Théâtre : Le Montespan, d'après Jean Teulé - Adaptation de Salomé Villiers - Théâtre de la Huchette

 

En 1663, Louis-Henri de Montespan épouse Françoise de Rochechouart de Mortemart par amour. L’union est heureuse mais le jeune couple peine à maintenir un train de vie digne de leur rang. Hobereau désargenté, le marquis s’engage auprès de l’armée royale dans l’espoir d’être remarqué par Louis XIV. Dans le même temps, son épouse est introduite à la cour de Versailles. Remarquée pour sa beauté et son esprit, elle accède au rang de dame d’honneur de la reine. Le Roi-Soleil tombe sous son charme. La marquise devient favorite royale et cédant à la mode antique, elle se fait appeler Athénaïs. Alors que les courtisans félicitent le Montespan pour cette bonne fortune et les opportunités, les privilèges que la situation lui ouvre, le mari bafoué se rebelle. Il s’estime déshonoré. Il manifeste une indignation pleine de panache et ne manque pas une occasion de provoquer le scandale. Son carrosse repeint en noir est coiffé de ramures de cerf. Il organise une cérémonie pour les obsèques de son amour. Indifférent aux menaces, à l’emprisonnement, il brave l’autorité monarchique. Le Montespan n’a qu’une obsession retrouver sa femme, la libérer des griffes de l’homme le plus puissant de France.





Adaptation scénique du roman historique de Jean Teulé publié en 2008, « Le Montespan » s’attache à retracer le triste destin du plus célèbre cocu de France. Salomé Villiers a souhaité préserver sur les planches la verve originelle de l’écrivain, la saveur particulière des dialogues, les bons mots et le sens du burlesque, sans bouder une certaine paillardise. La pièce embrasse le rythme enlevé du récit haletant, épopée flamboyante aux rebondissements nombreux. La révolte du Montespan, son combat aussi solitaire que téméraire, se révèle très vite sans espoir. Pourtant exalté insoumis, amoureux transis, anti-héros bravache, il refuse de s’incliner devant son royal rival. 

Sens du détail cocasse et de la vérité historique, la pièce croque un tableau piquant de la cour de Versailles, aristocrates hypocrites, avide de faveurs, de reconnaissance, hommes sans chevalerie ni honneur. Le mari bafoué de la marquise de Montespan, figure majeure du XVIIème siècle, son influence culturelle et politique incarne le modèle du cocu magnifique. Il provoque le scandale et n’accepte ni la situation ni les honneurs, argent et prestige. En révolte contre l’autorité royale, le Montespan déclenche l’hilarité de ses contemporains. Il fait rire à ses dépens, et multiplie effronteries, provocations. Les manifestations véhémentes de son courroux, autant d’impertinences et de stratagèmes pour dire sa disgrâce, contestent la légitimité monarchique. Attitude des plus excentriques à l’époque. 



Le spectacle drôle, émouvant, évoque quarante-quatre années, vingt-six personnages et vingt-et-un lieux. Une ambition rendue possible grâce à la mise en scène astucieuse. Etienne Launay, assisté de Laura Christol, s’est s’inspiré de la tradition des tréteaux. Le décor alterne les jeux de toiles légères suspendues, de lumière, d’ombres chinoises, marque les évolutions par l’apparition d’accessoires inédits, la disparition d’un lustre, l’avancée d’un carrosse.

Les nombreux protagonistes de cette fable sont incarnés par un remarquable trio de comédiens. A la fois acteurs et conteurs, ils mettent au service du récit les différentes facettes de leur talent glissant d’un rôle à l’autre avec souplesse et fluidité le temps d’un changement de perruque ou de costume. Simon Larvaron dans le rôle-titre, flamboyant, émouvant, désespéré, livre un combat perdu d’avance avec une belle présence scénique. Salomé Villiers très convaincante, d’une grande justesse, lui donne la réplique avec intelligence. Comédien caméléon, Michaël Hirsch, endosse les rôles brillamment, fait le grand écart du serviteur au Roi-Soleil, du jeune souverain espagnol au lieutenant de police La Reynie. Un superbe moment de théâtre !

Le Montespan, d’après Jean Teulé
Adaptation Salomé Villiers
Avec Salomé Villiers, Michaël Hirsch et Simon Larvaron
Mise en scène Etienne Launay, assisté de Laura Christol
Mercredi, jeudi, vendredi à 21h00 - Samedi 16h et 21h00

Théâtre de la Huchette
23 rue de la Huchette - Paris 5
Tél réservations : + 33 (0)1 43 26 38 99
theatre-huchette.com
Page Facebook
Fil Twitter
Galerie Instagram



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.