Crédit Pershing Hall |
Derrière la sobre façade empire de cet ancien hôtel particulier que fit construire le comte de Paris à la fin du XIXè siècle, se cache un espace spectaculaire dont prestance et harmonie ont été préservées malgré les modifications apportées au fil du temps. Le Pershing Hall, nommé ainsi en hommage au général des forces armées américaines qui en fit son QG en 1917, abrite dès la fin des hostilités le cercle des officiers de l’American Legion, cercle des vétérans. Parcelle étasunienne à deux pas de la plus belle avenue du monde, le bâtiment, propriété du gouvernement américain, est loué en 1998 pour 99 ans à une société privée qui le convertit en hôtel de luxe. Après de grands travaux de rénovation sous la houlette de la talentueuse Andrée Putman, le palace ouvre ses portes au public en septembre 2001.
Exemple caractéristique de l’architecture empire, les volumes intérieurs ont été intégralement revisités. Seule la façade et le grand escalier demeurent intacts, à quelques détails près. En effet, la façade garde le souvenir du passé martial de l’établissement sous la forme d’un médaillon sculpté dans la pierre, aux armes de l’American Legion, qui surplombe la gigantesque porte et les frontons des fenêtres ornés de trois visages de soldats représentant les trois corps d’armée.
Le Pershing Hall devenu un hôtel design au fort potentiel d’attraction doit beaucoup à la réhabilitation entreprise par Andrée Putman. Rigueur dans l’organisation des espaces, épure de l’architecture d’intérieur donnent à la décoration et aux espaces, rythme et sens. L’entrée spectaculaire par la gigantesque porte aux volutes de fer forgé donne d’emblée une idée des altitudes qui prévalent dans ce lieu et l’on y entre un peu comme dans une cathédrale païenne. Le hall relativement sobre débouche sur un vaste volume articulé autour d’un patio ouvert sur le ciel qui nous en met plein la vue. Avec cet instinct infaillible qui la caractérisait, Andrée Putman a su deviner avant la vogue actuelle, l’appétit des urbains pour le vert en confiant à Patrick Blanc, extravagant botaniste, créateur du concept des jardins verticaux, la réalisation d’un impressionnant mur de végétation de plus de 30 mètres de hauteur.
Cette jungle luxuriante dans laquelle se mêlent plus de trois cent essences de plantes, arbres, arbustes provenant des Philippines, de l’Himalaya, d’Amazonie bouleverse la perspective et l’on ne peut s’empêcher de lever les yeux dans un chavirant vertige. Lianes, fougères, orchidées participent à cette prouesse horticole qui s’illumine la nuit venue par la grâce d’un ingénieux système éclairage qui souligne le végétal révélant sa vigueur. On doit également à cet artiste paysagiste de génie la façade végétale du Musée du Quai Branly. Ke sol du patio en granito identifie immédiatement la touche Putman. Morceaux de verre, éclats de nacre, fragment de marbre rouge corail caracolent dans un doux chatoiement coloré. L’après-midi, dans le calme verdoyant du salon de thé, le visiteur est transporté en pleine nature le temps d’un goûter.
Dans les salons du restaurant, rideaux de perles iridescents dans la lumière ambrée, épaisse moquette créent une atmosphère feutrée à laquelle luminaires et vases en verre de Murano carmin apportent une touche vibrante. Les jeux de lumière très présents animent le rouge, le vert, les ors, les roses de ces beaux volumes. Couleurs, matières s’associent, se combinent flattant par contraste les lignes pures de l’architecture. L’accès au bar lounge situé en mezzanine se fait par le grand escalier d’honneur - je vous conseille tout de même les ascenseurs moins dangereux en escarpins. Limitons le sport au club de gym - vaste escalier à la rampe étoilée surplombé du lustre Orgue de Lalique créé par Olivia Putman en 2011. Les fenêtres intérieures ouvertes sur des balcons donnent sur le patio et une mince terrasse surplombe les dîneurs.
Pour l’ambiance du restaurant et du bar, Imaad Rahmouni avait envie d’exotisme, perles et coussins de soie négligemment jetés sur les profonds canapés embossés crocodile, mur à calpinage de velours ou de moleskine mordorée selon les espaces, fauteuil très design italien. Le décor contemporain dans un cadre historique a quelques inconvénients puisque certains panneaux de bois classés, au niveau du bar, ne peuvent être déplacés ni modifiés. Les contraintes attisent la créativité ; ils ont été dissimulés et de nombreux jeux de lumière, résolument modernes dans des tons rose et ambre animent les murs. Le décor a visiblement subi une légère actualisation, plus sombre, plus nocturne, plus sexy que celui que je connaissais bien lorsque le Pershing Hall était l’un de mes repères - c'est-à-dire il y a fort fort longtemps, quand j’avais vingt ans, au Moyen-Age donc. Je regrette un peu que cela me fasse tant penser à la décoration signée Garcia qui balise tous les lieux Costes de la Capitale sans que le Pershing fasse partie de cette famille. Bref.
Ce bar lounge, que s’y passe-t-il ? Afterwork, apéro dînatoire avec finger food gourmande, soirées diverses, showcase à l’occasion, une animation cosmopolite qui se veut résolument branchée. Un personnel composé de sémillants jeunes gens visiblement plus recrutés sur leurs qualités physiques que pour leur efficacité mais avec le sourire tout passe et l’on profite du cadre sans regarder sa montre. Le bar propose une belle carte des champagnes, la coupe Veuve Cliquot rosé 21 euro, cocktails alcoolisés à partir de 18 euro : Sparkling Lalique - gin, champagne, pamplemousse, thym, sucre de canne, 21 euro - Au nom de la rose - champagne rosé, rhum brun, pétales de rose, citron et framboise, 24 euro, Imperial Strawberry - champagne, liqueur de fraise, menthe et fraises fraîches 24 euro, Sexy Star - vodka, Passoa, sirop de vanille, jus de fruit de la passion et fruits frais, champagne, 26 euro ou les classiques comme le Mojito - 18 euro. Les cocktails de fruit - 17 euro - plein d’invention se déclinent au gré des saisons : le Green Peace - kiwi, concombre, jus de pomme - le Matcha Ice - crème glacé thé vert, mangue et mûre, le Moment de grâce - fraise, betterave cranberry.
Si le bar en lui-même est très animé, la terrasse intérieure ou les petits balcons un peu à part sont parfaits pour épater une fille en mal de sensations parisiennes lors d’un premier rendez-vous. Question artillerie lourde, ça envoie du bois. J’ai des fantômes dans tous les recoins et c’est un peu étrange d’y retourner après si longtemps. Le calme des après-midis me semblent bien correspondre à la volonté d’élégance mais je suis un peu plus dubitative sur les soirées. C’est tout de même légèrement clinquant toute cette débauche d’habillages lumineux. A noter, un brunch jazzy le dimanche, comptez 59 euro pour connaître les privilèges de ce copieux buffet mais surtout pour profiter du cadre exceptionnel, de cet endroit unique et singulier.
Pershing Hall
49, rue Pierre Charron
Tél : 01 58 36 58 00
Horaires du bar lounge : 18h-2h
Brunch le dimanche : 11h30-16h
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