Ailleurs : Eglise Saint Nicolas de Tolentin de Brou, édifice cultuel du Monastère royal - Bourg-en-Bresse

 


L’église Saint Nicolas de Tolentin de Brou, édifiée à partir de 1513, emprunte son esthétique marquée par une toiture de tuiles bourguignonnes polychromes, au style gothique flamboyant brabançon. Elément du Monastère royal de Brou, fondé par Marguerite de Habsbourg, archiduchesse d’Autriche (1480-1530), l’édifice serait l’oeuvre conjointe des architectes Louis Wamboglen, Philippe de Chartres et André Colomban, et Conrad Meit, chef sculpteur. L’église, longue de 68,57 mètres, suit un plan en croix latine. Elle a été pensée pour devenir un mausolée princier. En son chœur se trouvent trois tombeaux, ceux de Marguerite d’Autriche et son époux Philibert II de Savoie, ainsi que celui de Marguerite de Bourbon, mère de ce dernier. En 1996, une vaste campagne de réhabilitation a rendu son décor de losanges colorés à la toiture. Le toit originel avait été remplacé par une toiture à la Mansart au XVIIIème siècle.











L’histoire du Monastère royal de Brou débute à l’occasion un vœu émis en 1480 par Marguerite de Bourbon (1438-1483), belle-mère de Marguerite d’Autriche. Son époux, Philippe II de Savoie (1438-1497) est blessé lors d’une chasse. En remerciement de la guérison, elle souhaite que soit construit à Brou une église et un monastère bénédictins. Elle meurt en 1483 laissant sa promesse en suspens. Avec l’approbation du Saint Siège, sa belle-fille, Marguerite d'Autriche, veuve en 1504 de Philibert II, successeur de Philippe, manifeste le désir de mener à bien le projet. 

Marguerite de Habsbourg, fille de Maximilien d'Autriche (1459-1519), chef de la maison de Habsbourg, et de Marie de Bourgogne (1457-1482), la fille du dernier duc de Bourgogne de la lignée Valois Charles le Téméraire (1433-1477) fonde le Monastère de Brou en 1502. L’architecte Louis van Bodeghem (1470-1540) exécute dessins et plans. Le chantier débute en 1512 et s’achève en 1532. La construction de l’église dure de 1513 à 1536. Elle est finalement dédiée à Saint Nicolas de Tolentin plutôt qu’à Saint Benoît. A vingt-cinq ans, mariée trois fois, répudiée, veuve à deux reprises, Marguerite de Habsbourg, archiduchesse d’Autriche, successivement princesse de Bourgogne, fille de France, infante d'Espagne et duchesse de Savoie, a connu un riche destin. Tante du futur Charles Quint (1500-1558), elle élève l’enfant à Malines quand la mère, Jeanne de Castille (1479-1555) dite Jeanne la folle, reine de Castille et d’Aragon, veuve de Philippe le Beau (1478-1506), perd la raison au décès de son époux. 

Durant la minorité de son neveu, Marguerite d’Autriche assure la régence des Pays-Bas. Après l’intronisation de Charles V en 1516, elle en devient gouverneur général, avec le titre de « gouvernante ». Elle joue un rôle majeur dans la pacification des rivalités qui opposent Charles Quint, souverain le plus puissant d’Europe et François Ier (1494-1547), roi de France. Fait prisonnier à Pavie en 1525, après une année de captivité, ce dernier a laissé ses deux fils en otage. Charles Quint exige la restitution du duché de Bourgogne. La guerre a repris en 1526. Marguerite de Habsbourg négocie avec Louise de Savoie, mère de François Ier, sa belle-sœur, le traité de Cambrai. La « paix des Dames » signée en 1529 met fin à la septième guerre d'Italie (1526-1530) entre Charles Quint et François Ier. Marguerite d’Autriche suit la progression du chantier du Monastère de Brou depuis Malines où elle réside. Ses choix orientent l’esthétique général du bâtiment vers plus de modernité. 











En 2010, les façades richement ornées ont été restaurés. Celle de la nef divisée en trois registres séparés par des balustrades, est marquée au niveau supérieur par un pignon curviligne qui souligne la rosace et les trois baies triangulaires. Le médian s’orne d’une verrière et d’une statue de saint André. Le registre inférieur d’accès à la nef réserve son trumeau à saint Nicolas de Tolentin, patron de l’église tandis qu’au tympan Marguerite d’Autriche et son époux Philibert II de Savoie sont tournés vers un « Ecce homo ». 

L’église associe les styles. La nef épurée, pierre blonde, voûtes d’ogives et fenêtres dépourvues de vitraux, contraste par sa sobriété avec le foisonnement décoratif du chœur. L’absence de bancs souligne qu’il ne s’agissait pas d’une église paroissiale. Seuls les moines du monastère y priaient. Le jubé très ouvragé, véritable dentelle de pierre sépare le chœur du reste de l’édifice. Les archives signalent un premier projet de tombeaux avec des dessins préparatoires signés Jean Perréal. Mais en 1512 Marguerite d’Autriche confie la suite de l’exécution à de nouveaux artistes. Le peintre et dessinateur Jan Van Roome, dit Jean de Bruxelles, effectue d’importantes modifications sur les modèles des tombeaux qu’il fournit en 1516. Ils illustrent désormais la transition du Gothique flamboyant vers la Renaissance, soulignant le désir particulier de modernité exprimé par Marguerite pour son propre tombeau et celui de son époux. 

Chacun présente, deux gisants, double figuration, exécutés par Conrad Meit (1480-1551) et des ensembles de petites statuaires issues d’un atelier brabançon. Le tombeau de Philibert II de Savoie, au centre du chœur, en marbre blanc de carrare, est orné de putti curieusement potelés et de sibylles, silhouettes féminines. Au Sud, le tombeau de Marguerite de Bourbon conserve un décor gothique tardif. Le gisant est placé dans un enfeu, un caveau hors sol, sur une dalle de marbre noir, encadrés d’écussons et de putti. Au pied, se trouve une levrette symbole de fidélité. Sur le socle, les putti alternent avec des pleurants. Au Nord, le tombeau de Marguerite d’Autriche évoque un dais sculpté, un lit funéraire à deux gisants. Au niveau supérieur, elle est représentée à l’âge de son décès cinquante ans, tandis qu’au niveau inférieur, elle a retrouvé le physique juvénile idéalisé de la Résurrection. Un remarquable vitrail l’Assomption de la Vierge orne la chapelle de Marguerite d’Autriche.










Dans le chœur, les stalles de chêne sculpté comptent soixante-quatorze sièges. Elles sont l’oeuvre du menuisier bressan Pierre Berchod dit Terrasson qui a créé une abondance de motifs, scènes et personnages inspirés à droite de l’Ancien Testament, à gauche du Nouveau Testament.

Les vitraux du chœur réalisés par des maîtres verriers s’inspirent des épisodes bibliques liés à la Vierge. Ils ont été exécutés entre 1527 et 1529 par les peintres verriers Jean Brachon de Bourg-en-Bresse, Antoine Noisin de Lyon, Jean Orquois d’Ecosse d’après les cartons d’un peintre flamand. Sur les grandes verrières du chœur, les cinq baies de l’abside sont marquées aux armes des ancêtres des deux époux, Marguerite d’Autriche et Philibert II, soixante-quatre blasons associés. Les moulures du chœur sont ponctuées des initiales M et P, de marguerites, des cartouches « F.E.R.T » et de la devise de Marguerite d’Autriche «Fortune Infortune Fort Une». 

Le Retable des Sept Joies de la Vierge, haut de 5,50 mètres et long 3,25 mètre, marbre blanc et pierre noire, comporte sept niches où sont représentés l’Annonciation, la Visitation, la Nativité, l’Adoration des Mages, l’Apparition du Christ à la Vierge, la Pentecôte, l’Assomption. 

L’église Saint Nicolas de Tolentin du Brou relève du diocèse de Belley-Ars. Saint Pierre Chanel patron des missions d’Océanie y a été ordonné prêtre le 15 juillet 1827.

Eglise Saint Nicolas de Tolentin de Brou

63 boulevard de Brou - 01000 Bourg-en-Bresse
Tél : 04 74 22 83 83
Horaires : Du 1er octobre au 31 mars de 9h à 12h et 14h à 17h - Du 1er avril au 30 juin de 9h à 12h30 et de 14h à 18h - Du 1er juin au 30 septembre de 9h à 18h



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.