Ailleurs : Tombeaux des Ducs de Bourgogne, chefs-d'oeuvre de l'art funéraire médiéval, fleurons du Musée des Beaux-Arts de Dijon

 


Les tombeaux des ducs de Bourgogne, Philippe II de Bourgogne dit Philippe le Hardi (1342-1404), Jean Ier de Bourgogne dit Jean sans Peur (1371-1419) et son épouse Marguerite de Bavière (1363-1424), oeuvres remarquables, s’inscrivent au cœur du parcours Moyen-Âge et Renaissance du Musée des Beaux-Arts de Dijon. Chefs-d’œuvre de l’art funéraire médiéval, ces monuments sont exposés depuis 1827 dans la vaste salle des Gardes, édifiée entre 1450 et 1455 à l’initiative de Philippe III de Bourgogne dit Philippe le Bon (1396-1467), entièrement restaurée et rouverte au public en 2013. Le tombeau de Philippe le Hardi, cénotaphe réalisé entre 1381 et 1410, destiné à la Chartreuse de Champmol fondée en 1385, se caractérise par la générosité de ses dimensions, monumental ensemble de plus deux mètres de haut. Son esthétique particulière se distingue par les proportions entre le gisant et les pleurants, le socle maçonné, et le réseau d’arcatures gothiques entre lesquelles sont placées quarante-et-une statuettes d’albâtre. Le cortège de pleurants en ronde-bosse remarquable innove alors par sa finesse ornementale, riche élégance. La précision des détails, vêtements tout autant que physionomies, confère une expressivité frappante aux visages sur lesquels se lisent affliction, espoir. Le gisant du duc, couronné dans un ample manteau, mains jointes, entouré de deux anges agenouillés, un lion à ses pieds repose sur une dalle noire. Devenu archétype idéal de la sépulture, le tombeau de Philippe de Hardi sert de modèle pour le cénotaphe de son fils Jean Sans Peur, commandé par Philippe III de Bourgogne, dit Philippe le Bon (1396-1467), son petit-fils. Menacés à la Révolution, partiellement détruits puis restaurés au XIXème siècle, les tombeaux des Ducs de Bourgogne sont désormais le fleuron des collections du Musée des Beaux-Arts de Dijon










Philippe II de Bourgogne, dit Philippe le Hardi (1363-1404), quatrième et dernier fils du roi Jean II de France, dit « Jean le Bon », et de Bonne de Luxembourg, reçoit en 1363 le duché de Bourgogne en apanage et devient le premier duc de Bourgogne de la maison de Valois. Il fonde la Chartreuse de Champmol en 1378 afin de rivaliser avec la nécropole des rois de France, à Saint-Denis. Le chantier prestigieux attire les plus brillants artistes et artisans d’Europe. Le sculpteur Jean de Marville ( ? - 1389) entre au service du duc en 1372 et devient son « maître imagier ». Associé au projet de la chartreuse de Champmol jusqu’à son décès, Philippe le Hardi lui confie en 1381 la conception d’un tombeau monumental. Marville achève les arcatures du monument en 1384. Malade, il décède en 1389 sans avoir achevé la sépulture. Claus Sluter (vers 1355 - 1406) lui succède à la tête de l’atelier de sculpture et poursuit la réalisation des arcades, sculpte la dalle de marbre noir et l’ébauche en marbre blanc pour le gisant. 

Philippe le Hardi meurt en 1404. La statuaire du monument funéraire demeure incomplète, seuls deux pleurants ont été réalisés sur les quarante-et-un. Claus Sluter disparaît en 1406. Son neveu et collaborateur Claus de Werve (1380-1439) prend la relève et achève finalement le tombeau, le cortège des pleurants, le gisant, les anges et le lion. Le peintre décorateur Jean Malouel (vers 1370-75 - 1415) intervient pour la polychromie et les dorures. En 1410, le tombeau de Philippe le Hardi prend enfin place dans le chœur de l’église de la Chartreuse de Champmol. 









Philippe III de Bourgogne dit Philippe le Bon (1396-1467) prend l’initiative d’ériger un tombeau sur le modèle de celui de Philippe le Hardi, pour ses parents Jean Ier de Bourgogne dit Jean sans Peur (1371-1419) et Marguerite de Bavière (1363-1424). Il fait appel probablement appel à Claus de Werve, pour établir le projet initial, marbre noir de Dinant pour la dalle et le soubassement, albâtre de Salins pour les pleurants, les arcatures et les gisants. Mais il laisse le tombeau inachevé à sa mort en 1439.

En 1443, Philippe le Bon confie la suite du chantier à Jean de la Huerta (1413- vers 1462) mais le contrat qui les lie contient une clause selon laquelle le sculpteur doit achever les tombeaux en moins de quatre ans. Au cours de la réalisation des gisants, la Huerta est confronté à des aléas. A deux reprises, les blocs d’albâtre rompent. Déboires et retards s’accumulent. Incapable de tenir les délais, il choisit alors de fuir Dijon à la fin décembre 1456, vers Mâcon ou Chalon. Sa trace disparaît vers 1462. Le chantier du tombeau ducal est suspendu une nouvelle fois. En 1461, Antoine Le Moiturier (1425 - après 1497), sculpteur avignonnais, prend la relève. De 1466 à 1469, il achève la sculpture des pleurants, têtes et mains des gisants, les deux lions. En 1470 le tombeau est enfin placé dans le chœur de l’église de Champmol aux côtés de celui de Philippe le Hardi. 

La chartreuse de Champmol nationalisée à la Révolution, est vendue en 1792. Jugés d’un intérêt artistique manifeste, les tombeaux des Ducs de Bourgogne sont déplacés à l’église Saint-Bénigne. Mais en 1793, à la suite d’actes de vandalisme, les tombeaux démontés sont en partie détruits. Du gisant de Philippe le Hardi ne demeure que les mains jointes. En 1799, le Muséum de Dijon expose soixante-dix pleurants. 








Au début du XIXème siècle, l’architecte Claude Saintpère (1771-1854) prend l’initiative de la reconstitution des tombeaux. Il obtient en 1819 un financement par le Conseil général de la Côte-d’Or. Ses recherches lui permettent de réunir les fragments dispersés dans des dépôts lapidaires variés et des collections privées. Grâce à des dessins anciens, il fait l’inventaire des pleurants manquant et retrouve l’ordre de la procession. Le cortège se compose d’un aspergeant, deux enfants de chœur, un porte-croix, un diacre, un évêque, un chantre, deux moines chartreux, puis la famille et les gens de la maison. 

Claude Saintpère rachète deux pleurants à des collectionneurs privés. Il charge le sculpteur Jean-Baptiste Moreau d’exécuter des copies des dix pleurants manquants d’après les dessins. Clin d’œil, celui-ci représente l’architecte en redingote pour remplacer la dixième statuette manquante. Le gisant de Philippe le Hardi dont il ne reste que les mains jointes, représente désormais le duc drapé dans un simple manteau alors que l’original, un peu plus petit, portait une armure sous une pèlerine. Le chantier de restauration s’achève en 1824. Charles-Balthazar Févret de Saint Memin (1770-1852), conservateur directeur du Musée des Beaux-Arts de Dijon de 1817 à 1852 formule l’idée de présenter les tombeaux restaurés dans la Grande salle des Gardes du palais ducal. Le projet se réalise en 1827. 

Entre 1890 et 1960, une partie des pleurants disparus sont retrouvés. Sept toujours absents sont remplacés par des copies, moulages des quatre statuettes conservées au musée de Cleveland et copies d'après dessins de deux enfants de chœur appartenant au tombeau de Philippe le Hardi, ainsi qu'un aspergeant du tombeau de Jean sans Peur qui demeurent introuvables. 

A l’occasion des grands travaux de rénovation du Musée des Beaux-Arts de Dijon, les pleurants du tombeau de Jean Sans Peur ont entamé une tournée internationale de 2010 à 2012, le Metropolitan Museum of Art de New York, Saint-Louis, Dallas, Minneapolis, Los Angles, San Francisco, Richmond, un temps au musée de Cluny à Paris. 

Tombeaux des Ducs de Bourgogne

Palais des ducs et des États de Bourgogne 
1 rue Rameau - 21033 Dijon Cedex
Tél : 03 80 74 52 09
Horaires : Ouvert tous les jours sauf le mardi - Du 1er octobre au 31 mai, de 9h30 à 18h -
Du 1er juin au 30 septembre, de 10h à 18h30 - Fermé les mardis, ainsi que les 1er janvier, 1er mai et 8 mai, 14 juillet, 1er et 11 novembre, 25 décembre



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.