Paris : Rue du Trésor, histoire de trésor médiéval et souvenirs de l'hôtel d'Effiat - IVème

 


La rue du Trésor, en réalité d’une impasse, débute au 26 rue Vieille du Temple. L’exquise enclave arborée fait les délices des amateurs de terrasses. Sa quiétude hors du temps semble à peine troublée les soirs d’été par l’enthousiasme de ces derniers. Plates-bandes fleuries, buissons foisonnants distillent de doux parfums champêtres. La faible hauteur du bâti et son élégante largeur de douze mètres laissent à la lumière naturelle le champ libre. Les boutiques du rez-de-chaussée en rajoutent dans la luxuriance des couleurs. Les cafés et restaurants animés, tables débordant sur les pavés, font de cette discrète venelle l’un des lieux des plus prisés du Marais. La rénovation méticuleuse de la rue du Trésor en 2004 lui a définitivement redonné un air pimpant.











La rue du Trésor ouverte en 1882 a été percée à travers des terrains de l’hôtel d’Effiat. En 1634, cette demeure est la propriété de Marie de Fourcy la veuve du maréchal d’Effiat. L’un de leur fils, le marquis de Cinq-Mars, favori du roi Louis XIII, prend part à une conspiration contre Richelieu. Condamné à mort, il meurt décapité le 12 septembre 1642, à l’âge de vingt-deux ans. Du XVIIème siècle au XIXème siècle, cette belle demeure connaît un destin contrasté. Abandonnée peu à peu par ses aristocratiques occupants, les vastes espaces sont divisés en de multiples appartements. L’hôtel particulier devient un immeuble d’habitation dont les modules meublés sont loués aux plus modestes. 

Au début de la IIIème République, la Société de l’Hôtel de Ville, une société de secours mutuel, ancêtres de nos mutuelles ou des fonds de pension, développe un projet immobilier de jonction entre la rue Vieille du Temples et la rue des Ecouffes. L’hôtel d’Effiat désormais vétuste est promis à la démolition. Le 6 juin 1882, le chantier est à peine interrompu par une découverte surprenante. Alors qu’ils s’attaquent aux fondations, les ouvriers mettent à jour un vase de cuivre rempli de pièces d’or du XIVème et du XVème siècles, francs à cheval du roi Jean II le Bon, francs à pied de Charles V, pour la somme de 7882 livres. Ce coquet butin est pourtant sans lien avec l’hôtel d’Effiat bâti au XVIIème siècle. Jusqu’à ce jour, son origine demeure énigmatique. 










L’ensemble du trésor est vendu aux enchères afin de financer les activités mutualistes de la Société de l’Hôtel de Ville. La voie percée relevant du domaine privé, l’heureuse trouvaille appartient au propriétaire du lotissement. La rue du Trésor ne sera rattachée à la voirie publique qu’en 1930. Le Musée Carnavalet se porte acquéreur du vase et de quelques exemplaires de pièces. Enthousiasmée par l’anecdote, la presse relaie abondamment l’évènement et la rue prend son actuelle dénomination en hommage au trésor.  

L’hôtel d’Effiat fait place à un lotissement d’immeubles de rapport, œuvres de Paul Casimir Fouquiau, architecte, mais également promoteur avisé dont le nom apparaît dans diverses opérations menées à partir de 1870. La rue du Trésor est fermée par une fontaine monumentale. Aujourd’hui hors d’eau, son imposant fronton a disparu. Hors service, ce décor de stuc et de briques monté à la création de la voie a suscité un grand émoi lorsqu’en 2011 un habitant de l’immeuble situé entre la rue des Ecouffes et la fontaine a jugé opportun de percer une fenêtre des plus artisanales. Une désinvolture payée de retour par une pétition outragée, des procès-verbaux, des sommations répétées de remettre l’ouvrage dans son état initial. La façade de la fontaine garde la trace de cette mésaventure.

Rue du Trésor - Paris 4



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


Bibliographie
Le Marais, évolution d’un paysage urbain - Danielle Chadych - Parigramme
Le guide du promeneur 4è arrondissement - Isabelle Brassart et Yvonne Cuvillier - Parigramme
Le Marais secret et insolite - Nicolas Jacquet - Parigramme
Paris secret et insolite - Rodolphe Trouilleux - Parigramme

Sites référents
Nomenclature de la Ville de Paris
Paris Révolutionnaire