Cinéma : Thalasso, de Guillaume Nicloux - Avec Michel Houellebecq et Gérard Depardieu



Cinq ans après son enlèvement, Michel Houellebecq suit une cure dans un centre de thalassothérapie pour se refaire une santé. Massages, enveloppement, cryothérapie, il enchaîne les traitements. Sans alcool, ni cigarette, Michel se désespère de tenir une semaine au régime sec, eau et légumes vapeur, imposé par l’établissement à ses clients. Il rencontre alors par hasard Gérard Depardieu, un habitué des lieux, qui va lui remonter le moral car il dissimule dans sa chambre des réserves de vin et de rillettes. Ensemble, ils se planquent pour ripailler, sauteries improvisées propices aux longues conversations éméchées. Ils refont le monde en peignoir, discutent de l’existence de Dieu, de la résurrection des corps, de l’art, de la politique, de l’absurde quête d’éternité. Mais leur séjour est bientôt perturbé par l’apparition des trois anciens ravisseurs de Michel. La femme du chef de gang s’est fait la malle avec son jeune amant et elle aurait bien pu mettre son ami l’écrivain dans la confidence.






Objet cinématographique non identifié, huis clos loufoque, Guillaume Nicloux a imaginé une rencontre imaginaire piquante entre deux personnalités publiques controversées, Michel Houellebecq, l’écrivain visionnaire polémique, et Gérard Depardieu le talent pur, les débordements. Le réalisateur entremêle le vrai et le faux en demandant à ses comédiens de jouer leur propre rôle. Il laisse une grande place à l’improvisation ce qui sème le trouble entre fiction et réalité et donne de beaux moments de vérité 

Les conversations à bâton rompu entre les deux jouisseurs invétérés que sont Michel et Gérard se font ode à la vie, à l’épicurisme. Et le film prend alors toutes les apparences du réel. Sous l’œil de la caméra, ces deux figures de l’excès à qui l’on impose un régime santé qui va à l’encontre de leurs inclinations naturelles, se conduisent en sales gosses frondeurs, terreau de situations savoureuses. Face à l’inéluctabilité de la mort, la solution préconisée est de lui opposer un hédonisme radical. La culture du bien-être, les obsessions hygiénistes de l’époque, les normes diététiques, l’aseptisation des existences, serait les plus mortifères des remèdes.



Objets de culte comme de scandale, les deux hommes jouent devant la caméra avec leur image publique. Gérard Depardieu, physique d’ogre, appétits démesurés pour la vie, la nourriture, le vin, trouve son pendant inverse en un Michel Houellebecq qui incarne la figure de l’intellectuel dépressif, rachitique et extra-lucide. Le grand costaud et le petit maigrichon forment un duo comique évident à l’instar de Laurel et Hardy auxquels Depardieu fait référence au cours d'une conversation. Leurs échanges aimablement avinés convoquent les rires et le second degré sur fond d’ésotérisme. Face à leurs élucubrations philosophiques réjouissantes, le récit devient presque anecdotique. Visiblement, Michel et Gérard s’amusent beaucoup et le plaisir est communicatif. 

Thalasso, de Guillaume Nicloux
Avec Gérard Depardieu, Michel Houellebecq, Maxime Lefrançois
Sortie le 21 août 2016



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.