Ailleurs : Musée du Verre François Décorchemont, nouvelle institution dédiée aux arts verriers - Conches-en-Ouche

 

Héritier du musée du Verre, de la Pierre et du Livre, le nouveau Musée du Verre François Décorchemont de Conches-en-Ouche célèbre les multiples facettes des arts verriers du XIXème siècle à nos jours. Son parcours muséographique accorde une importance toute particulière aux grands maîtres de la pâte de verre. Il souligne la complémentarité des recherches plastiques menées conjointement par les manufactures et les artistes-artisans depuis trois siècles. Les collections illustrent l'évolution par glissement de la fonction utilitaire des artéfacts vers une acceptation purement esthétique. Le fonds se compose de cinq-cents œuvres, pièces d’arts décoratifs, vitraux, sculptures, parmi lesquels deux-cent-cinquante sont exposées par roulement, ainsi que deux-cents œuvres graphiques, maquettes et cartons de vitraux et une bibliothèque de deux-mille-cinq-cents ouvrages. Le nouveau Musée du Verre s’inscrit dans une identité locale incarnée par la famille Décorchemont, native de Conches-en-Ouche, lignée de maîtres-verriers d’envergure internationale. Le patriarche, François Décorchemont (1880-1971), enfant du pays, maître de la pâte de verre, a redonné ses lettres de noblesse à cette ancienne technique éclipsée jusqu’au XIXème siècle par celle du verre soufflé. Ses petits-fils Antoine Leperlier et Etienne Leperlier, puis son arrière-petite-fille Juliette Leperlier ont perpétué l’héritage de leur aïeul en explorant la liberté plastique, l’expressivité de ce matériau singulier. 

En juin 2022, le Musée du Verre François Décorchemont a ouvert ses portes au public dans l'ancien hospice de Conches, bâtiment du XIXème siècle reconverti après deux ans d’un important chantier, initié et financé par la ville avec le soutien de l’Etat et la région Normandie. Distingué par le label « Musée de France », l’établissement dirigé par Eric Louet a pour objectif de diversifier son offre culturelle grâce à la tenue d’expositions temporaires, le développement de visites commentées, la mise en place de démonstrations, d’activités pédagogiques et d’ateliers variés ainsi que la création de spectacles vivants. Le Musée du Verre François Décorchemont ambitionne de renouveler le pouvoir d’attractivité du territoire grâce au tourisme.










La création du nouveau Musée du Verre François Décorchemont procède d’une politique culturelle municipale initiée par les maires successifs, Paul Guilbaud puis Alfred Recours et enfin le maire actuel Jérôme Pasco, soutenue par l’intervention de Christian Gobert, adjoint au maire en charge de la culture. L’établissement initial, conçu pour conserver les rares vitraux en pâte de verre du maître-verrier François Décorchemont, réalisés entre 1932 et 1970, connaît des débuts modestes. Le Musée du verre, de la pierre et du livre ouvre en 1996. Aux collections de vitraux s’ajoutent les anciennes collections municipales et le fonds dédié à la verrerie d’art composé alors de seulement quinze œuvres, d’un ensemble d’œuvres graphiques relatives aux vitraux de la Reconstruction et quelques oeuvres des peintres et maîtres-verriers Gabriel Loire (1904-1996), Henri Guérin (1929-2009). A partir de 2001, le petit musée organise des expositions temporaires destinées à commenter les différentes techniques verrières, soufflage, moulage, thermoformage, taille, gravure. En 2010, le vitrail contemporain devient une thématique récurrente laquelle est associée à une politique d’acquisition. Elle s’étend aux expositions monographiques d’artistes vivants dont les pièces viennent enrichir les collections autour de la sculpture de verre contemporaine. 

Le nouveau Musée du Verre François Décorchemont avait besoin de plus d’espace et d’envergure. Il a fait escale au sein de l’ancien hospice de la ville de Conches-en-Ouche, un bâtiment du XIXème siècle adapté aux fonctions muséales par l’agence d’architecture parisienne Dubois & Associés. La société italienne Harmoge a imaginé une muséographie toute d’atmosphère et d’effets d’ambiance. Les bâtiments reconvertis se structurent autour de huit salles thématiques et chronologiques dédiées aux collections permanentes, réparties sur six-cents mètres carrés. La scénographie fait la part belle au travail de la pâte de verre. Elle propose une approche éclairante du matériau et met en lumière la liberté technique induite par la pâte de verre. Le parcours se complète d’un espace d’exposition temporaire, vaste de cent-cinquante mètres carrés, ainsi que six-cents mètres carrés de réserves. La réhabilitation de l’ancienne chapelle de l’hospice valorise les vitraux réalisés au XIXème siècle sur des cartons de François Décorchemont par l’atelier Duhamel-Marette. 

Le parcours débute avec la salle Art Nouveau, de la fin du XIXème au début du XXème. Elle donne à penser l’évolution des techniques modernes, la chimie des couleurs développée dans le cadre de l’industrie, les manufactures Daum, Legras, Loëtz, Palme-Köning, et le travail artisanal d’Emile Gallé, Ernest Léveillé. La pâte de verre redécouverte ouvre de nouvelles libertés plastiques propices à l’expressivité Art Nouveau. Le style exploité dans les ateliers de Paris, Nancy et en Bohême mêle les formes naturelles, faune et flore, orientalisme et japonisme. La salle Art déco de l’entre-deux-guerres déploie un éventail fascinant de verres émaillés, objets et sculptures en pâte de verre. Elle rend hommage aux petites productions en série des manufactures de Daum, Lalique, Schneider, Muller mises en perspectives avec les pièces uniques des artistes-artisans, Maurice Marinot, François Décorchemont, Michel-Aristide Colotte. 











La salle consacrée à la Manufacture Schneider a été conçue grâce au don en 2018 de cent-trente artefacts, présentés en alternance, issus des collections du peintre et graveur Barlach Heuer (1930-2019) passionné par la production de cette verrerie. A partir de 1913, les frères Charles et Ernest Schneider fonde leur atelier d’objets d’art en verre qui prend essor au lendemain de la guerre dès 1918. Ils produisent vases, coupes, lampes, vitraux édifices civiles, objets d’art selon deux lignes distinctes Schneider et Le Verre français caractérisées par la même utilisation de couleurs vives et contrastées. Le succès en Europe est certain mais c’est aux Etats-Unis que la manufacture connaît son apogée. La fin des exportations massives avec la crise de 1929 sonne le glas de la manufacture qui cesse son activité en 1939.

La quatrième salle réunit les œuvres signées François Décorchemont (1880-1971). Maître de la pâte de verre, natif de Conches où il vit et travaille, consacre toute sa carrière à l’exploration ce matériau. Il adapte au verre le procédé de la fonte à cire perdue. En quête de transparence et de lumière, il imagine une nouvelle composition chimique de pâte vitrifiée. A partir de 1929, il développe une technique originale de vitraux sertis de ciment. Au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, François Décorchemont se consacre à la création de verrières figuratives destinées aux églises de l’Eure telles que le vitrail Saint Paul pour la chapelle de l’hospice de Conches. 

La salle dédiée au vitrail du XXème siècle réunit des pièces majeures notamment des œuvres d’Henri Guérin issus du fonds d’atelier en 2010, des vitraux en dalle de verre de la Seconde Reconstruction signé Gabriel Loire, issus du fonds d’atelier en 2014 et de vitraux de l’Entre-deux-guerres créés par Hébert-Stevens, Rinuy, Bony issus de l’atelier parisien des peintres-verriers en 2017.











La salle 6 intitulée « De la manufacture à l’atelier » s’attache à la production verrière en France après la Seconde Guerre Mondiale et l’apogée les grandes cristalleries françaises Daum, Lalique, Thuret, Navarre. Le Renouveau du verre français s’incarne dans la recherche empirique décors d’émaux, d’oxyde, travail de la matière à chaud, menée dans les petits ateliers indépendants du Sud de la France (1956-1976). Lieux de formation et de création dans la lignée du Studio Glass Movement, les artistes y explorent les possibilités de la pâte de verre, notamment les Conchois Antoine et Etienne Leperlier. Les techniques du verre soufflé, du verre bullé imaginé à la verrerie de Biot en 1956 par Eloi Monod, tracent des voies plastiques alternatives.

Les salles 7 et 8 consacrent la sculpture de verre contemporaine dans sa diversité de nouvelle discipline ouverte sur tous les champs des possibles. Le Musée du Verre François Décorchemont réunit l’une des plus importantes collections françaises de sculptures de verre : abstraction géométrique, symbolisme, minimalisme, œuvres de Yan Zoritchak, Mateï Négreanu, Vladimir Zbynovsky. Les techniques du soufflage du verre par Claude Monod ou Jean-Pierre Umbdenstock côtoient les expérimentations de la pâte de verre d’Etienne Leperlier, Antoine Leperlier et Raymond Martinez et de la céramique de Bernard Dejonghe et Edmée Delsol. 

Musée du Verre François Décorchemont 
25 Rue Paul Guilbaud - 27190 Conches-en-Ouche 
Tél : 02 32 30 90 41
Horaires : Ouvert de mars à novembre - Du mercredi au dimanche de 14h à 18h



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.