Paris : Péniche la Louise-Catherine, ancien asile flottant de l'Armée du Salut aménagé par Le Corbusier en 1929 - XIIIème


La Louise Catherine, péniche aménagée par Le Corbusier en asile flottant de l'Armée du Salut en 1929, est amarrée port d'Austerlitz au pied du viaduc. Malgré son état de délabrement avancée, la barge conserve une valeur patrimoniale et emblématique. Elle témoigne de la prise en charge de la grande précarité dans le cadre d'une oeuvre sociale. Ancien chaland destiné au transport des marchandises, l'embarcation est transformée en abri d'urgence en 1929, à l'initiative de l'artiste Madeleine Zillhardt (1863-1950) et rebaptisée Louise-Catherine en mémoire de sa compagne Louise-Catherine Breslau (1856-1927) peintre suisse. Son dortoir dispense de jusqu'à 198 couchages et son réfectoire de 36 places. L'asile flottant définitivement fermé en 1994, la péniche a connu divers revers de fortune depuis dont un naufrage à la fin des années 2010 et un renflouement en 2020. Elle attend, aujourd'hui, la suite de son sauvetage.







À l'origine, le Liège est un chaland construit à Amfreville, en Normandie, par Le Matériel flottant en 1915. Sa coque de ciment armé en béton de granulats de Seine se divise en trois caissons, à l'avant les quartiers du marinier, à l'arrière ceux du personnel. Jusqu'en 1920, le bateau de marchandises en vrac transporte du charbon de Rouen à Paris. Désaffectée la barge, propriété de l'Office national de la navigation, est laissée sans affectation dans le port fluvial de Rouen durant près de dix ans. L'Armée du salut s'en porte acquéreur en juin-juillet 1929 sur un projet porté par Madeleine Zillhardt. Le budget de réhabilitation, 92 000 francs, est financé par le mécénat de la princesse Edmond de Polignac

Le Corbusier, en collaboration avec son cousin Pierre Jeanneret et l'architecte japonais Kunio Maekawa, n'intervient pas sur la structure même. Il imagine un réaménagement dont le chantier est mené par l'entreprise parisienne Montcocol. Il fait surélever la barge, installer les divers équipements nécessaires. Le pont originel couvert d'une promenade bordée de garde-corps, le toit végétalisé. 

« On a acheté une des péniches de ciment armé dont l’essai avait été tenté pendant la guerre. La péniche a 80 mètres de long. On a construit, depuis son fond jusqu’au sommet du gabarit, autorisé par les services de navigation fluviale, un vaste local divisé en trois compartiments. On a aménagé 160 lits, une salle à manger, des cuisines, W.-C., lavabos, douches, appartement du marinier, appartement du Directeur, et un jardin suspendu sur le dessus de la péniche. En hiver, la péniche vient devant le Palais du Louvre héberger les clochards que les froids chassent loin des arches des ponts. En été, elle devrait servir de colonie de vacances pour les enfants, aux environs de Paris. » (Le Corbusier, Oeuvre complète de 1929-1934, Zurich, Les Éditions d’architecture, 1964).

Du mobilier d'origine dessiné par Le Corbusier demeurent le garde-corps, la chaise Thonet, trois placards, une jardinière. L'asile flottant de l'Armée du Salut ouvre en janvier 1930. Au début des années 1980, il fait l'objet de nouveaux aménagements. Il ferme définitivement en 1994 du fait de la présence d'eau dans la coque.







La péniche est achetée en 2006 par la Fondation Louise Catherine qui souhaite l'ouvrir au public. Le 9 décembre 2008, le Ministère de la Culture la classe aux monuments historiques au titre d'objet mobilier. Un chantier de restauration débute fin mai 2013 et progresse jusqu'en décembre 2015, date à laquelle où il est interrompu du fait de difficultés financières.

Le 10 février 2018, à la suite d'intempéries et d'une crue importante de la Seine, la Louise-Catherine, victime d'une avarie, coule en vingt minutes. Démunie face à cet accident, la SAS Louise-Catherine fait l'objet d'une liquidation judiciaire en septembre 2019.

En août 2020, l'association japonaise Architectural Design Association of Nippon (ADAN) rachète la Louise-Catherine. La barge est renflouée le 19 octobre 2020. Le projet de réhabilitation en centre d'art avec l'intervention de l'architecte japonais Shuhei Endo, interrompu par la crise sanitaire, demeure en suspens.

La Louise-Catherine, ancien asile flottant de l'Armée du Salut
Port d'Austerlitz - Paris 13
Métro Gare d'Austerlitz ligne 5



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 

Bibliographie
Le guide du promeneur 13è arrondissement - Gilles-Antoine Langlois - Parigramme
Paris secret et insolite - Rodolphe Trouilleux - Parigramme
Curiosités de Paris - Dominique Lesbros - Parigramme