« The Welcoming Hands » de Louise Bourgeois (1911- 2010), se compose d’un ensemble de six bronzes patinés au nitrate d’argent. Des mains entrelacées, marquées par l’existence, se retiennent, s’enlacent, se réconfortent. Les divers éléments placés sur des socles de granit de taille et de forme variées convoquent l’intime et l’universel. Modelées d’après les mains de l’artiste à l’exception d’une minuscule menotte d’enfant, ces formes accueillantes invitent à la caresse protectrice, dans des gestes bienveillants de tendresse, d’ouverture au monde. La vie des êtres se lit dans leurs mains, abîmées ou pas par le travail, par l’âge jusqu’à l’innocence potelée des mains d’enfants. L’oeuvre entre en dialogue avec l’expérience commune du réel vivant, mouvant. A travers « The Welcoming Hands » Louise Bourgeois, artiste française naturalisée américaine, évoque un sujet émouvant, à consonance autobiographique, l’expérience de l’émigration aux Etats-Unis. Elle a quitté la France en 1938 pour épouser l’historien d’art américain Robert Goldwater (1907-1973). Dépôt du Fonds national d’art contemporain, l’ensemble a été installé sur la terrasse du Jeu de Paume en 2000 à l’occasion de l’implantation aux Tuileries d’un important corpus contemporain. Désormais, les chefs-d’œuvre du XXème siècle entament un dialogue puissant avec l’histoire des lieux et de l’art.
Cet ensemble est le fruit d’une commande initiée par une institution publique, l’administration du Battery Park au sud de Manhattan New York. L’oeuvre « The Welcoming Hands » est placée sur les bords de l’Hudson river en face d’Ellis Island, île qui abrita de 1892 à 1954, les services d’immigration, lieu de transit obligatoire des candidats au rêve américain, un centre devenu aujourd’hui un musée. Louise Bourgeois a composé les six modules afin d’évoquer l’histoire des lieux.
Peu de temps après l’inauguration, l’artiste et l’administration de Battery Park City entrent en conflit. L’ouverture d’un musée de l’Holocauste sur le site où est exposé l’ensemble signé Louise Bourgeois recontextualise de façon troublante les fragments anatomiques, désormais sujets à réinterprétation. L’ensemble des six modules « The Welcoming Hands » est déplacé, que Louise Bourgeoise soit consultée, dans un périmètre isolé du parc. Par l’entremise de son assistant Jerry Gorovoy, l’artiste fait savoir qu’elle trouve la démarche insultante, contraire au droit moral. Une véritable bataille juridique s’engage. L’institution publique ayant acquis l’oeuvre pour un montant de 350 000 dollars, s’estime propriétaire de celle-ci et libre de la déplacer à sa convenance. Louise Bourgeois fait valoir son droit moral, le déplacement allant à l’encontre de l’intention première, du propos.
A la suite de cet imbroglio, l’oeuvre « The Welcoming Hands » est acquise par l’Etat français. Les six éléments intégrés au jardin des Tuileries en 2000. Louis Bourgeois attachée à la ville de sa jeunesse, de sa formation, retrouve dans ce déménagement forcé vers un lieu plus accueillant une connexion avec le sujet même de l’oeuvre, la fragilité des liens, la vulnérabilité et la confiance prudente.
The Welcoming Hands - Louise BourgeoisJardins des Tuileries - Paris 1
Ministère de la Culture
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