L’oeuvre de Baltasar Lobo (1910-1993), sculpteur espagnol de la Nouvelle Ecole de Paris, célèbre le corps de la femme. Dans la lignée d’Henry Moore et de Jan Arp ou encore de Constantin Brancusi, il dépasse la frontière entre abstraction et figuration, donnant à l’harmonie des courbes et des rythmes une géométrie épurée. Simplification progressive, les détails s’effacent au profit de la ligne, de la forme essentielle dans toute sa plénitude. Marqué par les arts grecs archaïques ainsi que par l’art africain ou encore océanien, Lobo travaille sur le thème classique du nu féminin, symbole de fécondité, tout en réinterprétant les influences de l’art brut. La sculpture Mère et enfant, dont l’original date de 1947, est représentative de ce style personnel puisant son inspiration dans l’idée de femme éternelle. Cette œuvre offre une vision radieuse et universelle, idéalisée, de l’amour maternel. Dans l’arrondi des formes suggérant le mouvement, joie de vivre et sensualité du corps se mêlent dans un dynamisme heureux.
Baltasar Lobo naît en 1910 à Cerecinos de Campos près Zamora en Castille où a été établi un musée à son nom. Grand-père tailleur de pierre et père menuisier, sa lignée le destine à l’artisanat. En 1922, il a 12 ans et entre comme apprenti dans l’atelier de Ramon Nùnez à Valladolid où il réalise des sculptures en bois de saints destinés aux processions religieuses. Lorsqu’il reçoit une bourse en 1927, il s’inscrit à l’Ecole des Beaux-Arts de Madrid mais l’enseignement académique ne lui convient. Il n’y reste que trois mois. Baltasar Lobo travaille alors à l’entretien de la statuaire dans un cimetière avec son père. Il poursuit tout de même sa formation avec les cours du soir de l’Ecole des Arts et Métiers où il découvre la taille directe du bois et du marbre. Il croise alors le chemin des œuvres de Pablo Picasso, Salvador Dali, Joan Miro, Pablo Gargallo.
Lorsque la guerre civile espagnole éclate en 1936, il s’engage auprès des Républicains. Son père est tué par un obus et l’armée de Catalogne défaite, en 1939, il fuit le franquisme et rejoint la France en compagnie de sa femme. A Paris, il fait ses débuts dans la rue et dort gare Saint-Lazare. Il demande de l’aide à Pablo Picasso qui après avoir vu ses dessins lui trouve un atelier. Lobo s’installe à Montparnasse où l’Ecole de Paris fait bruire le monde de l’art. L’émulation créative va profondément faire évoluer son œuvre. Il fait alors la connaissance du sculpteur cubiste, Henri Laurens, qui lui offre de travailler le marbre dans son atelier où il aborde la grande thématique du corps féminin. De 1945 à 1946, à la Ciotat, il réalise de nombreux croquis et dessins sur le thème du nu dont il s’inspirera pour réaliser les séries Maternité et Baigneuse déclinées jusqu’en 1954. De 1950 à 1960, il expose à la galerie Villand et Galanis. En 1960, le Musée d’art moderne de Madrid organise une rétrospective. De nombreuses commandes publiques, en France, au Venezuela, soulignent la reconnaissance de l’artiste. En 1984, il est nommé Officier des Arts et des Lettres en France puis reçoit, la même année, le Prix national des Arts Plastiques en Espagne.
L’œuvre Mère et Enfant a été produite en plusieurs exemplaires. L’un d’eux orne la fontaine de la Plaza Zorilla à Zamora. Madrid, Luxembourg et Zurich possède également leur modèle. En France, cette maternité se retrouve dans le Jardin André Malraux à Saint-Germain-en-Laye et celle qui nous intéresse aujourd’hui à l’angle des rues du Faubourg-Saint-Honoré et Berryer à Paris. Acquise dans les années 80 par la Mairie du VIIIème, cette statue de bronze a été coulée par la fonderie Susse, fondeur d’art depuis 1839, ayant obtenu le label Entreprise Patrimoine Vivant. En février 2010, la sculpture est arrachée à son socle, victime d’une tentative de vol. Récupérée par les services de la Ville, patine altérée, elle se refait une beauté avant de retrouver sa place fin 2010. La vie des œuvres d’art public est loin d’être un long fleuve tranquille.
Mère et enfant - Sculpture de Baltasar Lobo
Angle des rues de Berryer et du Faubourg Saint-Honoré - Paris 8
Bibliographie
La mère parfaite - Article de Caroline Legrand - Gazette Drouot n°13
Paris 8è mensuel d’informations locales - Juin 2010
La sculpture moderne en France - Ionel Jianou, Gérard Xuriguera, Aube Lardera - Paris, Arted Éditions d'Art, 1982
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