Artiste populaire au style reconnaissable entre tous, peintre et sculpteur d’êtres aux rondeurs voluptueuses, humains comme animaux, Fernando Botero a embrassé la forme classique de la figuration à l’heure des abstractions conceptuelles. Durant des décennies, les critiques acerbes ont dénigré son travail. Les pontes de l’art contemporain lui ont reproché la trop grande accessibilité de son oeuvre. Mais le soutien du public ne lui a jamais fait défaut. Don Millar, réalisateur et scénariste canadien, consacre un documentaire poétique à un artiste généreux, portrait nuancé d’un homme discret et engagé, à la gouaille réjouissante, à l’humour irrésistible.
Accès privilégié à l’univers créatif d’un artiste, le documentaire réalisé par Don Millar éclaire sous un angle nouveau une oeuvre nourrie par un imaginaire personnel unique. Les entretiens avec Botero lui-même, ses enfants, ses collaborateurs, ses proches, ses admirateurs mais aussi ses détracteurs s’ouvrent sur des aspects méconnus de la vie de l’artiste. La forme classique des étapes chronologiques permet de mieux définir l’évolution d’une expression plastique marquée par les arts populaires d’Amérique latine, l’art précolombien et les muralistes mexicains.
Le film qui retrace la carrière, les étapes majeures vers la reconnaissance, met en lumière la force de caractère d’un personnage affable et résolu. Malgré les épreuves, les deuils, les traumas, Botero a su faire mentir le déterminisme social. Né en 1932 à Medellin, région plus connue pour ses cartels que pour sa scène artistique, Fernando Botero perd son père prématurément. Il n’a que quatre ans, ses deux frères à peine plus, et sa mère, modeste couturière, peine à subvenir aux besoins de la famille. Fernando dessine, autodidacte. A seize ans, ses œuvres sont publiées dans le supplément dominical d'El Colombiano, journal important de Medellin.
Renvoyé du lycée, il part à Bogota pour suivre des cours dignes de sa vocation. Lorsqu’il vend ses premières toiles, l’argent récolté lui permet de traverser l’Atlantique. Au début des années 1950, le jeune Botero fait un voyage en Europe déterminant. Barcelone, Madrid, Paris, l’Italie particulièrement Florence, il découvre les maîtres anciens, la Renaissance, le Quattrocento. En s’installant à New York, Botero accède à la reconnaissance. Son tableau « Mona Lisa à douze ans », la rondeur, les couleurs qui posent les bases d’un style définitif, s’annonce comme une étape essentielle de son parcours artistique. Le décès tragique de son fils dans un accident de la route en Espagne, accident dans lequel Botero est lui-même grièvement blessé, marque un tournant. Afin de tenter de surmonter ce deuil terrible, il réalise de nombreuses œuvres en mémoire de son enfant disparu, pastels surdimensionnés qui comptent parmi ses tableaux les plus iconiques.
Artiste engagé, sensible, Botero est habité par des préoccupations sociales et politiques. Il ne cesse d’évoquer la situation de son pays, la Colombie, ravagé par la guerre civile et la violence des cartels. Durant la guerre en Irak, il s’insurge contre les mauvais traitements subis par les prisonniers de la prison d'Abou Ghraib et réalise une série qui créé la polémique. Citoyen humaniste, Botero témoigne du monde tel qu’il va. Chronique poétique d’une vie inspirante, le documentaire rend un bel hommage à ce démiurge prolifique, personnage émouvant et fascinant.
Botero, un documentaire de Don Millar
Sortie le 29 janvier 2020
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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