L'Européen, au 5 rue Biot dans le XVIIème arrondissement, fait cohabiter dans ses locaux une salle de spectacle et une école prestigieuse, l'ESAT - école supérieure des arts et techniques -ainsi que l'atelier Hourdé, classe préparatoire aux écoles d'art. Sa façade moderniste, couverte d'interventions de street artistes, parmi lesquels Jérôme Mesnager et Jef Aérosol, annonce la couleur : un établissement vivant, haut-lieu de créativité. Le théâtre se caractérise par la forme circulaire d'une salle principale aux murs rouges, pouvant accueillir 350 spectateurs. Elle évoque la piste d'un cirque. Au sous-sol de l'établissement se trouve l'atelier du sérigraphiste Bert Bélanger. L'humour se taille la part du lion d'une programmation pensée par les co-directeurs de l'Européen, Sébastien Beslon et Vincent Ydé, de la société Beslon Management. Depuis septembre 2024, tous les dimanches, est enregistrée, en direct et en public, l'émission "La dernière", diffusée sur Radio Nova, présentée par Guillaume Meurice, Juliette Arnaud, Aymeric Lomprey et Pierre-Emmanuel Barré.
Le Concert européen, en référence au quartier de l'Europe voisin alors symbole de modernité, est fondé en 1872. Les habitués raccourcissent rapidement le nom pour l'Européen, dénomination qui devient officielle. Le café-concert de 600 places connait le succès grâce à des artistes populaires tels que Jane Bloch, Polaire puis Tino Rossi, André Claveau et Félix Mayol et ses représentations d'opérettes. Henri Christiné (1867-1941), compositeur de "Phi-Phi" (1918) et "Dédé" (1921) en devient le chef d'orchestre. Mais au lendemain de la Première Guerre Mondiale, le genre passé de mode, la salle connait un déclin. Des années 1920, repris par Alcide Castille (1880-1958), l'Européen renoue avec le public grâce à des artistes de premier plan, Lucienne Boyer, Fernandel, Bourvil, Charles Trenet, Georges Ulmer.
Au cours des années 1950, l'opérette s'impose à nouveau comme la spécialité de l'Européen, perpétuant la tradition. Le chanteur Roger Nicolas (1919-1977) y célèbre la 1000ème représentation de "Baratin", opérette en deux actes et six tableaux d'Henri Betti, Jean Valmy et André Hornez créée le 18 mars 1949 à l'Européen. Elle est jouée jusqu'en juin 1952. L'année suivante, Roger Nicolas y incarne le premier rôle de "Mon p'tit pote" musique de Jack Ledru, Marc Cab et Jean Valmy, dans une mise en scène de Jacques-Henri Duval. La chanteuse et actrice Suzy Delair (1917-2020) monte pour la première fois sur scène à l'Européen, en 1952, avec l'opérette "Mobilette" de Serge Veber et André Hornez, musique de Henri Betti, dans une mise en scène Jean-Marc Thibault.
Dans les années 1960, fièvre de la modernité, le bâtiment originel de L'Européen est rasé pour faire place à un nouvel édifice et des dispositions intérieures singulières. Du fait de sa salle circulaire et ses gradins à la façon des chapiteaux circassiens, de sa nouvelle programmation centrée autour de l'art dramatique, l'établissement prend pour nom Théâtre en Rond.
Au début des années 1980, le théâtre connait une désaffection du public avant de fermer ses portes. La salle à l'abandon est squattée, les étages deviennent un temps un hôtel de passe. Promis à la démolition pour créer un parking, le lieu est sauvé par une initiative privée.
En 1979, Philippe et Anne Hourdé fondent l’École Hourdé - classe préparatoire aux concours des écoles d'art - rue Dulong dans le XVIIème arrondissement. Avec le succès, l'atelier se trouve à l'étroit. En 1987, Philippe et Anne Hourdé s'intéressent à l'ancien théâtre à l'abandon de la rue Biot. Ils reprennent le lieu et en conservent les spécificités. Ils y installent leur école et réanime l'ancien théâtre. À cette occasion, l'Européen retrouve son nom et renoue avec le public lors de nombreux concerts, spectacles musicaux aux styles éclectiques. En journée, conférences et cours variés se tiennent au sein de la salle de spectacle.
Philippe et Anne Hourdé créent, en complément de la classe préparatoire, l'ESAT - École supérieur des arts et technique - cycle supérieur en architecture d'intérieure et arts graphiques avec une prédilection pour les métiers du décor de cinéma et de théâtre, de la muséographie, de la communication visuelle.
Au tournant des années 2000, Vincent Delerm et Jeanne Cherhal font leurs débuts parisiens à l'Européen. Calogero devient un fidèle. Depuis 2010, la programmation de l'Européen fait la part belle aux seuls-en-scène humoristiques.
En 2015, Sébastien Beslon et Vincent Ydé, de la société Beslon Management, reprennent la direction du théâtre à l'invitation de Julien et Thomas Hourdé, les fils de Philippe et Anne Hourdé. Ils envisagent de développer une plateforme culturelle et artistique dont l'énergie se nourrit d'une cohabitation entre école et théâtre. Ils programment trois-cent-quarante représentations. Parmi les artistes passés par cette scène emblématique, se trouvent Blanche Gardin, Kheiron, Khyan Kojandi, Pierre-Emmanuel Barré, Vérino, Aymeric Lomprey, Paul Mirabel, Doully, Pierre Thévenoux, Mustapha El Atrassi...
L'Européen
5 rue Biot - Paris 17
Métro Place de Clichy lignes 2, 13
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
Bibliographie
Le guide du promeneur 17è arrondissement - Rodolphe Trouilleux - Éditions Parigramme
Le guide du patrimoine Paris - sous la direction de Jean-marie Pérouse de Montclos - Éditions Hachette
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