Ailleurs : Crayères Ruinart, visite des caves classées au Patrimoine mondial de l'Unesco de la plus ancienne maison de Champagne - Reims



Plus ancienne maison de Champagne fondée en 1729, la Maison Ruinart, née au Siècle des Lumière, a su perpétuer l'esprit des origines par sa tradition d’excellence et de raffinement. Mise en scène somptueuse, la visite des célèbres Crayères s’annonce un peu comme un voyage au centre de la terre. Ces cathédrales souterraines, anciennes carrières d’extraction de gypse, datent de l’époque gallo-romaine. L’ensemble de galeries creusées à la main, serpentent sur près de 8km. Elles ouvrent sur d’immenses clairières exploitées jusqu’au Moyen-âge, dont la plus profonde s’élève à 38 mètres de haut. Afin de descendre dans les entrailles de la colline, les courageux carriers empruntaient alors de rudimentaires escaliers arrachés à la craie et des échelles de fer. Les Crayères établies sur trois niveaux offrent les conditions idéales à la maturation des vins du fait de l’absence de vibrations et de lumière, d’une température et d’une hydrométrie constantes. Dans la pénombre les spots à sodium rougeoient sans chaleur, veillant au sommeil du vin de champagne Ruinart. Près de 7 millions de bouteilles dorment sagement rangées dans des pupitres ou empilées sur des murs entiers. Trois visites exceptionnelles par jour, animées par des guides passionnées, sont organisées en groupe restreint de huit personnes. 





Affiche publicitaire Alphonse Mucha

Installation Maarten Bas, photographies Erwin Olaf

Georgia Russell




Au début du XVIIIème siècle, la famille Ruinart officie dans le négoce des étoffes. L’entreprise a pour habitude d'offrir en cadeaux d'affaire des bouteilles d’un curieux vin de mousse qui ne s'appelle pas encore champagne. Et les clients en raffolent. Le patriarche, Dom Thierry Ruinart, un moine bénédictin qui perçoit tout le potentiel de cet élixir, initie son neveu Nicolas Ruinart à son élevage ainsi qu’à son commerce. Alors que l’engouement grandit, l'arrêté royal du 25 mai 1728 autorisant le transport de vin mousseux en bouteille change la donne. Le champagne va conquérir le cœur de toutes les élégances.

A Epernay, le 1er septembre 1729, Nicolas Ruinart ouvre le premier livre de comptes consacré au champagne, véritable acte de naissance de la maison. Il abandonne définitivement l'activité de drapier en 1735. Rapidement, la Maison Ruinart se découvre une vocation internationale. Les premières expéditions vers la Belgique datent de 1739 et vers la Russie de 1765.











En 1764, Claude Ruinart le fils de Nicolas créé la société Ruinart Père et Fils. En 1768, il fait l’acquisition du lieu-dit le Moulin de la Housse prolongés de terrains où affleurent les crayères sur le flanc de la colline Saint Nicaise, un promontoire situé à 135 mètres au-dessus du niveau de la mer, au sud-est de la ville de Reims. 

Au XVIIIème siècle, la Maison Ruinart est la première en Champagne à exploiter les anciennes carrières de gypse abandonnées pour entreposer les bouteilles. Ces caves d’un genre nouveau permettent d’élever le vin dans des conditions optimales. Situées sous les bâtiments du siège de la maison, les Crayères Ruinart ont été classées au titre des Sites et monuments naturels à caractère artistique, historique, scientifique ou pittoresque dès 1931.










Dédales souterrains ouvrant sur des clairières sous voûte creusées dans la craie, les galeries se déploient sur huit kilomètres sous la colline Saint-Nicaise de Reims. Celle-ci est inscrite, et les crayères avec elle, depuis le 4 juillet 2015 au patrimoine mondial de l'Unesco dans la catégorie Paysage culturel ainsi que deux autres sites emblématiques de la Champagne, l’avenue de Champagne à Epernay et les coteaux historiques autour d’Epernay.

Mises en péril par les bombardements allemands lors de la Première Guerre Mondiale, les caves ont servi de refuge pour les soldats dont les nombreux graffitis gravés dans la craie sont l’émouvante mémoire, témoignage historique puissant. Laisser une empreinte est une tradition qui remonte selon les dates inscrites sur les parois à l’établissement en ces lieux de la Maison Ruinart en 1768.










Cadre unique à la majesté architecturale, les Crayères ont été, dès les années 1950, le théâtre de soirées artistiques exceptionnelles fréquentées par les figures emblématiques du monde des arts, Jean Marais, Michèle Morgan, Sacha Guitry, Peter Ustinov, Jean Cocteau. Cet esprit créatif perdure de nos jours. Mécène, dans la grande tradition remontant aux premières affiches publicitaires réalisées en 1896 par Alphonse Mucha, la Maison Ruinart soutient la création contemporaine à travers des initiatives ouvertes à l'international. 

Depuis 2006, chaque année, un artiste réalise une pièce inspirée par l’univers Ruinart. Ces créations ont voyagé à travers le monde, ont traversé les plus grandes foires d’art contemporain, Art Basel à Bâle et Miami, la Fiac de Paris, avant d’être exposées à Reims. Les œuvres accueillent désormais les visiteurs dans les salons de dégustation de la Maison Ruinart, à l'entrée des Crayères et au cœur même des caves.











En 2001, le peintre israélien Gideon Rubin a réalisé une Collection de portraits Ruinart, sur d'anciens coffres et cartons de champagne, en hommage aux grandes figures de la famille. L’architecte d’intérieur India Mahdavi, le photographe Erwin Olaf, le designer Maarten Baas, le sculpteur et designer Hubert Le Gall, la plasticienne écossaise Georgia Russell, le designer néerlandais Piet Ein Eek, le designer français Hervé Van der Straeten, le sculpteur espagnol Jaume Plensa se sont succédés. En 2018, le plasticien Liu Bolin exposé à la Fiac, a immortalisé le lien entre les salariés de la maison de champagne et leur outil de travail. En mars 2019, a été révélée au palais Brongniart la dernière collaboration en date avec l’artiste brésilien Vik Muniz.

La visite des Crayères se prolongent par une dégustation. Rachetée en 1962 par Moët et Chandon, la Maison Ruinart a été intégrée en 1987 au groupe Moët Hennessy Louis Vuitton, LVMH. Cette seconde naissance a été l'occasion de trouver un rôle à sa mesure, celui de promoteur de l'art de vivre à la française.  Aujourd'hui, les champagnes modernes moins dosés en sucre s'affirment comme des vins de gastronomie. Ils mettent en valeur des notions de terroir, de cuvée parcellaire. Le champagne art de l’assemblage nécessite l’intervention de talents uniques, d’hommes possédant le don de prévoir l’évolution du vin au fil du temps. Chef de caves de la Maison Ruinart, Frédéric Panaiotis a su faire évoluer les cuvées vers un style épuré, élégant qui séduit unanimement. 

Maison Ruinart
4 rue des Crayères - 51100 Reims
Tél : 03 26 77 51 51



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


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