Cinéma VOD : La Femme à la fenêtre, de Joe Wright - Disponible sur Netflix

 

Anna Fox, pédopsychiatre lutte contre une dépression qui prend la forme d’une agoraphobie sévère. Ces troubles l’ont séparée de son mari et de sa fille qui vivent désormais ailleurs. Elle ne sort jamais de son grand appartement newyorkais, paralysée par l’angoisse. Son existence morose est rythmée par les appels inquiets de son ex et les livraisons de courses. Les rares visites qu’elle tolère, son psy, ou le type qu’elle a engagé comme concierge, troublent à peine sa routine. Cloitrée chez elle, elle consomme sans modération vin et neuroleptiques. Elle passe ses nuits à regarder des vieux polars hollywoodiens en noir et blanc. Hors d’un monde qu’elle observe par la fenêtre, elle regarde vivre ses voisins. Juste en face, un couple avec un adolescent qui viennent d’emménager attirent l’attention d’Anna remarque. Elle remarque une certaine tension, une violence latente entre les membres de cette famille. Le garçon de seize ans vient inopinément lui rendre visite. Il semble perturbé. Puis la mère, Jane, s’invite à l’improviste. Elles passent ensemble une soirée agréable. Le lendemain, Anna est persuadée d’assister au meurtre sanglant de Jane. Est-ce la réalité ou est-elle victime d’hallucinations liées à ses excès ? Ceux à qui elle se confie considère qu’elle est en pleine crise psychotique. 






« La Femme à la fenêtre » devait sortir en salle en mai 2020. La pandémie l’a dévié de sa route. Produit par la Fox racheté par Disney à la suite de projection test négatives ayant engendré de tourner à nouveau des segments entiers, le film a été finalement cédé à Netflix pour une sortie en VOD et streaming. Adaptation du roman à succès signé A.J. Finn, ce thriller en huis clos paranoïaque revendique une filiation évidente avec les oeuvres d’Alfred Hitchcock, « Fenêtre sur cour » dont quelques images apparaissent au début ou encore « La Maison du docteur Edwardes ». Le réalisateur Joe Wright, « Les Heures Sombres », « Reviens-moi », propose une relecture des thèmes favoris du maître jusqu’au pastiche. Il ponctue le long-métrage de clins d’œil cinéphiles, autant de références amusantes à retrouver entre deux outrances baroques et une esthétique violemment bigarrée. 

Portrait de femme égarée, oscillant entre hallucination et réalité, le cinéaste rend compte à l’image de ces frontières floues. L’histoire est tournée du point de vue d’Anna, recluse volontaire. Hantée par une blessure originelle peu à peu révélée, ses abus variés d’alcool et de médicaments engendre une grande confusion. Sa santé mentale est constamment remise en question par son entourage. Dans le refoulement d’un lourd secret, elle erre à travers son vaste appartement, hagarde. Elle refuse de prendre part au monde ou de se lancer dans une introspection pour surmonter ce trauma. Flash-backs et crises de panique vont imposer la vérité. Amy Adams à peine reconnaissable endosse l’un de ces rôles où les actrices sublimes acceptent de s’enlaidir comme une forme de performance. Elle incarne avec beaucoup d’efficacité la détresse émotionnelle et les souffrances du personnage.



Malgré une distribution cinq étoiles, à Amy Adams se joignent Julianne Moore, Gary Oldman, Jennifer Jason Leigh, le film est étouffé par la grandiloquence narrative, un bouillonnement qui ne prend pas. Même le déchaînement des angoisses d’Anna laisse froid et manque ses effets anxiogènes. L’intrigue cousue de fil blanc assez faible dans un registre déjà-vu relègue le cinéaste à la position du faiseur pas très inspiré. L’ennui guette et les personnages ne parvienne ni à devenir attachants ni même inquiétants. 

Les révélations successives et diverses fausses pistes entretiennent artificiellement la tension, le doute. La résolution de l’enquête va à la facilité et la conclusion expédiée s’autorise une embardée hasardeuse dans le gore assez dérangeante. Décevant.

La Femme à la fenêtre, de Joe Wright
Avec Amy Adams, Julianne Moore, Gary Oldman, Jennifer Jason Leigh, Anthony Mackie, Wyatt Russell, Brian Tyree Henry, Fred Hechinger
Sortie sur Netflix le 14 mai 2021



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.