Expo Ailleurs : Picasso / Ateliers Hugo : les hommes d'or - Musée Magnelli - Vallauris - Jusqu'au 25 septembre 2023

 

A l'occasion du cinquantième anniversaire de la disparition de Pablo Picasso, le Musée Magnelli de Vallauris consacre une exposition aux pièces d'orfèvrerie du maître espagnol. Les oeuvres réalisées en collaboration avec François Hugo, petit-fils de l'écrivain et orfèvre de renom, témoignent d'une pratique restée longtemps confidentielle. L'exposition "Picasso Ateliers Hugo : les hommes d'or" réunit soixante-cinq artefacts, plats en argent et bijoux en or, fruits de cette réflexion commune menée entre 1956 et 1961.

En 1955, Pablo Picasso désire transposer ses plats de céramique en argent. Retranscrire dans le métal la finesse du dessin, la profusion des détails en trois dimensions, la richesse des motifs picassiens est un véritable défi que relève François Hugo. L'orfèvre propose une solution alternative à la fonte trop grossière, une technique unique développée spécifiquement pour Pablo Picasso, le repoussé ciselé. Cette prouesse devenue emblématique des Ateliers Hugo va séduire d'autres artistes, Max Ernst, André Derain, Jean Lurçat, Jean Arp, Roberto Matta, Jean Dubuffet. Sur les "empreintes originales" en relief façonnées par l'artiste, des feuilles de métal sont longuement martelées. Ce travail méticuleux s'inspire de pratiques ancestrales empruntées aux civilisations précolombiennes et méditerranéennes. Picasso et Hugo produisent ensemble vingt-quatre plats et quatre compotiers en argent, cinq sculptures, trente-trois médaillons et broches en or 23 carats. 









L'exposition "Picasso Ateliers Hugo : les hommes d'or" se tient dans une annexe du Musée Magnelli, l'Eden, ancienne salle de cinéma transformé en espace de monstration. Conçue avec le concours des Ateliers Hugo, aujourd'hui animés par Nicolas Hugo petit-fils de François, l'évènement présente la collection complète des vingt-quatre premiers plats d'argent, un ensemble de bijoux en or, ainis que des documents d'archives et des photographies. La somptueuse scénographie, double temple aztèque célébrant la lune et le soleil, vient souligner la proximité des approches dans les domaines de l'orfèvrerie et de la céramique.  

Pablo Picasso vit et travaille à Vallauris de 1947 à 1955. Il y explore le potentiel de la céramique en étroite collaboration avec Suzanne Ramié et son époux Georges au sein de l'Atelier Madoura. Grâce au savoir-faire des artisans, il réinvente les codes pour imaginer 3000 pièces uniques et 633 céramiques en éditions limitées. La modernité de la production le pousse vers d'autres médiums. 

En 1955, Picasso cherche à adapter ces nouvelles "pâtes blanches" en orfèvrerie, les transposer en plats d'argent. Les premiers essais de fonte sont infructueux. Les résultats grossiers ne satisfont pas le maître. L'historien d'art britannique Douglas Cooper contacte alors François Hugo dans ses ateliers d'Aix en Provence. Il s'agit de retrouvailles pour Pablo Picasso et François Hugo qui se connaissent déjà et s'admirent mutuellement.








Picasso envoie à Aix un ensemble d'assiettes de céramique, "Dormeur", "Visage de faune", "Visage en forme d'horloge", "Faune cavalier", "Jacqueline au chevalet", "Profil de Jacqueline". Transposer les formes de la céramique, en or et en argent, le haut degré de détails, les effets de surface, la fluidité du trait demande d'aller au-delà de l'adaptation d'un support à l'autre. Deux années d'expérimentation, d'échanges artistiques et amicaux, d'aller-retour entre Aix et Vallauris, sont nécessaires pour déterminer la technique adéquate. Picasso et Hugo obtiennent un résultat concluant avec le premier plat en argent en 1957, "Dormeur". 

La technique ancestrale du repoussé, martelage employé par les civilisations précolombiennes ainsi que certaines civilisations du bassin méditerranéen comme les Hittites, leur donne enfin satisfaction. La fine feuille de métal est martelée au sein d'un moule en bronze, une matrice en creux moulée sur le prototype de l'artiste. Le repoussé ciselé permet d'obtenir des plats d'un diamètre de 42 centimètres au poids limité à environ 2,7kg. Les finitions accentuent les reliefs, parties saillantes brillantes, fonds mates. Par la suite, les deux hommes imaginent des créations spécifiques au médium, à sa dimension plastique. 








Picasso réticent à la commercialisation de ces créations, les conserve chez lui à "La Californie", objets du quotidien presque banals. Jacqueline Roque-Picasso, émerveillée par la beauté de ces plats, émet le désir de les porter en bijoux. Pablo Picasso et François Hugo imaginent alors un ensemble de médaillons et de broches en or 24 carats afin d'accéder à cette requête.

Aujourd'hui les Ateliers Hugo, perpétués par le fils de François, Pierre Hugo, et Nicolas Hugo, le petit-fils, sont seuls habilités à éditer plats et bijoux. Une exclusivité qui célèbre les liens d'amitié et de considération noués entre Pablo Picasso et François Hugo.

Picasso / Ateliers Hugo : les hommes d'or 
Jusqu'au 25 septembre 2023

Salle Eden annexe du Musée Magnelli
Musée Magnelli – Musée de la Céramique
Place de la Libération – 06220 Vallauris
Tél : 04 93 64 71 83
Horaires : Été Du mercredi au lundi 10h-12h30 et 14h-18h – Fermé le mardi




Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.