La cour d’Alsace-Lorraine, insolite ruelle pavée décrochant depuis la rue de Reuilly, se divise en deux allées terminant en impasses. A Picpus, son atmosphère joyeuse et ses façades aux couleurs vives tranchent avec la grisaille d’un quartier défiguré par les travaux des années 1970-80. Ouverte au public en journée, cette voie privée présente un pittoresque ensemble d’ateliers investis par des artisans et des professions libérales. Ebénistes, menuisiers, ferronnier, côtoient une maison d’édition, un cabinet d’architecte, un studio de design. Selon la légende, la cour en double impasse, destinée à devenir des écuries, aurait été construite aux alentours de 1789 avec les pierres de la Bastille. Son nom de cour d’Alsace-Lorraine lui est donné vers 1889, afin de commémorer la perte par la France des provinces d’Alsace et de Lorraine lors de la guerre contre la Prusse en 1871, provinces recouvrées après la Première Guerre Mondiale en 1918.
Au Haut Moyen-âge, la rue de Reuilly est l’artère principale du fief de Reuilly qui relève alors du domaine royal. Céréales, vignes et même élevages confèrent à ces terres agricoles la prospérité. A partir du XIIème siècle, elles sont placées sous la dépendance du Grand Prieuré du Temple. A la fin du XVème siècle, le fief est loué par la famille de Vitry. Lorsque que le chemin médiéval devient la Grande rue de Reuilly au XVIIIème siècle, la voie peu urbanisée est bordée de jardins, de vignes, de près.
Incluse dans les limites de l’enceinte des Fermiers Généraux, elle forme un grand axe entre Charenton et Saint Maur. Elle débute alors rue du faubourg Saint Antoine pour se terminer rue Lamblardie. De nos jours, les ingrates façades modernes ne laissent plus deviner ce passé champêtre. Seules quelques pittoresques impasses, courettes cachées, venelles secrètes comme surgies de nulle part ont gardé le souvenir d’un quartier à taille humaine, plus accueillant.
Réhabilitée dans les années 1990, la cour d’Alsace Lorraine a affirmé depuis sa vocation artisanale. Récemment, les ateliers ont été peints de couleurs vives qui rappellent Notting Hill. Parallèle au square Saint-Charles où se trouve l’accès à l’école Boulle, a abrité, de 1978 à 1995, l’atelier de décoration sur porcelaine de Camille Le Tallec, annexe du célèbre établissement d'enseignement des arts appliqués. Un bel escalier de bois dont la structure est rare se cache encore au fond de l’une des impasses tandis que l’autre aboutit sur le beau jardin d’une grande maison bourgeoise.
Cour d’Alsace-Lorraine - Paris 12
Accès 67 rue de Reuilly
Métro Montgallet ligne 8
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
Bibliographie
Promenades dans toutes les rues de Paris - Félix de Rochegude - Hachette
Dictionnaire historique des rues de Paris - Jacques Hillairet - Éditions de Minuit
Le guide du promeneur 12è arrondissement - Danielle Chadych - Parigramme
Paris secret et insolite - Rodolphe Trouilleux - Parigramme
Sites référents
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