Paris : Ancien Café Biard de la rue Montorgueil, vestiges de l'une des premières chaînes de restauration parisiennes - IIème

 

Du Café Biard de la rue Montorgueil, il ne reste que la façade au décor de mosaïque, lettrage bleu sur fond ocre. L’enseigne disparue a laissé place depuis 2013 à un joli magasin de jouets et de jeux de société, le Joker de Paris, tenu par François Rodon Fores. Cette adresse incontournable pour les amateurs de jeux de société propose grand classiques et trouvailles insolites. Le lieu a longtemps abrité une annexe du Parti Socialiste, la section Centre. L'ancienne permanence du 2ème arrondissement accueillait militants du quartier, bénévoles et curieux. Le décor du vieux café préservé derrière le placage de bois bordeaux a réapparu avec le changement de vocation et le nouveau propriétaire. Cette devanture convoque le souvenir de l’ancêtre de nos actuelles chaînes de restauration parisiennes, les Cafés Biard très en vogue au début du XXème siècle. 






1900 Café Biard 7 avenue de Clichy

1900 Café Biard 141 rue Montmartre

1900 Café Biard rue Montmartre


En 1900, l’entreprise Café Biard compte une quinzaine d’établissements à Paris. La brasserie du 73 rue Montorgueil se niche à cette période au rez-de-chaussée d’un immeuble Louis XV de style rocaille, belle maison édifiée par le maître maçon Etienne Regnault, sur des plans de l’architecte Legrand L’Aîné entre 1743 et 1746. L’immeuble de rapport destiné dès l’origine à la location déploie une façade rococo sage, aux éléments ornementaux élégants : agrafes sculptées, éléments décoratifs aux clefs des baies, mascarons au premier étage, cartouches sculptés de coquilles Saint Jacques. 

L’épopée des Cafés Biard débute à la fin du XIXème siècle avec Louis Borel, belge d’origine, fabricant de chaussures, et son épouse Romaine née Claeys. Installés à Paris, le couple d’entrepreneurs investit dans la restauration et développe un réseau de brasseries à leur nom. Le fils, Louis junior (1883-1943) futur Grand Résistant, membre du réseau Alliance durant la Seconde Guerre Mondiale, fusillé par les Allemands, marque l’évolution de l’entreprise familiale par ses idées modernes. En 1900, à l’occasion de l’Exposition Universelle, il gère le restaurant du Pavillon de l’Andalousie. En 1913, il formule une requête auprès du ministère du Commerce et de l’Industrie pour monter une mission en Abyssinie, afin d’étudier les débouchés de l’exportation de café vers Djibouti. 

Au décès de Louis senior, Louis junior prend la direction de la chaîne des Cafés Biard. Cette enseigne franchisée très à la mode est notamment mentionnée dans le « Le Paysan de Paris » Louis Aragon, publié en 1926. L’établissement, proche de l’Hôtel de Ville, situé au 50 rue de Rivoli, apparaît dans une scène datée de 1941 dans le deuxième tome de l’oeuvre autobiographique de Simone de Beauvoir, « La force de l’âge » édité en 1960





1910 Café Biard rue d'Amsterdam

1910 Café Biard rue d'Hallévy

1910 Café Biard 108 rue Réaumur

1931 Café Biard dessin de Herbert Fiedler

1933 Ticket de loterie nationale 


Les Cafés Biard se concentrent vers le IIème arrondissement de Paris : 2 rue des Petits Pères, 32 rue Montmartre, 110 rue Montmartre, 141 rue Montmartre et 108 rue Réaumur. Une succursale est ouverte au 2 boulevard Saint Michel dans le Vème, rue d’Amsterdam dans le VIIIème et du côté de l’Opéra rue Hallévy ainsi qu’au 29 rue de la Chaussée d’Antin dans le IXème. 

Le café de la rue de Sèvres a été croqué en 1931 par l’artiste Herbert Fiedler (1891 - 1962). Celui du 7 avenue de Clichy à deux pas de la place, côtoyait le cabaret exotique, le Kursaal. Au carrefour de l’avenue du Maine dans le XIVème, aux numéros 79-81 de l’avenue du Général Leclerc, sur l’ancienne place d’Alésia, devenue place Victor et Hélène Basch, le Café Biard a été remplacé par une agence du Crédit Agricole. Dans les beaux quartiers, se trouvaient deux brasseries du groupe, 6 avenue des Ternes et 70 avenue de la Grande Armée dans le XVIIème arrondissement.

Ancien Café Biard 
73 rue Montorgueil / 1 Léopold Bellan - Paris 2



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 

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