Paris : L'avenue Foch, promenade piétonne, le fascinant projet d'urbanisme - XVIème

© Hamonic + Masson Luxgon - Les images officielles du projet avenue Foch piétonne


Présenté à la presse fin janvier dernier, un surprenant projet prospectif, libre de toute commande de la part de la Ville, une étude devenue aujourd’hui possible, a fait couler beaucoup d’encre relançant la polémique entre les candidats à la Mairie de Paris autour du futur urbanisme. Cette proposition ambitieuse suggère de rendre entièrement piétonne la prestigieuse avenue Foch créée en 1854, longue de 1,3 km et 140 mètres de large, grande comme 12 terrains de football. L’objectif de cet étonnant programme de restructuration, réaliser la plus grande promenade urbaine de France, une promenade bordée de commerces prolongeant les Champs Elysées à l’est et débouchant sur un parc boisé à l’ouest. Nouveau quartier de vie, l’activité de l’avenue Foch serait alors en mesure de dynamiser une partie des quartiers de l’est parisien en devenant un pôle d’attractivité synonyme de modernité et de rayonnement international.


L'avenue Foch aujourd’hui
L'avenue Foch aujourd'hui - Google Map
© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne


Marc Rozenblat, directeur générale de la société privée Construction et Développements Urbains (CDU) spécialisée dans le montage et le pilotage de projets immobiliers complexes projet d’urbanisme est celui par qui ce fantasme d’urbaniste follement moderne est arrivé. Il a lancé l’idée et invité les architectes Jean-Christophe Masson et Gaëlle Hamonic avec Eric de Broche des Combes de l’agence de visualisation architecturale Luxigon à prendre part à une réflexion autour d’une métamorphose complète de l’avenue qui relie la place de l’Etoile à la porte Dauphine. Un travail de deux ans et un diagnostic des possibilités.

Coup médiatique ou amorce d’un vrai programme d’urbanisme, le projet n’en demeure pas moins un intelligent coup de butoir dans les préjugés, visant une audacieuse reconquête d’un espace déserté, sans activité humaine, ni moyen de transport public, une autoroute en pleine ville qui pourtant ne draine qu’un trafic limité de 1 500 véhicules par heure (3 600 pour l’avenue de la Grande Armée voisine en comparaison.) 


© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne
© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne
© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne
© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne
© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne

Concrètement, le projet prévoit un élargissement des contre-allées de l’avenue Foch afin d’accueillir la circulation automobile et de repousser les voitures en marge tout en rendant les quatre voies de cette triste autoroute urbaine à la population et à la vie de la Cité.

Dans la partie est, il est question d’une densification des infrastructures rendue possible par la singulière largeur de l’avenue - deux fois plus large que l’avenue de la Grande Armée par exemple, la création d’une promenade bordée d’un grand magasin, un hôtel de luxe, des bureaux, des habitations dans la continuité des Champs Elysées. Cet espace public exceptionnel représentant entre 120.000 à 150.000 m2 répond aux préoccupations du XXIème siècle de logements et de mixité sociale. Dans les images de projection, ce qui frappe également, c’est l’émergence d’une architecture contemporaine, une nouvelle typologie d’habitat parisien en prise directe avec les réflexions en matière d’écologie urbaine.

Dans la partie ouest, l’étude envisage la création d’un véritable parc boisé en pleine terre de 67 000 m2, comme une incursion du bois de Boulogne au cœur de la ville - en comparaison le parc Monceau mesure 82 000 m2. Les terrains seule propriété de la Ville, possèdent fait rare à Paris des sous-sols vierges de pollution, tuyaux, câbles, métro, idéaux à la fois pour la construction et le reboisement. Enfin à l’extrémité ouest du côté de la porte Dauphine, une zone de connexion et d’interface piétonne comprenant bibliothèque, restaurants, salles de conférences, espaces de co-working.


© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne
© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne
© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne
© Hamonic + Masson Luxgon - Projet avenue Foch piétonne


Cette intrigante entreprise, suscite l’étonnement, attise la contestation des riverains et associations du XVIème arrondissement, force la chicane entre les candidats à la Mairie de Paris. Toute la zone est classée, l’artère ainsi que le bois de Boulogne sont inscrits aux monuments historiques depuis 1953, ce qui n’a pas empêché la construction du parking Foch en 1968, ni du périphérique achevé en 1973. Anne Hidalgo, première adjointe au maire de Paris en charge de l’urbanisme et candidate à la Mairie, mise en contact avec les porteurs de l’étude par le député PS Jean-Marie Le Guen s’est prononcée en faveur du projet notamment intéressée par le pan logement de celui-ci. Alors que Nathalie Kosciusko-Moriset s’y oppose farouchement, reprochant à son adversaire de vouloir « déclasser l’existant plutôt que de relever les défis urbains en travaillant les espaces délaissés. »

Un projet qui n’en est qu’à l’état d’idée et ne verra probablement jamais le jour d’ailleurs - personnellement je préférerais, les images côté Arc de Triomphe me font furieusement songer au carnage de la place de la République - mais un projet qui soulève des interrogations intéressantes sur la géographie à venir de la Ville Lumière. La préservation du patrimoine, la modernisation impérative de la Cité, la mixité sociale, la nécessité de trouver des logements pour tous, les mesures écologiques dans l’urbanisation. Une étude fascinante et un peu folle certainement.