Ailleurs : Galerie François Ier du Château de Fontainebleau, fleuron de la Renaissance française

 

La galerie François Ier du château de Fontainebleau, manifeste de la Renaissance française, devient l'un des lieux les réputés de son époque grâce aux gravures la représentant diffusées dans toute l'Europe. Son commanditaire, le roi François Ier (1494-1547) en fait un outil d'affirmation politique et de rayonnement intellectuel. La galerie d'apparat édifiée entre 1528 et 1530, longue de 64 mètres, large de 6 mètres, fait lien entre le château de la cour ovale et l'église conventuelles de l'ordre Trinitaires, établi en 1259 par saint Louis.

Le programme décoratif conçu entre 1532 et 1539, se caractérise par l'association innovante du décor italien Renaissance et de la tradition française des lambris et plafonds à caissons. Il marque l'émergence d'un style français, la Première école de Fontainebleau, l'invention d'un nouveau vocabulaire plastique. Cette esthétique inédite se diffuse, à travers l'Europe, par le biais des gravures et touche progressivement tous les métiers d'arts, mobilier, orfèvrerie, céramique, émaux.

Fresques, stucs en haut-relief et lambris sculptés se déploient sur sept travées de part et d'autre de la galerie. Francesco Sibec de Carpi, ébéniste italien arrivé en France en 1530 réalise les lambris sculptés de putti, de fruits et cartouches. Des motifs de cuirs enroulés, caractéristiques de l'esthétique de la Première école de Fontainebleau, scandent les caissons de stuc. Ils encadrent les peintures à fresque du florentin Giovanni Battista di Jacopo dit Rosso Fiorentino (1494-1540), allégories mythologiques dont l'esthétique audacieuse s'inspire de Michel-Ange et en particulier la chapelle Sixtine. 









La galerie François Ier occupe une fonction symbolique. Son opulence, manifestée par le foisonnement du programme décoratif ainsi que sa modernité, légitime le pouvoir royal, réaffirmation du corps du souverain. Son iconographie - la salamandre, la devise et le chiffre royal omniprésents - célèbre François Ier. Cet éloge d'un roi affaibli par une défaite et une humiliante captivité cherche à redorer son blason dans les esprits et pour les générations à venir.

Au cours de la sixième guerre d'Italie, François Ier est fait prisonnier par les alliés de Charles Quint lors du désastre de la bataille de Pavie en 1525. Il est maintenu captif en Espagne jusqu'à la signature du traité de Madrid en 1526. De retour en France, François Ier renonce aux résidences royales de la Loire pour privilégier le château de Fontainebleau qu'il fait métamorphoser selon le goût Renaissance venu d'Italie. 

Un corps de bâtiment relie le logis du donjon Saint Louis où se trouve la chambre du roi et la chapelle de la Trinité, ancienne église conventuelle des Trinitaires reconstruite à cette occasion. Ce véritable pont couvert est traversé par une galerie, accès direct aux appartements royaux, qui demeure privée. Le souverain en conserve la clé et réserve les visites aux hôtes de marque. Lors du déplacement de la chambre royale à la fin du XVIème siècle, elle devient espace public accessible. 








Les stucs, technique connue depuis l'Antiquité et réintroduite par les artisans italiens, sont réalisés de mars 1535 à mai 1537. Rosso Fiorentino s'attèle aux peintures à fresque à partir de 1536. Démonstration de virtuosité, elles représentent les différentes facettes du pouvoir monarchique, dangers et bienfaits. Le maître florentin applique idées nouvelles et savoir-faire technique encore inconnu en France. Le maniérisme, mouvement qui nait à cet instant, expression d'un style personnel, se détache de la représentation classique pour embrasser un point de vue plus subjectif. Rosso Fiorentino achève les peintures avant la visite, à l'occasion de Noël 1539, de l'éternel rival de François Ier, l'empereur Charles Quint. L'ébéniste Francesco Sibec de Carpi, collaborateur des artistes de la Première École de Fontainebleau, sculpte les boiseries à partir de 1535. Il emploie tout d'abord des essences rares avant de se rabattre sur le noyer dès 1539, année durant laquelle il réalise les parquets et les lambris. 

La réinvention du château de Fontainebleau et plus généralement le soutien des arts et des lettres font rayonner la cour de François Ier au-delà des frontières du pays. Giorgio Vasari (1511-1574), peintre, architecte et homme de lettres toscan qualifie Fontainebleau de "nouvelle Rome". Épicentre de la création européenne, la cour attire les artistes les plus prestigieux qui créés animés par une formidable émulation. L'influence se répercute jusqu'au XIXème siècle. Les deux écoles de Fontainebleau vont profondément marquer Jean-Auguste-Dominique Ingres (1780-1867), Eugène Delacroix (1798-1863) ou encore John Haynes Williams (1836-1908). 








La galerie François Ier a fait l'objet de modifications au gré des époques et des souverains. À l'occasion du percement d'une porte en 1689, une peinture de Rosso disparait. Sous Louis XIII, François Besson est chargé de remodeler les stucs détériorés. En 1701, sous Louis XIV, de nouvelles compositions peintes remplacent certaines scènes de Rosso jugées indécentes du fait leur étalage de chairs. Au XVIIIème siècle, la galerie montre des signes de délabrement qui soulèvent des inquiétudes. Jean-Baptiste Van Loo (1684-1745) collabore avec Jean Siméon Chardin (1699-1779) à la restauration des peintures en 1730-1731. L'architecte Ange-Jacques Gabriel (1667-1742) opère, en 1757, des remaniements sur les extrémités de la galerie François Ier. Jean-Simon Berthélémy (1743-1811), peintre d'histoire, décorateur des appartements de Marie-Antoinette intervient sur les fresques. En 1786, l'édification de nouveaux appartements occulte les fenêtres sur tout un côté de la galerie. Des portes-fenêtres en trompe-l'oeil les remplacent afin de préserver la symétrie. 

En 1805, le château de Fontainebleau devenu résidence impériale, et la galerie François Ier, se dotent d'un nouveau décor ponctué des chiffres et emblèmes de Napoléon Ier. Il disparait entièrement sous la Restauration (1814-1830). En 1846, un chantier d'envergure est lancé afin de redonner son lustre à la galerie François Ier. À cette occasion, le sculpteur Jean-Baptiste-Jules Klagmann (1810-1867) exécute une frise en carton-pâte. Louis-Charles-Auguste Couder (1789-1873), peintre d’histoire, élève de Jean-Baptiste Regnault et de Jacques Louis David, intervient sur les peintures. La cheminée est supprimée, un nouveau parquet mis en place. 

Sous Napoléon III, entre 1852 et 1861, Jean Alaux (1786-1864) restaure les fresques de Rosso Fiorentino. Le repeint cireux à l'encaustique, l'actualisation esthétique des scènes et figures humaines font dire à ces détracteurs qu'Alaux travestit le style de Rosso. 

Galerie François Ier
Château de Fontainebleau 
Place du Général de Gaulle - 77920 Fontainebleau 
Tél : +33 1 60 71 50 70
Horaires : Mercredi au lundi de 9h30 à 17h - Fermé le mardi 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.