Expo Ailleurs : Paul Valéry et les peintres - Musée Paul Valéry - Sète - Prolongation jusqu'au 14 mars 2021



Ecrivain, poète, philosophe, Paul Valéry (1871-1945) a entretenu tout au long de son existence un lien privilégié à la peinture, élément clé de son identité. Derrière l’image d’intellectuel austère, d’académicien cérébral, se dévoile la silhouette d’un observateur sensible, témoin éclairé de son temps. Les essais et recueils consacrés à l’art occupent une place à part dans l’oeuvre exigeante de Valéry. Son approche très personnelle du beau et de la création éclaire les fondements même de sa personnalité. A l’occasion des cinquante ans du musée Paul Valéry, cette relation particulière à l’art pictural fait l’objet d’une exposition d’envergure internationale. L’évènement articulé autour de cinq modules, cinq cercles, du plus intime au plus abstrait, explore les liens noués entre l’homme de lettres et les artistes. L’exposition « Paul Valéry et les peintres » rassemble quatre-vingt-dix œuvres exceptionnelles issues des collections du Musée d’Orsay, du Centre Pompidou, Musée Favre de Montpellier, musées des Beaux-Arts de Grenoble, Rouen, Pont-Aven, et de prêts privés prestigieux. 











Sur le fil d’une thématique inédite, l’exposition « Paul Valéry et les peintres » souligne le dialogue incessant entre l’écriture et la peinture. Au cours de son existence, le poète puise son inspiration dans la fréquentation assidue des peintres et développe un rapport essentiel aux arts plastiques. Fort d’une connaissance étendue de l’histoire de la peinture, Paul Valéry ne se considère pas pour autant comme critique d’art et cela malgré l’abondance de ses écrits sur le sujet. Décryptant les processus, il visite compulsivement salons et expositions, va sans cesse à la rencontre des peintres dans leurs ateliers. 

En 1895, il a vingt-quatre ans, Paul Valéry rédige une « Introduction à la méthode de Léonard de Vinci ». Par la suite, il produit des écrits spécifiques parfois spontanément, souvent à la suite de commandes, « Tante Berthe » (1926), « Pièces sur l'art » (1931), « Triomphe de Manet » (1932), « De Corot et du paysage » (1932), « Notion générale de l’art » (1935) ou encore « Degas, danse, dessin » (1936). Dans ses essais et recueils, véritable « passeur de culture » selon les mots de son biographe Michel Jarrety, il cherche à penser les arcanes de la création, tranche dans le vif et émet des avis, des jugements catégoriques. 

Les célèbres Cahiers, plus de 30 000 pages, réunissent ses réflexions, précisent ses idées esthétiques et mettent en lumière ce travail d’observateur de son temps. Il interroge sans cesse la pratique artistique, son propos, sa nature. Paul Valéry discerne un écho manifeste entre la peinture et l’écriture, le même processus d’expérimentation perpétuelle. Dans la poussée de cette quête obsessionnelle, il donne naissance à ses plus célèbres poèmes « La jeune Parque » 1917 et « Le Cimetière Marin » en 1920 avant d’être reçu à l’Académie en 1924. 











L’exposition qui se déroule au musée de Sète éclaire les affinités, ouvre les champs d’exploration. Par le biais des liens noués, de l’intime et des proximités, cet événement embrasse l’ensemble des grands mouvements artistiques de la IIIème République (1870-1940). Membre illustre d’une famille d’artistes tout aussi fameux, Paul Valéry est un témoin privilégié. En 1900, il épouse Jeanne Gobillard, sœur de Paule Gobillard et nièce de Berthe Morisot, elle-même belle-sœur d’Edouard Manet. Le couple habite dans le XVIème arrondissement de Paris, le même immeuble que leur cousine Julie Manet, immeuble construit au 40 rue de Villejust - notre actuelle rue Paul Valéry - à l’initiative des parents de Julie Manet, Berthe Morisot et son mari Eugène Manet. Et lorsque le cercle familial s’étend, de nouveaux artistes le rejoignent. Julie Manet épouse Ernest Rouart, peintre, fils d’Henri Rouart lui-même peintre et collectionneur. Puis le neveu d’Ernest, Paul Rouart, épouse Agathe Valéry, fille de Paul et Jeanne Valéry. 

La première section de l’exposition est dédiée à la production de cette famille. Les scènes de la vie quotidienne et les portraits rendent compte d’une intimité pas exempte d’émulation intellectuelle. La deuxième partie de l’événement s’élargit aux amis proches. Les peintres avec lesquels les liens se sont resserrés au fil du temps semblent participer d’une même sensibilité impressionniste. Jacques Emile Blanche peint le portrait de Valéry à plusieurs reprises. L’homme de lettre, proche de Degas qu’il admire, s’intéresse à la dimension charnelle de Renoir. Il est intrigué par les peintres de l’avant-garde qu’il fréquente en société notamment lors des « Mardis » de la rue de Rome, les rencontres littéraires arrangées par Stéphane Mallarmé, son mentor.











Entouré d’artistes, sensibilisé aux mouvements de son temps, Paul Valéry passe pourtant à côté des courants les plus modernes, le Fauvisme de Matisse et le Cubisme de Picasso. Face à ces nouveaux contemporains, il se navre d’une possible érosion de sa propre sensibilité malgré son ouverture à la création contemporaine. Le regard formé à une certaine esthétique, Paul Valéry se retrouve dans les œuvres fondatrices de sa sensibilité, Delacroix, Corot, Moreau, Zurbàran, affinités classiques, romantiques et symboliques acquises au Musée Favre de Montpellier dans sa jeunesse.

Ultime étape de ce voyage artistique, l’exposition s’arrête sur une facette méconnue de Paul Valéry, sa pratique autodidacte de la peinture. Tout au long de son existence, il dessine pour lui-même sans autre ambition que le délassement, l’exploration d’un espace de liberté personnel. La section rassemble gouaches, aquarelles, croquis, lumineux paysages de Sète et émouvants autoportraits.  

Paul Valéry et les peintres - Courbet - Manet - Morisot - Degas - Monet - Renoir - Matisse - Picasso ...
Prolongation jusqu'au 14 mars 2021

Musée Paul Valéry 
148 rue François Desnoyer - 34200 Sète
Tél : 04 99 04 70 00
Horaires : Du 1er avril au 31 octobre, ouvert tous les jours de 9h30 à 19h - Du 4 novembre au 31 mars, ouvert tous les jours, sauf le lundi de 10h à 18h



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.