Expo : L'arc et le sabre, imaginaire guerrier du Japon - Musée National des Arts Asiatiques Guimet - Jusqu'au 29 août 2022

 

L’imaginaire du samouraï associé au Japon féodal dépasse très largement les frontières du pays. La permanence de la représentation, incarnation d’une certaine identité nationale, doit beaucoup à sa diffusion dans une culture populaire mondialisée. La fascination pour les récits peuplés de seigneurs de guerre redoutables a produit un foisonnement d’images, dans les arts et leurs expressions contemporaines, manga, cinéma, bande-dessinée, jeux vidéo. L’exposition « L’arc et le sabre - Imaginaire guerrier du Japon » qui se tient au Musée national des arts asiatiques Guimet jusqu’au 29 août, recontextualise la figure du combattant dans un cadre historique et un environnement culturel. L’ensemble d’objets d’art, photographies, estampes, éléments d’armure, casques, sabres, livres, recueils variés éclairent les facettes multiples. L’événement aborde les différentes représentations en interrogeant la persistance de la légende dans le Japon moderne et en Occident, le mythe et la réalité, le fantasme et la parodie. 











La figure du guerrier tient une place importante dans la culture japonaise. Dès la fin du IXème siècle, des clans armés se constituent autour des seigneurs de province assujettis à l’empereur. Dans ces territoires éloignés du pouvoir central, ces groupes guerriers, matériellement dépendant aux seigneurs, sont régis par un code social et moral. Fruits d’un monde hiérarchisé, ils entretiennent à travers un système de classe, du simple soldat aux daimyos et shoguns, des liens de loyauté, de fidélité. Les bushis, les sous-officiers, et les buke, les officiers supérieurs, membres de la noblesse, buke dont les samouraïs sont une catégorie particulière, obéissent au code buke-shô-hatto. Celui-ci devient code bushido, la voie du guerrier, avec le développement d’une dimension morale. Les combattants animés par des idéaux se soumettent à la stricte observance de ses préceptes.

A partir des XIVème et XVème siècles, tandis que les guerres féodales font rage, récits et traités militaires valorisent la voie de l’arc et du cheval, ou la voie de l’arc et des flèches, des styles de combat reflet d’un entraînement particulier. La tradition guerrière s’inscrit dans un ensemble de règles et de coutumes. Les combattants se conforment à des préceptes, idéal de conduite, art de la guerre : l’endurance stoïque, le respect du danger et de la mort, le culte de la patrie et de l’empereur, une culture artistique et littéraire ainsi qu’une morale sociale qui organise les relations entre parents, enfants, fratrie, époux, amis, maîtres et serviteurs. Le code vestimentaire, notamment le port de deux sabres, marque l’appartenance des guerriers.

 L’ordre guerrier empreint de culture aristocratique invite ses terribles combattants à la pratique des arts et des lettres, calligraphie, littérature, poésie, théâre, ikebana art floral traditionnel, philosophie. Le mode de vie du samouraï, inspiré par les préceptes religieux du bouddhisme et du taoïsme, trouve un sens à la fragilité de l’existence, à la violence, à la mort donnée et reçue. Dans le monde médiéval, le surnaturel revêt une grande importance. Spectres, fantômes, âmes errantes des guerriers défunts apparaissent comme des motifs récurrents du théâtre nô.

Au musée Guimet, l’exposition déployée autour de la figure du guerrier et plus particulièrement le légendaire samouraï s’attache à mettre en lumière les variations autour de ces icônes de la culture populaire nationale. L’histoire des quarante-sept rônins, l’une des légendes les plus célèbres, est illustrée par un ensemble d’estampes remarquables. Les rônins, samouraïs sans maître doivent leur statut à leurs propres fautes, telle que la défaîte au combat, ou bien à la mort de leur seigneur. Tout d’abord objets de réprobation, leur nombre augmente après la période Sengoku (1467-1568). Leur image évolue. Les rônins, réputés combattre pour leurs idéaux, sont associés aux preux chevaliers.  











Après plusieurs siècles de guerres incessantes, l’ère Edo (1600-1868) marque la restauration de la paix. La pacification des seigneurs de guerre ouvre une période de stabilité politique mais également d’isolement. Le Japon se ferme au reste du monde. Les samouraïs renoncent à leur vocation guerrière effective mais conservent néanmoins leurs attributs militaires. L’entraînement au combat perdure. L’enseignement du maniement des armes prend une dimension alternative, sacerdoce inédit pas exempte d’une certaine revendication esthétique. L’usage exige d’entretenir une armure, un casque, objets de parade. Les trésors des guerriers qui ne combattent plus deviennent des symboles culturels lors des cérémonies officielles.

Les représentations théâtralisées des guerriers mettent en scène les vertus du samouraï. La codification précise du costume permet d’identifier les personnages. Au cours de l’ère Edo, le kabuki, plus libre, plus expressif que le théâtre nô, se développe. Ce théâtre populaire embrasse les formes de la comédie, la parodie, la satire et le rire. Les comédiens acquièrent une grande notoriété. 

A l’aube de l’ère Meiji (1868-1912), l’empereur reprend l’ascendant sur le Shogun. Dans le sillage de la littérature classique, la mythologie du samouraï grandit alors que l’ordre guerrier disparaît lentement. Désormais la nostalgie de ces figures combattantes se trouve relayée par la culture populaire mondialisée et des productions d’une grande variété.

L’arc et le sabre - Imaginaire guerrier du Japon
Jusqu’au 29 août 2022

6 place d’Iéna - Paris 16
Tél : 01 56 52 54 33
Horaires : Ouvert tous les jours sauf le mardi, de 10h à 18h



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.