Art : Les Gardiens du Noun, une oeuvre signée Hervé Di Rosa à Saint-Ouen


« Les Gardiens du Noun », groupe de quatre colonnes-têtes signé Hervé Di Rosa, illustrent les diverses influences qui baignent l’oeuvre de l’artiste sétois. Nomade de cœur, il parcourt le monde depuis plus de vingt-cinq ans à la rencontre des hommes porteurs de cultures et de savoir-faire. Inaugurés le 26 mai 2009 à Saint-Ouen, les totems de bronze et de laiton célèbrent l’art traditionnel des forgerons camerounais auxquels Hervé Di Rosa a confié leur réalisation. Plaine fertile au cœur du pays bamoum, le Noun, département de l’Ouest du Cameroun, emprunte son nom à la rivière qui le traverse, un affluent du Mbam. Les artisans du feu de la région, réputés pour leur habilité, ont acquis une notoriété qui dépasse les frontières. « Les Gardiens du Noun », colonnes hautes de trois mètres, se composent chacune de six globes de métal. Ces orbes sont agrémentés ponctuellement d’intrigants éléments anatomiques, ici un œil, là deux oreilles, ou bien un nez, nez qui ressemblent à s’y méprendre à autre chose, mais également d’accessoires tel ce chapeau haut-de-forme. La fantaisie d’Hervé Di Rosa s’exprime dans le foisonnement des formes.











Hervé Di Rosa, le héraut des arts modestes, a été, dès le début des années 1980, l’un des artisans majeurs du mouvement de la Figuration Libre avec ses complices Richard Di Rosa, François Boisrond, Rémi Blanchard et Robert Combas. Inspiré par les esthétiques alternatives des milieux underground, il pose un regard différent sur la pratique artistique. Son propos s’incarne dans l’abolition des frontières entre art savant et culture populaire. Il détourne le vocabulaire formel des objets familiers, celui de la bande-dessiné, de la publicité, des médias de masse, pour révéler la poésie du quotidien. Son style figuratif très expressif, coloré et ludique, graphique et accessible, laisse libre-cours aux imaginaires collectifs, lieux de la prolifération des signes. Collectionneur compulsif, archiviste de l’époque, il accumule les expressions plastiques de la pop culture. A Sète, sa ville natale, il a fondé le Musée des Arts Modestes (le MIAM). 

Hervé Di Rosa propose de regarder autrement ce qui nous entoure. La diversité de ses œuvres puise ses racines dans un goût immodéré des voyages. L’artiste nourrit son travail des échanges, des rencontres. Les imaginaires du monde l’inspirent. Ses œuvres embrassent une idée puissante du métissage des cultures. Il arpente la planète depuis plus de vingt-cinq ans. Il a posé ses valises à Patrimonio en Corse, Sofia en Bulgarie, Séville en Espagne, Lisbonne au Portugal, Tunis en Tunisie, Tel-Aviv en Israël, Addis-Abeba en Éthiopie, Durban en Afrique du Sud, La Réunion et Maurice, La Havane à Cuba, Miami Beach et Little Haïti aux Etats-Unis, Binh Duong au Viêtnam… A la rencontre des artisans et de leur savoir-faire, il a échangé avec les sculpteurs sur bois de Kumasi au Ghana, les tisserands de Porto Novo au Bénin, les forgerons de Foumban au Cameroun, les modeleurs de glaise qui inventent des arbres de vie en terre cuite à Mexico au Mexique.









En mai 2008, Hervé Di Rosa séjourne à Foumban dans la région du Grassland au Cameroun réputée pour ses forgerons. Il confie maquettes de laiton et dessins aux fondeurs locaux afin qu’ils donnent vie à ses œuvres et transposer en volumes les riches décors de ses colonnes-têtes imaginés sur papier. Les boules de métal de cinquante centimètres de diamètre sont modelées et coulées séparément selon la technique de la cire perdue.  Ensuite, soudée entre elles, elles sont montées en totems. 

L’installation des « Gardiens du Noun » dans l’espace public de Saint-Ouen intervient dans le cadre du programme « L’Art dans la ville ». Le projet souhaite inscrire l’art dans le quotidien des riverains. Le travail des artistes contemporains disséminé à travers le territoire urbain redonne un sens sa géographie sensible. La commune de Saint-Ouen s’envisage tel un musée à ciel ouvert, accessible à tous dans le prolongement d’une nouvelle politique de redynamisation de la ville. Les œuvres descendent dans la rue et viennent à la rencontre d’un public parfois peu habitué aux musées et aux galeries. « L’Art dans la ville » a été développé entre la municipalité et les différents intervenants du renouveau, promoteurs et sociétés en charge des aménagements. 

« Les Gardiens du Noun » ont vu le jour dans le cadre des dispositions applicables en matière de mécénat grâce notamment à la SAS de la rue Dora Maar. La société Anagraphis, éditeur d’art, concepteur de projets culturels, qui collabore de longue date avec Hervé Di Rosa, a pris en charge la réalisation de l’oeuvre et son installation, installation supervisée par Jean Seisser, complice et associé de l’artiste, auteur de nombreux ouvrages d’art et photographe.

Les Gardiens du Noun, une oeuvre signée Hervé Di Rosa
Angle de la rue Rosa Parks et du boulevard Victor Hugo - Saint-Ouen 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.