Expo : Mater, Reines de France par Arilès de Tizi - Hommage aux Mères de l'Exil - Basilique de Saint-Denis - Jusqu'au 30 juin 2017



Histoires d'exil, de femmes fortes et courageuses, l'exposition Mater - Reines de France installée jusqu'au 30 juin prochain dans la crypte de la basilique Saint-Denis marque la première étape d'un cycle itinérant entre la France et les Etats-Unis. Le projet a vu le jour grâce à la rencontre de l'artiste Arilès de Tizi avec Ahmed Bouzouaïd, fondateur de l'agence Muse D. Territoires, une agence spécialisée en développement territorial qui accompagne notamment de démarche artistique et le concours du Centre des monuments nationaux. Mater - Reines de France rend hommage à travers une série de portraits aux mères des familles immigrées dont le destin de déracinement entre singulièrement en écho avec celui des souveraines qui reposent dans la nécropole royale. Le dialogue entre ce lieu de culture et l'installation redonne aux femmes anonymes évoquées différemment, comme rarement le sont les personnes issues de l'immigration, leur place dans l'Histoire de France moderne à laquelle elles appartiennent.










Tirés sur plexiglas rétroéclairé, montés sur des coffrets à taille humaine, les portraits en pieds d'Arilès de Tizi entrent en résonance avec les gisants royaux de la crypte. Détournant les codes de la représentation funéraire, l'artiste a choisi de placer ses modèles debout, drapées dans un linceul chatoyant. Cette interprétation réaliste et féministe emprunte à la dramaturgie de la figure maternelle qu'est la Stabat Mater, la mère debout. Exposées aux côtés des reines de France, Aïssata, Aïcha, Teresa, femmes marquées par les épreuves de l'existence, nimbées d'une sérénité majestueuse, regards puissants, racontent une histoire de dignité.

Arilès de Tizi a rencontré ses modèles au marché de Saint Denis, carrefour des mixités culturelles. De ces personnes ordinaires parfois sans-papier, marquées par la douleur de l'exil, il a fait des reines d'un jour. En les invitant dans la basilique, il ouvre une porte sur les lieux de culture dont cette population se sent souvent exclue. Les populations issues de l'immigration représentées autrement, dans un endroit différent suggère un moyen nouveau de rencontre et de partage. 









Parmi les six portraits de femmes de la Seine-Saint-Denis, Arilès de Tizi a placé un portrait de sa propre grand-mère, Ama, décédée avant la réalisation du projet, qui a elle-même quitté l'Algérie dans les années 1950 pour rejoindre son mari qui travaillait dans les mines de Valenciennes. Cette photographie a été le point de départ de la série, comme si en évoquant ses proches, son histoire familiale, l'artiste en venait à parler du monde tel qu'il est. La mère d'Arilès de Tizi part vivre en Algérie quand elle a vingt ans et c'est à Hussein Dey en 1984 qu'il naît. 

Au début des années 1990, alors qu'éclate la guerre civile algérienne, sa famille rejoint la France. Le jeune garçon grandit à Aubervilliers puis à Belleville où il se découvre une vocation d'artiste en intervenant sur les murs de la ville. Photographe, graffeur, peintre, il choisit le pseudonyme de Tizi en hommage à son grand-père engagé dans l'armée française pendant la Première Guerre Mondiale dans les troupes dites indigènes dont les soldats n'étaient enregistrés que sous leur prénom et leur lieu de naissance.








Le projet Mater, né au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, célèbre la société multiculturelle pour mieux lutter contre les tensions identitaires. A l'angoisse du malaise social, l'artiste répond en tissant des liens, en lançant des ponts entre les gens. L'intime et le collectif, le profane et le sacré, le politique et le culturel trouve un nouveau sens à travers ce projet, évocation poignante du défi et de la chance de vivre ensemble.

A côté des portraits, un écran diffuse les témoignages recueillis par Arilès de Tizi auprès des femmes qui ont posé pour la série de photographies. Emouvants, drôles, authentiques, ils sont universels comme cette belle exposition.

Du 17 mars au 30 juin 2017
Tarif : 10 euros

Quatre visites de nuit en compagnie de l'artiste et de la conférencière Laurence Arias, 12 avril et 26 avril, 10 mai et 19 mai
Tarif : 18 euros

Basilique Saint-Denis
1 rue de la Légion d’Honneur - Saint-Denis (93)
Horaires : du lundi au samedi de 10h à 17h15 et le dimanche de 12h à 18h15.



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.