Paris : Dans le bonheur, une oeuvre de Diadji Diop - XIIème



« Dans le bonheur », oeuvre monumentale du plasticien Diadji Diop, crawle dans les plates-bandes du Palais de la Porte Dorée depuis novembre 2010. Le nageur écarlate surgit de la végétation comme de l’écume. Son corps de géant en résine époxy partiellement dérobé au regard, laisse place à l’imagination jusque dans la monumentalité de ses proportions. Yeux clos, sourire paisible, son visage serein reflète une intériorité heureuse. Le mouvement est fluide. Le rouge, signature chromatique de Diadji Diop, celle du sang, celle qui unit tous les êtres humains, suggère un monde idéalisé, la grande communauté humaine, sans discrimination, la fantaisie d’une utopie, l’ouverture des frontières. L’oeuvre originale créée à l’occasion des Journées du Patrimoine a été présentée dans les jardins de l’Elysée en 2010 parmi les réalisations d’un groupe de jeunes artistes. Le Musée National de l’Histoire et des Cultures de l’Immigration en a fait l’acquisition à la suite de cette exposition. Diadji Diop laisse volontairement libre l’interprétation de ses créations ouverte. Malgré l’expression bienheureuse et le titre de l’oeuvre qui suggère le plaisir de la nage sans entrave, une lecture plus politique en prise avec l’actualité, convoque l’image des clandestins naufragés.









Diadji Diop est né à Dakar en 1973 dans une famille bourgeoise qui considère avec suspicion sa passion précoce pour le dessin. Un temps, afin de rassurer ses parents, il manifeste le désir de devenir architecte. Mais au décès de son père, les arts plastiques et plus particulièrement le dessin animé l’attirent. 

En 1994, il quitte le Sénégal pour Paris afin de poursuivre une formation en animation. Il prépare en même temps le concours de l’Ecole de l’image des Gobelins et celui des Beaux-Arts. A l’occasion des cours dispensés dans cette prépa, il découvre le modelage et la sculpture d’après modèle vivant. Diadji Diop connaît alors une révélation. Les notions de volume, les formes exprimées en trois dimensions lui ouvrent des voies inédites. Au lieu de construire des espaces, il choisit de construire des corps. En 1995, il intègre les Beaux-Arts où il développe dès les bases de sa démarche artistique. 

Diadji Diop sculpte des personnages en polystyrène qu’il enduit d’une résine époxy, teintée dans la masse utilisée d’habitude sur les coques de hors-bords. La peau de plastique recouvre des corps immobilisés dans leur mouvement mais portés par un élan intérieur, traduction d’une quête de fluidité.  







Sa sensibilité proche des Surréalistes le pousse vers l’absurde, la poésie. Il interpelle le spectateur en associant formes réalistes et lignes oniriques, purs fruits de l’imagination. La monumentalité des personnages souligne un travail sur les échelles qui s'inscrit dans une démarche d'intégration aux espaces. La générosité des proportions entre en écho avec les dimensions des architectures urbaines. Le rouge qu’il adopte permet de regarder au-delà de l’origine ethnique. La couleur confère une universalité à ces figures humaines, permet à chacun de s’identifier et de s’ouvrir aux singularités de tous. C’est aussi le rouge ludique des jouets d’enfants. Ou encore le rouge de la colère. Diadji Diop saisit les manifestations de sentiments contrastés et donne à expérimenter les contradictions de la nature humaine. Il explore la question de l’identité, l’exil, la violence, les conflits tout en développant une réflexion sur la nature des liens qui unissent les hommes, leurs ambiguïtés, leurs contradictions, vision de la société et du monde tel qu’il va.

Dans le bonheur, une oeuvre de Diadji Diop
Palais de la Porte Dorée
293 avenue Daumesnil - Paris 12



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.