Paris : Enseigne Au Vieux Chêne au 69 rue Mouffetard, destin malheureux du petit patrimoine - Vème


L’enseigne Au Vieux Chêne datant XIXème siècle, placée au premier étage du 69 rue Mouffetard, a disparu en 2008. Désormais remplacée par une copie grossière, rudimentaire, celle en bois finement sculptée demeure introuvable. Elle aurait été détruite lors d’une manœuvre maladroite d’un camion de livraison ou bien aurait été malmenée puis troquée à l’occasion d’un ravalement radical. L’original sur la photographie d’Eugène Atget datant de 1911 laisse voir l’élégance des lignes gravées, raffinement du dessin des branches, des feuilles, des glands. La reproduction en mauvaise résine ne rend pas compte des détails délicats.





La maison du XVIIIème siècle, située au 69 rue Mouffetard, entre l’ancienne caserne Monge de la Garde républicaine et la rue Neuve Saint Médard, se déploie sur quatre étages carrés sur rez-de-chaussée, à double étage de mansardes. Etablie sur la parcelle libérée par la destruction de l’hôtel de Mainville qui datait du XVème siècle, elle demeure propriété sous l'Ancien Régime du couvent voisin, la communauté des sœurs hospitalières de la Miséricorde de Jésus. 

De 1830 à 1848, son destin se politise. Elle abrite un important club révolutionnaire du quartier Latin impliqué dans la révolution de 1848. Eugène Vidocq (1775-1857), le célèbre forçat évadé du bagne devenu chef de la Brigade de Sûreté, y aurait eu de précieux indicateurs infiltrés.


1900 Maison à l'enseigne "Au Vieux Chêne"

1908 Gravure de Jean Jules Dufour

1911 Photographie d'Eugène Atget


A la fin du XIXe siècle, l’enseigne du marchand de vin voisin qui représente un chêne pédonculé donne son nom au bal du Vieux Chêne à la réputation sulfureuse. Fréquenté par une population faubourienne, association explosive des voyous adolescents et des chiffonniers du quartier, prostituées mineures et rabatteurs, le lieu interlope défraie la chronique dès 1864.

En 1863, le patron du bal est tué par l’un de ses clients qui lui décoche un coup de pied fatal dans la tête. L’établissement poursuit ses activités jusqu’en 1882. Au début du XXème siècle, il devient un cabaret sur la scène duquel se produit dans les années 1920, Fréhel (1891-1951), chanteuse réaliste sur le retour. Sa vie sentimentale désastreuse, l'alcool et la drogue, l’ont mené à un long déclin mais elle parvient à surmonter ses démons. Elle revient vers son public, radicalement transformée par les excès, à partir de 1925. Le Vieux Chêne, restaurant, salle de concert jazz, est aujourd'hui un pub irlandais ouvert à l'occasion aux performances live de groupes confidentiels.

Enseigne Au Vieux Chêne
69 rue Mouffetard - Paris 5



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


Bibliographie
Le guide du promeneur 5è arrondissement - Bertrand Dreyfuss - Parigramme
Connaissance du vieux Paris - Jacques Hillairet - Editions Rivages 
Rue des Maléfices - Jacques Yonnet - Editions Phébus Libretto 

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