Cinéma : The Bling Ring, de Sofia Coppola

Israel Broussard, Claire Julien et Katie Chang - The Bling Ring


The Bling Ring est inspiré d’un fait divers sur lequel la journaliste d’investigation Nancy Jo Sales a écrit un long article dans Vanity Fair qui a attiré l’attention de la réalisatrice Sofia Coppola. A Los Angeles, une bande d’adolescents des beaux quartiers cambriolent de 2008 à 2009 les maisons des célébrités mettant à profit pour perpétrer leurs forfaits toutes les nouvelles technologies dont ils sont friands sites people trash, Google Earth, Application IPhone qui leur permettent à la fois de localiser les résidences de leurs idoles et de déterminer les moments où ils seront absents. Avec un butin estimé à 3 millions de dollars en fringues griffées, sacs siglés, bijoux de grands joailliers, souliers à semelles rouges, le gang atteint une certaine forme de célébrité lorsqu’ils sont rattrapés par la justice dans un final glaçant dans lesquels les média semblent justifier les créatures désolantes qu’ils ont engendrées.




Sofia Coppola traduit avec ce raffinement stylistique qui lui est propre, sa fascination du vide et les errances d’une jeunesse dorée, paumée entre fascination malsaine pour le mode de vie des people,  obsession pour la téléréalité, ennui morbide, acculturation et culte du matérialisme, perte des repères et quête de la transgression. A cette esthétique singulière, elle mêle pour la première fois des scènes de franche comédie avec notamment une Emma Watson en idiote tête à claques, hypocrite et vorace, particulièrement en forme. Ironie mordante, humour noir mettent en parallèle l’innocence et la trivialité de ces jeunes monte en l’air qui ont érigé l’ennui en art de vivre. Mention spéciale pour Katie Chang dans le rôle de la vénéneuse et perfide Rebecca qui enchante l'écran.


Katie Chang - The Bling Ring
Katie Chang et Taissa Farmiga - The Bling Ring


Malgré la distance qu’elle prend vis-à-vis de son sujet, une approche purement factuelle, Sofia Coppola laisse filtrer une certaine compassion envers ces ados superficiels et manipulateurs dont la futilité prend source dans la dictature des média, les modèles totalement creux qu’ils proposent, combiné à l’irresponsabilité manifeste de parents guère plus futés et peu concernés par leur progéniture. Flottement de l’adolescence, errance intérieure autant de thèmes abordés dans Virgin Suicides dont les adolescentes évanescentes sont à l’exact opposé des gamins tapageurs et jouisseurs de The Bling Ring.


Katie Chang, Israel Broussard, Claire Julien - The Bling Ring
Emma Watson - The Bling Ring

On ressent un profond vertige en regardant cette jeunesse rongée par la vacuité qui s’abîme dans les limbes de la médiocrité intellectuelle dans l’indifférence générale, pur produit  d’une société de consommation. Les personnages confondant de naïveté et de bêtise, narcissiques et insouciants vivent dans une bulle déconnectée de la réalité allant jusqu’à s’afficher sur Facebook avec leur butin, se vantant de leur exploits auprès de qui veut bien les écouter. Vidéosurveillance, smartphone, sites people racoleurs, images d’archives télévisées viennent renforcer ce sentiment d’irréalité car la vie ne se déroule que sur des écrans. Ce pamphlet clinquant à l’instar de ses protagonistes est porté par des dialogues minimalistes. Le film à l’élégance désenchantée parvient à donner une image joyeuse de la profonde neurasthénie qui ronge les personnages. Oxymore en cinémascope, fable d’une époque vide de sens, chronique d’une génération perdue au rythme d’une bande son pop, The Bling Ring est une satire efficace fascinante de vacuité dans laquelle le rêve en décomposition a des relents de fric et de cuir couture.

The Bling Ring - Réalisatrice Sofia Coppola
Acteurs : Emma Watson (Nicki), Katie Chang (Rebecca), Israel Broussard (Marc), Claire Alys Julien (Chloe), Taissa Farmiga (Sam)