Expo : Trilogie des vestiges - Mathieu Dufois - Galerie Miyu - Jusqu'au 11 février 2023


L’exposition « Trilogie des vestiges » éclaire le processus de création initié par Mathieu Dufois dans le cadre de trois films réalisés entre 2012 et 2017, « La conservation de l’éclat », « Par les ondes », « Sauf la lumière ». Maquettes, figurines, éléments graphiques invitent à poser un regard alternatif sur les arts et techniques de l’animation. L’événement éclaire l’envers du décor, les secrets de fabrication. Mathieu Dufois révèle les coulisses d'un cycle, triptyque poétique et nostalgique. Son travail plastique de cinéaste d’animation s’inscrit à la croisée des pratiques mêlant sculpture, peinture, installation, vidéo. Il associe documents d’archives et création personnelle afin de recréer des territoires fictifs, assemblages originaux d’univers visuels contrastés. La familiarité des images emprunte à la mémoire des évènements passés et souligne un sentiment troublant d’étrangeté. Les séquences cinématographiques interrogent un passé mystérieux dans une combinaison animée de dessins, photographies, photogrammes réinterprétés. Mathieu Dufois prélève le réel à un niveau élémentaire pour tisser une trame sur laquelle il projette des figures oniriques, illusions fantasmagoriques. Il détourne ses propres souvenirs subjectifs et réinterprète l’inconscient collectif pour mieux explorer les liens entre animation et arts plastiques.










Mathieu Dufois conçoit des espaces poétisés à partir d’éléments développés à petite échelle, photographies transposées en dessins à la pierre noire. Au moment de filmer, l’agrandissement révèle des motifs passés inaperçus, des formes inattendues. Le travail de la lumière brouille les frontières, floute les contours dans un effet de clair-obscur saisissant. Dans ces films muets, mis en musique par Marc Hurtado avec lequel Mathieu Dufois collabore depuis 2010, les atmosphères surpassent le récit même. Leur esthétique, iconographie transversale, emprunte à la mémoire vive des lieux hantés, et aux imaginaires collectifs couplés à l’invention de l’artiste. 

Les clins d’œil appuyés aux films noirs des années 1950, aux séries B horrifiques, affirment une théâtralisation pas exempte de nostalgie. Ils traduisent une fascination pour le beau bizarre, l’inquiétude de l’étrange familiarité, sentiment latent de la disparition prochaine. Les figurines de carton caractérisées par la finesse des détails, silhouettes anonymes empruntées aux figurants de ces oeuvres, viennent hanter les courts-métrages de Mathieu Dufois. Ces réminiscences sensibles à peine déterminées, à peine reconnues, font remonter à la surface les souvenirs et les émotions associées. Les films détournent sous un angle inattendu des éléments préexistants porteurs de sens. 











Mathieu Dufois donne à voir la temporalité des espaces, les trois stades d’évolution : prospérité, altération puis ruine. La ville, milieu artificiel voué à une inéluctable déréliction, se dégrade dans ses formes qui paraissent pourtant figées. Au lent mouvement de délitement, processus naturel d’érosion s’ajoute la soudaineté de l’accident, le temps des catastrophes. Les dessins de ruines évoquent puissamment l’engloutissement des paysages urbains forgés par la main de l’Homme, et par translation la finitude de notre civilisation. Le décalage se fait archéologie du futur, exploration de la mémoire des lieux. Mathieu Dufois ausculte la surface marquée par le passage du temps, les présences disparues matérialisées par les traces qu’elles ont laissées, telles ces marques de ballons sur les murs de la place des Vosges, imprimées par les jeux des enfants dans les années 1980. Il questionne l’absence et le souvenir de ces fantômes, le vertige léger qui saisit à cette évocation.

Trilogie des vestiges - Mathieu Dufois
Jusqu’au 11 février 2023

Galerie Miyu
101 rue du Temple - Paris 3
Horaires : Du mardi au samedi de 11h à 19h
Tél : 09 84 55 01 45




Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.