Théâtre : Les Fantômes de la rue Papillon, de Dominique Coubes - Avec Michel Jonasz, Samy Seghir - Théâtre du Gymnase



Entre deux mondes, étoile jaune cousue au revers de sa veste, Joseph, un vieil homme qui a perdu la vie le 16 juillet 1942, lors de la rafle du Vel d'Hiv', observe vivre la rue Papillon à Paris de nos jours sans pouvoir entendre ce qui se passe. Sous ses yeux, un contrôle d'identité tourne mal. Haïssa, un jeune magrébin, est tué par la police et rejoint Joseph dans ces limbes où existent les fantômes. Morts à soixante-quinze ans d'intervalle au même endroit, pour la même raison, la haine de l'autre, ces deux âmes errantes se rencontrent et se racontent. Isolé, ne parvenant à saisir du monde que des brides d'information comme les gros titres des journaux que les passants déplient dans la rue, Joseph demande à Haïssa de lui dire le XXIème siècle. Celui-ci lui explique la technologie, l'argot mais aussi les stigmatisations, les injustices. Joseph voudrait savoir ce qui est arrivé à sa famille qu'il a vu emmenée sans plus jamais avoir de nouvelles. Haïssa cherche à préserver le vieil homme car il va devoir lui révéler les horreurs de l'Holocauste.







Comédie humaniste, plaidoyer contre l'intolérance, ode à la fraternité, Les Fantômes de la rue Papillon pose en parallèle deux destins, deux époques, deux drames singuliers pour évoquer des tragédies de la folie humaine, les horreurs de l'antisémitisme et du racisme. Ce récit d'amitié entre un vieux juif et un jeune arabe, au-delà du fossé générationnel et culturel, se révèle histoire de tolérance à travers une narration bienveillante porteuse d'espoir.

Dominique Coubes, auteur et metteur en scène, aborde les sujets sensibles de l'exclusion et du racisme avec intelligence, sans jamais sombrer dans la caricature. En interrogeant les consciences, il éclaire l'actualité récente et pousse la réflexion sans attiser les tensions. Si les circonstances et les époques sont différentes, les causes du décès de Joseph et Haïssa sont identiques, la stigmatisation dont ils ont été l'objet, similaire.




La mise en scène épurée est relevée par un beau travail de vidéos et d'images d'archives qui ajoute avec justesse à la progression dramaturgique. Sur scène, c'est la rencontre de deux caractères, deux comédiens dont la belle complicité fait merveille. Michel Jonasz tout en rondeurs bonhommes, incarne avec générosité ce vieux juif dont la candeur va être bouleversée par les révélations de Haïssa. Spontanée, très naturelle, la composition de Samy Seghir, un peu moins maîtrisée mais d'une sincérité touchante, est toute intuitive. Judith Magre fait une courte intervention vidéo très émouvante.

Du rire aux larmes, "Les Fantômes de la rue Papillon" nous parle de résilience avec sensibilité et humour. Drôle, tendre, cette création originale s'élève contre la stigmatisation ethnique ou religieuse dans un puissant message d'amitié entre les peuples. 

Ecrit et mis en scène par Dominique Coubes
Avec Michel Jonasz, Samy Seghir et la participation amicale de Judith Magre
Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 18h 

Théâtre du Gymnase
38 Boulevard de Bonne Nouvelle - Paris 10
Réservation au 01 42 46 79 79



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.