Paris : Cour des Petites Écuries, passage pittoresque et célèbre brasserie - Xème

 

La Cour des Petites Écuries, passage pittoresque, révèle des charmes presque champêtres à condition d'en situer les entrées discrètes. Sous un porche atypique dans son jus côté rue du Faubourg Saint Denis et un second moderne sans charme sur la rue d'Enghien, elle ouvre également sur une ruelle récente, boyau peu affable. Dans ce quartier animé, les bureaux ont remplacé manufactures et maisons d'industriels enrichis dont quelques vestiges subsistent derrière les portes cochères. La désindustrialisation de Paris, au cours de la seconde moitié du XXème siècle, a profondément transformé la topographie du faubourg Saint Denis. Aujourd'hui, pléthore de restaurants et de bars se dispute l'attention des start-upers et jeunes yuppies qui travaillent ici. La Cour des Petites Écuries, prisée des Parisiens pour ses établissements "branchés mais pas trop" est également fort appréciée des touristes américains près à se déplacer tout exprès pour la célèbre Brasserie Flo au numéro 7 de la voie.









La rue des Petites Écuries est ouverte en 1780 sous le nom de "rue des Petites Écuries du Roi" sur la portion couverte en 1769 du Grand Égout de ceinture, canalisé en 1740. À l'emplacement formé par l'angle de cette rue et de la rue du Faubourg Saint-Denis, sont établies, en 1755, sous le règne de Louis XV (1710-1774), les Petites Écuries du Roi. Annexes parisiennes de l'institution versaillaise, elles logent chevaux ordinaires prêtés à certains gentilshommes, chevaux d'attelage, et conservent dans les remises calèches et petits carrosses les plus communs. 

Selon la légende, la cour des Petites Écuries aurait été tracée en 1780 sur l'ancien parcellaire d'un domaine du XVIIème siècle, villégiature propriété de Ninon de Lenclos (1620-1705), salonnière, femme de lettres et courtisane. À l'origine, la cour dispose de deux issues, rue du Faubourg Saint Denis et rue des Petites Écuries. En 1819, une troisième est percée sur la rue d'Enghien. En 2001, la construction d'immeubles sans attraits sur une parcelle de la cour donne naissance au passage des Petites Écuries, étroit goulet aux murs aveugles entre la cour et la rue des Petites Écuries. 

Au milieu du XIXème siècle, la cour accueille une école de dessin gratuite destinée aux ouvriers du faubourg Saint-Denis. En 1836, le sculpteur Louis-Denis Caillouette (1790-1868) s'associe à Dupuis l'Aîné et Dupuis Jeune. Ils organisent bénévolement des cours, soutenus dans leur action par une allocation de la Ville de Paris d'un montant de 4200 francs. Trois fois par semaine de 20h à 22h, ils forment leurs élèves aux métiers de peintres décorateurs, peintres sur porcelaine, graveurs en orfèvrerie et sculpteurs ornemanistes. En 1840, les travaux des plus méritants sont exposés au sein de la Mairie du IIIème arrondissement, futur Xème. 









Au numéro 5 de la Cour des Petites Écuries, derrière une porte fermée par un digicode, se trouvent les vestiges d'une ancienne chapelle du XVIIIème siècle, destinée aux artisans du quartier. 

Au numéro 7, la Brasserie Flo, aujourd'hui Floderer, raconte un peu de l'Histoire française. Sous le Second Empire, brasseries alsaciennes ou belges se multiplient à Paris. Leurs spécialités roboratives à moindre coût, leurs décors folkloriques séduisent toutes les classes sociales. Dès 1886, un "dépôt de bière", débit de boisson tenu par un certain Jean Voitenleitner s'établit au 7 cour des Petites Écuries. 

L'établissement repris en 1901 par Robert Flöderer, Alsacien ayant fui sa région natale annexée par la Prusse en 1870, devient "Brasserie Hans" puis "Brasserie Floderer" en 1909.  Le décor 1900, réalisé entre 1910 et 1913, confère au lieu cette atmosphère unique de taverne alsacienne, boiseries, vitraux, scènes peintes à la gloire de Gambrinus roi de la bière. En 1918, au lendemain de la Grande Guerre, les noms à consonances germaniques suscitent l'aversion. L'établissement est rebaptisé "Brasserie Flo" afin d'éviter les esclandres et de retrouver grâce auprès de la clientèle. En 2018, le nouveau directeur, Jean-Noël Dron, patron du groupe Les Grandes Brasseries de l'Est, lui redonne son appellation d'origine. 

Depuis 2015, au numéro 16 de la cour des Petites Écuries se trouve le siège de la Fondation de la France Libre.

Cour des Petites Écuries 
Accès 61 - 63 rue du Faubourg Saint Denis / 18 rue d'Enghien - Paris 10
Métro Château d'eau ligne 4




Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 

Bibliographie
Connaissance du Vieux Paris - Jacques Hillairet - Rivages 
Le guide du promeneur 10ème arrondissement - Ariane Duclert - Parigramme