Paris : Passage Basfour, mémoire du Paris médiéval - IIème

 

Le passage Basfour, dans le IIème arrondissement, a conservé son allure médiévale dont témoigne son étroitesse et ses pavés. À l'entrée de cette voie piétonne, angle de la rue Saint Denis aux numéros 174/176, se trouvent d'anciennes maisons à pignon du XVIème siècle. La ruelle, impasse tracée au XIVème siècle, aboutit à l'origine aux fours de la Plâtrière de la Croix Verte. Elle porte pour noms successifs, ruelle Sans Chef, ruelle Bas Four, cul de Sac de Bas Four, mention encore gravée dans un mur à l'entrée du passage. Ces appellations conservent la mémoire d'une activité abandonnée depuis longtemps. Le terrain jouxte l'Hôpital de la Trinité fondé en 1202 qui s'est donné pour mission d'assister les pauvres et offrir l'hospitalité aux pèlerins lors de leur passage à Paris sur le chemin de Saint Denis. Les Prémontrés de l'abbaye d'Hermières-en-Brie, en charge de l'établissement, font l'acquisition des parcelles où se trouvent les anciens fours pour ouvrir en 1224 un cimetière adjacent à leur enclos. La ruelle dite du Bas Four est mentionnée en 1374 dans les archives de l'abbaye de Saint Martin des Champs puis devient alternativement vers 1400, ruelle Sans Chef ou cul de Sac du Bas Four. 








En 1348, la Grande peste ravage Paris. Le cimetière des Innocents se trouve débordé par l'afflux des victimes. La ville de Paris se porte acquéreur de l'ancien cimetière de l'hôpital de la Trinité ainsi qu'une portion de l'enclos afin d'enterrer les centaines de corps acheminés depuis l'Hôtel-Dieu. Les autorités font ouvrir des fosses d'une capacité inédites, jusqu'à six-cents cadavres. Accessible depuis l'extérieur, le cimetière donne sur une ruelle située au niveau de l'actuel numéro 164 de la rue Saint Denis. Le lieu de sépulture est privilégié fin 1418, pour enterrer les victimes de la guerre civile entre les Armagnac et les Bourguignons, ainsi que les épidémies de peste en 1428 et 1466. 

En 1545, les anciens bâtiments de l'Hôpital de la Trinité sont dévolus à l'hospice des Enfants-Bleus, orphelinat où les pupilles reçoivent une formation professionnelle artisanale. Le roi Henri II suggère en 1554, la désaffectation du cimetière de la Trinité pour des raisons d'hygiène et l'ouverture d'un cimetière sur l'île Maquerelle. Malgré les nouvelles dispositions, le cimetière de la Trinité perdure.

L'Hôtel-Dieu de Paris et l'Hôpital de la Trinité choisissent, en 1672, pour des raisons sanitaires de déménager la nécropole vers une parcelle du faubourg Saint Marcel, qui devient cimetière de Clamart. De celui de la Trinité abandonné, seul persiste jusqu'en 1678 le carré réservé aux protestants au Nord-Est. Le cimetière désaffecté, les terrains libérés sont dévolus aux nouveaux bâtiments destinés à l'instruction des Enfants Bleus.








En 1714, le passage Basfour, ruelle Sans Chef, ne possède qu'une seule lanterne et une seule maison, propriété de l'Hôpital de la Trinité. Au numéro 4 actuel, un charbonnier occupe la maison dite maison des Vieilles Étuves dont l'entrée principale se trouve rue Saint Denis. Une ancienne chapelle de la Trinité se dissimule alors derrière ses murs.

Au sein de la maison à l'angle du passage Basfour et rue Greneta, à l'enseigne du Roi-David depuis le début du XVIIIème siècle, un artisan peaussier remplace une lingère en 1814. Lors des journées révolutionnaires de juin 1848, propriété de M. Honoré qui abrite des logements modestes, loués à une population ouvrière, la maison est assiégée. Soixante-dix fusils sont déposés dans les escaliers par les insurgés. 

Sous le Second Empire (1852-1870), les grands travails menés sous la houlette du baron Haussmann modernisent Paris, éventrant les quartiers les plus anciens. Leur densité est suspectée de favoriser la diffusion des maladies. La suppression du passage Basfour est envisagé à l'occasion du percement du boulevard Sébastopol, entériné par décret du 29 septembre 1854. Seule la partie haute du passage disparait en 1857.

Passage Basfour 
176 rue Saint Denis / 25 rue de Palestro - Paris 2
Métro Réaumur Sébastopol ligne 4



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.