts. Un kiosque à musique jouxte le kiosque restauré du sous-marin Casabianca. Durant l’été, les animations culturelles et concerts se multiplient tandis qu’une patinoire s’installe durant toute la période des fêtes de fin d’année. Le dimanche matin, la place accueille le marché aux puces de la ville, une brocante très appréciée par les riverains.











10/ La Place du Marché, « u mercà », juste derrière le Vieux Port célèbre un esprit de village intact. Dans ce quartier typique, petits immeubles colorés et maisons de ville ont des allures délicieuses. Ancienne place du Théâtre, la place du Marché avait pour cœur battant le théâtre Marbeuf construit à la fin du XVIIIème siècle et rasé en 1881 afin de créer une esplanade. L’ancien hôtel de ville y demeure joliment chamarré, bleu et jaune. Il s’y trouve un discret accès direct à l’église Saint Jean Baptiste. Une fontaine contemporaine en pierre surmontée d’une naïade en marbre réalisée par le sculpteur corse Pierre Pardon tient l’une des rives de cette place bordée de platanes majestueux. De nombreux commerces, cafés et restaurants devant lesquels viennent se produire des groupes locaux assurent l’animation. Chaque week-end, se tient le marché des producteurs locaux où se croisent maraîchers, fleuristes, artisans et autres chantres des saveurs régionales. L’occasion de goûter aux produits locaux, coppa, lonzu, figatellu, fromages, canistrelli…. Pour les fêtes, le marché de Noël attire petits et grands.

Bastia en 10 étapes clé
- Le Vieux Port
- L'église Saint Jean Baptiste
- Les jardins et l'escalier Romieu
- La Citadelle
- Le Palais des Gouverneurs
- L’église Sainte Marie de l’Assomption
- La rue Napoléon
- L'Oratoire Saint Roch
- La place Saint Nicolas
- La place du Marché



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.