Paris : Square Roger Stéphane, oasis verdoyante de la discrète rue Juliette Récamier - VIIème

 

Le square Roger Stéphane, espace vert du VIème arrondissement, se dissimule aux regards tout au fond de la rue Juliette Récamier, discrète impasse résidentielle. Méconnu presque secret, ce jardin à l'anglaise recèle quelques arbres remarquables, un beau figuier à l'entrée, un majestueux hêtre pleureur, un sophora. Sa topographie vallonnée associe douces buttes plantées de plantes d'ombre, rhododendrons, azalées, bruyères et terrasses fleuries de fuchsias, géraniums, pervenches, magnolias ou lavandes. D'une superficie de 1438m2, le square Roger Stéphane a été aménagé en 1933 sur les anciens jardins de l'Abbaye aux Bois disparue et de l'Hôtel de Vaudreuil dont l'entrée se trouve 7 rue de la Chaise. Ouvert sous le nom de square Récamier en hommage à la belle Juliette, muse de Chateaubriand, il a changé d'appellation pour devenir en 2008, square Roger Stéphane (1919-1994), journaliste, écrivain, résistant, co-fondateur de Combat durant la Seconde Guerre Mondiale, et de l'Observateur.







Halte heureuse de quiétude, le square Roger Stéphane se déploie sur les terres d'une ancienne communauté religieuse, l'Abbaye aux Bois, couvent de Bernardines dont les bâtiments occupaient la parcelle entre le 16 rue de Sèvres et le 11 rue de la Chaise. La communauté Notre Dame aux Bois fondée en 1202 à Ognolles dans le diocèse de Noyon en Picardie s'établit à Paris en 1654 sous la protection de la reine Anne d'Autriche (1601-1666). Les religieuses rachètent alors le monastère des Annonciades des Dix Vertus de Notre Dame édifié en 1638. 

À la Révolution, la communauté est dispersée, les biens nationalisés. Les bâtiments conventuels deviennent un temps prison sous la Terreur. Vendus à des particuliers en 1797, ils sont convertis en habitations privées. L'église du couvent, préservée de la destruction, est rendue au culte en 1802. Elle devient l'annexe de la paroisse Saint Thomas d'Aquin. Sous la Restauration (1814-1830), une ordonnance royale autorise l'installation des chanoinesses de Saint Augustin. L'ensemble donnant sur la rue de Sèvre est réservé à une école d'enseignement congréganiste, cours privé destiné aux jeunes filles. Certains appartements dans les étages sont loués aux dames de la bonne société, souvent des veuves souhaitant se retirer du monde.



Abbaye aux Bois





Juliette Récamier (1777-1849) l'une des "Trois Grâces" du Directoire avec Joséphine de Beauharnais et Madame Tallien, tient un salon important, où elle reçoit les grandes figures de la vie littéraire, artistique, politique dans ses hôtels particuliers successifs. A la suite d'un revers de fortune de son époux, elle s'installe, en 1819, dans un petit appartement de l'Abbaye aux Bois. Deux pièces séparées par un couloir, au troisième étage des bâtiments conventuels. À partir de 1825, elle loue un appartement plus grand au premier étage. 

De 1819 jusqu'à son décès en 1849, Madame Récamier ne renonce pas à son salon qu'elle poursuit, présidé par Chateaubriand rencontré en 1817. Elle apporte son soutien à des jeunes écrivains Alphonse de Lamartine, Honoré de Balzac, Sainte-Beuve, des artistes François Gérard qui réalise son plus célèbre portrait conservé au Musée Carnavalet, Antonio Canova, le sculpteur Joseph Chinard. Elle accueille des hommes politiques d'envergure, Victor Cousin, Edgar Quinet, Saint-Marc Girardin, Alexis de Tocqueville.








En 1904, la "loi Combes" interdit l'enseignement en France aux congrégations religieuses et organise la liquidation de leurs biens. Les bâtiments de l'Abbaye aux Bois sont rasés à l'occasion de l'élargissement de la rue de Sèvres entre 1906 et 1907. La rue Juliette Récamier et le square sont tracés sur les terrains libérés. À l'emplacement du cloître en 1919, est construit le théâtre Récamier aujourd'hui salle de répétition de la Comédie Française.

Square Roger Stéphane
7 rue Juliette Récamier - Paris 7
Métro Sèvres Babylone lignes 10, 12 / Saint Sulpice ligne 4



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 

Bibliographie
Le guide du patrimoine Paris - Sous la direction de Jean-Marie Pérouse de Montclos - Hachette
Le guide du promeneur du 7è arrondissement - Françoise Colin-Bertin - Parigramme
Saint-Germain des Prés et son faubourg, évolution d’un paysage urbain - Dominique Leborgne - Parigramme
Connaissance du Vieux Paris - Jacques Hillairet - Rivages