Ailleurs : Théâtre de la Mer Jean Vilar, ancien Fort Saint Pierre, une citadelle du XVIIIème siècle devenue haut lieu culturel de la ville de Sète

 


Le Théâtre de la Mer Jean Vilar à Sète, ancien fort Saint Pierre réhabilité, dresse sa silhouette trapue de citadelle défensive érigée au XVIIIème siècle à l'aplomb d'une falaise qui domine le cap. Oeuvre d'un disciple de Vauban, la place forte protégeait le port de Sète contre les attaques maritimes en tandem avec le fort Richelieu sur les hauteurs du Mont Saint Clair. Son architecture militaire caractéristique se fond dans un paysage à la minéralité marquée. Tour à tour caserne, prison, hôpital, le fort embrasse une nouvelle vocation plus pacifique au mi-temps du XXème siècle et devient le Théâtre Jean Vilar en 1960. Patrimoine maritime de la ville, désormais symbole du dynamisme culturel de Sète, son amphithéâtre ouvert sur la mer accueille jusqu'à deux-mille spectateurs dans un cadre unique. Rendez-vous artistiques variés et temps forts de la saison estivale s'y succèdent au gré des nombreuses manifestations proposées par la ville, festivals de musique, Fiest'À Sète, Jazz à Sète, le festival de poésie Voix vives, de Méditerranée en Méditerranée. 









Malgré une position avantageuse entre l'étang de Thau, la colline et la Méditerranée, Cette, village de pêcheurs accroché aux flancs du Mont Saint Clair, conserve des dimensions modestes depuis l'Antiquité jusqu'au XVIIIème siècle. A la fin du XVIème siècle, le célèbre corsaire et pirate Gaspard Dot dit Barberoussette, y établit son refuge. Henri IV (1553-1610) envisage un temps la création d'un port d'envergure. Sans suite. Sur les conseils de son ministre Jean-Baptiste Colbert (1619-1683), Louis XIV (1638-1715) entérine le développement d'une étape commerciale aux portes du Languedoc. La première pierre du môle du port de Cette (officiellement orthographié Sète à partir de 1928) est posée le 29 juillet 1666, jour de la saint Louis, date officielle de la fondation de la ville moderne.

Colbert et Vauban (1633-1707) ingénieur et architecte militaire de Louis XIV, également essayiste, acteur majeur du Grand Siècle, précurseur des Lumières, ont de vastes projets pour la région. Ils envisagent dès 1684 de relier le Canal des Deux Mers à Narbonne. Auteur de la doctrine militaire défensive de la France, Vauban organise la protection du Royaume autour d'une "ceinture de fer" qui concentre les places fortes aux frontières. Le roi le charge d'inspecter les ports des côtes françaises afin d'y établir des citadelles. 








Vauban visite Sète afin de déterminer les améliorations structurelles et défensives envisageables. Il confie le chantier à l'un de ses disciples, Antoine Niquet (circa 1641-1726), ingénieur du roi, nommé ingénieur général des fortifications de Provence, du Dauphiné et du Languedoc en 1680. Ce dernier réfléchit à la construction de différents forts et tours défensives susceptibles d'accueillir des batteries de canons. Mais la difficile fin de règne de Louis XIV est marquée par des difficultés financières, des revers militaires, des famines, des révoltes. 

La fortification du port de Sète est laissée en suspens jusqu'aux événements survenus entre le 24 et le 29 juillets 1710. Dans le cadre de la Guerre de succession d’Espagne (1710-1713), la flotte britannique de l'amiral Morris attaque le port de Sète. La ville, encore modeste et mal protégée, tombe rapidement. Aussi vite reprise grâce à l'intervention des troupes du duc de Noailles (1678-1766), officier du roi Louis XIV, gouverneur du Roussillon et du Berry. 

A la suite de cette offensive, la Couronne finance le renforcement de la protection du port de Sète et double l'armement du fort Saint Louis édifié sur le môle.  Au-dessus de l’anse du Lazaret, la Butte Ronde, batterie semi-circulaire à deux bastions et six canons, voit le jour. Les véritables murs de fortification de la ville ne seront pourtant construits qu'après 1743, à l'occasion de la Guerre de Succession d'Autriche qui oppose la France de Louis XV et l'Angleterre.  









L'ingénieur royal, Jacques-Philippe Mareschal (1689-1778), nommé en 1739 Ingénieur des fortifications de Provence et Languedoc complète le système défensif du port de Sète entre 1743 et 1746. Il reprend les plans d'Antoine Niquet pour édifier les forts Saint-Pierre et Richelieu sur les hauteurs du Mont Saint Clair, et la Redoute du Castellas côté Marseillan. Hexagone irrégulier, le fort Saint Pierre, aligne sept batteries, plateformes développées en amphithéâtre sur deux étages. Il protège la ville à l'Est en soutien au fort Saint Louis, au fort Richelieu au Nord, et sert de stockage de poudre et de boulets.

De caserne, la citadelle est transformée en prison lors de la Conquête de l'Algérie par la France (1830-1902). A la suite de sa reddition formelle au duc d'Aumale, l'émir Abd-el-Kader (1808-1883), sa famille et certaines de ses fidèles y sont détenus en avril 1848. Captifs au fort Lamalgue à Toulon, puis à Pau, ils sont transférés, en novembre 1848, au château d'Amboise. En 1914, le fort Saint Pierre, cédé aux hospices de la ville, devient hôpital et lieu de quarantaine pour les soldats de retour d'Afrique atteints de maladies infectieuses. En 1944 le fort est endommagé par les troupes Allemandes lors de leur repli. 







Laissé à l'abandon, le fort Saint Pierre, propriété de l'hôpital de Sète, fait l'objet d'une réhabilitation d'envergure en 1959, sous l'impulsion de l'acteur et metteur en scène Jean Deschamps (1920-2007). Loué pour un euro symbolique à la Ville, il est transformé en salle de spectacle. Le Théâtre de la Mer Jean Vilar (1912-1971), baptisé en hommage au comédien et metteur en scène sétois, fondateur du Festival d'Avignon, inauguré en 1960 multiplie depuis les événements culturels, concerts, spectacles, soirées cinéma. 

Théâtre de la Mer Fort Saint Pierre
Promenade Maréchal Leclerc - 34200 Sète



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.