Ailleurs : Gare de Colmar, exemple de l'architecture éclectique Jugendstil, Art Nouveau allemand, témoignage patrimonial de l'histoire territoriale

 


L’histoire de la Gare de Colmar est intimement liée à celle de l’Alsace-Lorraine. Au lendemain de la défaite française qui signe la chute du Second Empire en 1870, la région est annexée en 1871 par l’Empire allemand à l’occasion de l’application du traité de Francfort. L’occupant prussien marque l’urbanisme des villes par des constructions au style très germanique. Ces repères de la domination impériale suscitent au mieux l’indifférence, au pire l’hostilité de la population locale. De nombreux bâtiments sont ainsi démolis lorsque l’Alsace-Lorraine redevient française en 1919. Edifices utilitaires ancrés dans le quotidien, les gares appartiennent à une branche du patrimoine architectural moins stigmatisée. Ainsi la Gare de Colmar, édifiée entre 1902 et 1907 par les autorités allemandes dans un style éclectique très Jugendstil, a été préservée et entretenue, remaniée à plusieurs reprises afin de satisfaire aux évolutions. Son inscription sur la liste supplémentaire des Monuments historiques par arrêté du 28 décembre 1984 entérine son intérêt patrimonial.










En 1871, la gare de Colmar originelle datant de 1842 se situe à une centaine de mètres de l’actuel bâtiment. Elle est gérée par l’administration allemande, Kaserliche General Direktion der Eisenbahnen in Elsass-Lothringen. A la fin du XIXème siècle, l’essor de la fréquentation rend nécessaire l’agrandissement des infrastructures. Les modifications successives se révèlent insuffisantes. Le 24 mars 1900, la ville de Colmar et Auguste Riegert, son maire de 1898 à 1905, valident le projet d’une nouvelle gare au sud de celle préexistante. Le chantier d’envergure est financé par L’Empire finance le chantier d’envergure à hauteur de 5 525 000 marks or et la municipalité, 150 000 marks. Les travaux sous-traités aux entreprises colmariennes débutent en 1902 et s’achèvent en 1907. Les architectes Dietrich et Stoeckicht reprennent les plans de la gare de Dantzig, (Gdansk), ville polonaise annexée par la Prusse de 1815 à 1919, qu’ils adaptent aux besoins de Colmar.

Erigé dans un style éclectique typique de la période, l’édifice long de cent-trois mètres s’articule autour de trois parties. La gare aux marchandises fait l’objet d’un traitement technique spécifique. L’exploitation débute en février 1904. La gare voyageurs dont l’esthétique composite évoque un certain folklore, est inaugurée le 1er mai 1907. Influence Art Nouveau allemand, le Jugendstil, inspiration néogothique, accents néo Renaissance, la Gare de Colmar revendique son aspect monumental. Les couleurs accentuent l’effet esthétique, briques roses à coins de pierre, grès gris de Phalsbourg et toit de zinc. Un beffroi, tour d’horloge haute de trente-six mètres, domine le bâtiment voyageurs. Des fenêtres à meneaux percent la façade scandée par de vastes baies vitrées. Au centre de l’édifice, le large hall s’ouvre sur les ailes occupées par des restaurants, quatre salles d’attente une pour chaque classe, un fumoir, un grand buffet. 

Au lendemain de la Première Guerre Mondiale quand l’Alsace-Lorraine redevient française, sculptures et bas-reliefs de la façade sont modifiés. L’aigle impérial est remplacé par le blason de la ville de Colmar. L’inscription « Erbaut 1905-06 » devient locution latine « Anno Domini 1905-06 ». Les cariatides trop germaniques disparaissent. Les différentes sculptures représentant les employés des chemins de fer voient leurs uniformes allemands actualisés en complets français, képis rabotés et insignes transformés.











En 1919, la gare de Colmar est placée sous la direction de l’Administration des chemins de fer de l’Alsace. Le 1er janvier 1938, les grandes compagnies ferroviaires françaises fusionnent pour devenir la SNCF. Lors de l’occupation allemande au cours de la Seconde Guerre Mondiale, la Deutsche Reichsbahn gère la gare du 1er juillet 1940 jusqu’à la Libération en 1944. Cette année-là, l’explosion d’un train de munitions souffle les célèbres vitraux des baies. Ils sont remplacés par des verres blancs, mesure temporaire qui perdure jusque dans les années 1990.

La Gare de Colmar est inscrite à l’inventaire des Monuments historiques par arrêté du 28 décembre 1984. A la suite de cette distinction, la SNCF lance en 1989 un projet de rénovation des bâtiments. La restauration inclut la création de nouvelles verrières cinquante ans après leur destruction. Le 29 avril 1991, les vitraux peints par Jean Le Gac sont dévoilés officiellement. Les baies, quarante-huit mètres carrés, technique du pare-brise feuilleté, reprennent un motif emprunté aux romans de gare, thématique explorée à l’époque par l’artiste. Un homme, le peintre, libère deux sœurs jumelles ligotées à côté des rails. 

Les remaniements modernisent les infrastructures lorsque se manifestent des besoins inédits. L’inauguration du nouveau parvis en 2004 est suivie quatre ans plus tard par l’aménagement d’une entrée côté ouest en 2008. Chaque année, plus de trois millions de voyageurs empruntent la Gare de Colmar.

Gare de Colmar
9 place de la gare 68000 Colmar
Horaires : Lundi - Mardi - Mercredi - Jeudi - Vendredi de 05h à 00h30 - Samedi de 05h30 à 00h30 - Dimanche de 06h30 à 00h30
Horaires jours fériés : Lundi - Mardi - Mercredi - Jeudi - Vendredi - Samedi - Dimanche de 06h30 à 00h30



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.