Catherine Salviat nous avertit d'emblée : "Méfiez-vous de vos rêves, ils se réalisent". Entrée à la Comédie française en tant que pensionnaire en 1969, sociétaire puis sociétaire honoraire depuis 2006, elle nous raconte seule en scène sa riche et longue carrière. Entre anecdotes et témoignage, confidences et mémoire vive, elle évoque avec une douce nostalgie l'itinéraire heureux d'une passeuse, l'amour des mots, la passion pour son art. La comédienne nous invite à ses côtés sur les planches et en coulisses. D'une belle voix timbrée, ses souvenirs prennent la forme d'un spectacle rare, "36 chandelles dans la Maison de Molière" dans une mise en scène complice de Serge Sarkissian, rencontré grâce au comédie Michael Lonsdale. Créé en 2019 à Marseille, d'après le livre éponyme publié aux éditions Onésime, le seul en scène se joue pour quelques dates à ne manquer sous aucun prétexte, au Studio-Théâtre de la Comédie Française, à l'invitation d'Eric Ruf. Sur le plateau un buste du maître des lieux, un fauteuil, quelques accessoires. Epure et belle évidence. Catherine Salviat, lumineuse, dit une vie de passion et de théâtre, elle qui a mis son talent au service de la comédie comme de la tragédie, des rôles de jeunes premières à ceux de duègnes.
A l'âge de quatre ans, Catherine Salviat assiste à sa première pièce de théâtre à la Comédie française. Elle poursuit une scolarité au lycée Molière. Viennent les années de formation, la naissance d'une vocation à laquelle elle se consacre corps et âme. Au Conservatoire, elle rencontre Fernand Ledoux, professeur inoubliable. En 1969, à l'occasion du concours d'entrée à la Comédie française en 1969, elle éblouit le jury dans une scène de "L'Épreuve" de Marivaux. Pièce importante, qu'elle jouera par la suite avec sa soeur Christine Murillo, dans la salle Richelieu dans une mise en scène de Jean-Louis Thamin.
Pensionnaire, Catherine Salviat interprète le répertoire classique et le moderne. Elle cite Georges Bernanos : "Le hasard est la logique de Dieu". Elle rend hommage à ses dramaturges de prédilection, Bernanos donc et Racine, Musset, Marivaux, Hugo, Péguy. Elle convoque les bons mots des auteurs, se glisse le temps d'une réplique dans la peau de Guitry, Cocteau. Au Studio-Théâtre, elle raconte les soirées bousculées par la reprise un rôle à la dernière minute pour remplacer une camarade, la joie d'être en scène. Il y a les rencontres, les amitiés, les maîtres, les camarades, la complicité, Gisèle Casadesus, Geneviève Casile, Michel Duchaussoy, Pierre Dux, Robert Hirsch, Francis Huster, Jean-Paul Roussillon, François Seigner, Franco Zeffirelli, Guillaume Gallienne et les nouvelles générations Shahrok Moshkin Galam, Elsa Lepoivre, Léonie Simaga. La voix des disparus, Lucien Pascal, Daniel Znick résonne aussi.
Elle parle avec sentiment des metteurs en scène. Devenue sociétaire de la Comédie française grâce à son rôle dans "Le verre d'eau" d'Eugène Scribe dans une mise en scène de Raymond Bouleau, elle est distinguée par un Molière en 1988, à l'occasion de son interprétation de soeur Constance dans la pièce "Le dialogue des Carmélites" de Bernanos. Sous la direction de Giorgio Strehler, elle rejoint la distribution de la Trilogie de la Villégiature de Goldoni à l'Odéon. Elle participe à l'aventure initiée par Anatoli Vassiliev, "Le bal masqué", metteur en scène avec lequel les disputes sont épiques. Catherine Salviat parle avec émotion de son travail avec Valère Novarina pour l'"Espace furieux". Et puis en parallèle, elle raconte la musique, la danse, le cirque.
Dans l'intimité d'une grande comédienne et d'une maison historique, émotion et humour, générosité et sensibilité. Un merveilleux moment de partage.
Singulis / 36 chandelles dans la Maison de Molière
Jusqu'au 2 juillet 2023
Du mercredi au dimanche à 20h30
Texte et interprétation Catherine Salviat
Mise en scène Serge Sarkissian
Lumières Sylvie Maestro et Jérôme Pastini
Séquences filmées Thierry Hancisse, Sylvia Bergé, Guillaume Gallienne, Loïc Corbery et Bernard Alane, Nicole Calfan, Christine Murillo
Production Onésime 2000 / Comédie-Française
Spectacle créé au Théâtre Toursky, à Marseille, en novembre 2019
Studio-Théâtre de la Comédie-Française
Galerie du Carrousel du Louvre, place de la Pyramide inversée
99 rue de Rivoli – Paris 1
Location : 01 44 58 15 15 du mercredi au dimanche 14h-17h
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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