Expo Ailleurs : Stëmme vun der Schmelz, la voix de la fonderie - Waassertuerm+Pomhouse - Dudelange - Dans le cadre de Esch2022 Capitale Européenne de la Culture - Luxembourg - Jusqu'au 1er janvier 2023

 

L’exposition « Stëmme vun der Schmelz » rend hommage, cent-quarante ans après la création à Dudelange au Luxembourg de la première usine intégrée, hauts fourneaux, aciérie et laminoir, et quarante ans après sa fermeture définitive, aux ouvriers de « la Forge du Sud ». Projet sensible et ambitieux, les commissaires Daniela Del Fabbro, Misch Feinen et Sandra Schwender ont mené un titanesque travail de recherche dans les archives du CNA, le Centre national de l’audiovisuel afin de réunir rares films d’époque, photographies et documents variés. L’exposition immersive « Stëmme vun der Schmelz » s’inscrit dans le cadre du projet « Our archive. Your story » porté par le CNA. Elle retrace l’histoire de l’ancienne usine de Dudelange, de sa grandeur jusqu’au déclin, par la voix de ceux qui l’ont fait vivre. L’évènement qui se tient au sein même des lieux désaffectés et désormais transformés en un espace culturel le Waassertuerm+Pomhouse, composé de l’ancienne station de pompage et du château d’eau, donne à voir, par le biais d’étapes marquantes, l’épopée industrielle et humaine. Plongée dans le passé sidérurgique de Dudelange, « Stëmme vun der Schmelz » célèbre les hommes et donne la parole aux ouvriers, cœur battant de cet ancien site industriel. L’exposition fait entendre les voix oubliées de l’aciérie dans un récit incarné du passé de la région du Minett pour laquelle Dudelange était un moteur économique et social. Au fil d’un parcours sensoriel et multimédia, témoignages et images d’archives redonnent chair à ce quotidien, cette mémoire vive.











L’imaginaire de l’artiste Misch Feinen, enfant du pays - certains de ses aïeux ont travaillé pour l’aciérie de Dudelange - a été profondément marqué par le complexe industriel. Les hauts fourneaux, leur identité visuelle, le travail du feu, mais également la figure de l’ouvrier hautement qualifié ont imprimé leur empreinte sur son travail plastique. Dès l’enfance, ses dessins convoquent la silhouette mystérieuse un peu effrayante de l’usine. Adolescent, il parcourt le site désormais clos pour prendre des photographies dans une démarche double, à la fois artistique et documentaire. Une fois adulte, tout naturellement, il sculpte l’acier.

En 2019, Misch Feinen lance un appel à témoins pour retrouver les ouvriers de l’usine de Dudelange. Il connait quelques retraités. Il approche l’amicale des anciens de l’aciérie et contacte les petits-enfants de ces travailleurs via Facebook. Avec la scénographe Anouk Schiltz, Misch Feinen investit le Waassertuerm+Pomhouse où il réunit l’ensemble des témoignages collectés dans une exposition profondément humaine. A son apogée, l’usine emploie près de quatre-mille personnes. Autant d’histoires personnelles, intimes et d’anecdotes à faire revivre. L’exposition « Stëmme vun der Schmelz » initie une rencontre sur plusieurs niveaux autour de l’histoire industrielle du Grand-Duché. L’évènement développé dans le cadre de Esch2022 Capitale Européenne de la Culture explore la mémoire des lieux en confrontant le passé et le présent.

Le parcours de « Stëmme vun der Schmelz » s’ouvre sur l’espace de l’ancienne station de pompage. Max Wertens, plasticien, a imaginé un mobile composé des casques de protection originaux des ouvriers. Les entretiens filmés, témoignage directs, diffusés sur des écrans répartis à travers la vaste salle rendent compte du quotidien des travailleurs de l’usine. Les souvenirs intimes, livrés avec une grande sincérité, ne font pas l’impasse sur les aspects les plus sombres de l’industrie. La fierté des ouvriers spécialisés porteurs d’un savoir-faire, la fraternité des hommes, la vie des syndicats font partie de la mémoire heureuse. Les anciens de la Forge du Sud disent aussi le danger omniprésent, les accidents mortels, les corps brisés par la difficulté des tâches, les maladies professionnelles, la pollution. Ils évoquent avec émotion les désillusions, la crise, les restructurations, la réduction des effectifs et finalement la fermeture. 









Crédit Jean-Pierre Conrardy / Fonds HISAFD Claudine Wolff
Collection du CNA

Le photographe luxembourgeois Armand Quetsch a réalisé le portrait de dix-neuf témoins entre 2019 et 2021 dont l’histoire est mise en perspective par le biais d’une frise chronologique avec les grands moments de l’usine et plus largement ceux du pays, de son évolution et de sa désindustrialisation. L’ascenseur mène les visiteurs jusqu’à l’ancien réservoir du château d’eau qui offre une vue unique sur toute la ville. Ce surplomb permet de comprendre l’importance du site industriel dans le développement de Dudelange, et des quartiers ouvriers selon les origines, notamment le célèbre quartier italien.  

Dans le réservoir même, « Uniscope », un écran de cinéma panoramique divisé en trois segments diffuse des images d’archives issues des fonds du CNA. Montées, elles composent un film émouvant qui raconte le quotidien des ouvriers et de leurs familles, de la création du site industriel il y a cent-quarante ans, la fin du XIXème siècle, à la fermeture définitive dans les années 1980.

Pour la descente par l’escalier extérieur du château d’eau, Misch Feinen, a imaginé une partition sonore particulière. Elle associe les témoignages, les sons de l’usine et de la musique, dans une superposition des pistes qui se répondent, tel l’écho d’un passé révolu. 

Stëmme vun der Schmelz
Jusqu’au 1er janvier 2023

Waassertuerm+Pomhouse
1b rue du Centenaire, L-3475 Dudelange - Luxembourg
Horaires d'ouverture : Du mercredi au dimanche de 12h à 18h
Entrée gratuite


Esch 2022 Capitale Européenne de la Culture



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.