Lorsque Louis XII meurt le 1er janvier 1515 sans héritier mâle, son petit cousin François d'Angoulême, aîné de la maison de Valois, soutenu dans ses désirs d'accession au trône par sa très autoritaire mère, la féroce Louise de Savoie, est désigné comme successeur. Mais Louis XII a épousé en seconde noce, peu de temps avant son décès, la sœur d'Henry VIII d'Angleterre, Marie Tudor. La jeune et sémillante reine est placée en isolement pendant quarante jours à l'Abbaye de Cluny afin de s'assurer qu'elle ne porte pas d'enfant royal. Compromettant les desseins de la lignée des Valois-Angoulême, la dame qui a du tempérament et pour amant l'ambassadeur anglais, le séduisant duc de Suffolk, fait annoncer une grossesse. François, marié à Claude, la fille boiteuse de Louis de XII et d'Anne de Bretagne, et dont l'attirance pour la reine devenue sa belle-mère par alliance n'a eu de cesse de le tourmenter, pourrait perdre la couronne si l'enfant se révélait un garçon. Que s'est-il passé pendant les trois mois qu'a duré le mariage du vieux roi et de la jouvencelle ? Quel a été le rôle de la duchesse d'Angoulême surnommée la Louve ? Marie, la bouillonnante épousée, porterait-elle le fruit de l'adultère ou est-elle enceinte du défunt monarque ?
Se référant aux chroniques historiques de Brantôme chroniqueur et notamment aux Vies des dames galantes, Daniel Colas, qui signe également la mise en scène, a construit une pièce truculente où la petite histoire vient bouleverser la grande. Secrets d'alcôves et coulisses du pouvoir monarchique, il tisse un récit délié, volontiers déluré où les intrigues de cour achoppent sur le badinage amoureux. Entre les manigances d'une reine mère putative et les ardeurs d'un jeune François promis à un grand avenir mais mené par ses ardeurs, la face de l'histoire aurait pu être changée pour une coucherie. L'autorité royale, fait du hasard.
Alors que François, prétendant au trône emporté par la fougue de la jeunesse est prêt à aller contre ses intérêts pour assouvir ses pulsions et peine à se contenir, la redoutable duchesse d'Angoulême veille au grain. Sous les dehors légers, l'amoureux des arts est déjà présent mais le fin stratège politique ce fait encore attendre. L'intrigue joliment troussée autour des dialogues déliés de Daniel Colas, texte vivant, divinement incarné par des comédiens impeccables, divertit autant qu'elle instruit.
Sur les planches, l'épure du décor toute médiévale voulue par Jean Haas est soulignée par les beaux jeux de lumière de Kevin Dufresne recréant des atmosphères singulières. On se croirait dans les pièces obscures du château royal de Vincennes au XVIème siècle. La richesse des costumes signés Jean-Daniel Vuillermoz ajoute à l'ensemble la majesté des splendeurs monarchiques.
Théâtre de comédiens, la ronde des personnages offre des rôles très réussis même aux protagonistes plus secondaires de l'intrigue. L'impeccable Béatrice Agenin en mère louve autoritaire et possessive, habile stratège, rusée dame de cour est formidable d'élégance dans le rôle titre. Face à elle, Gaël Giraudeau qui incarne le futur François Ier, grand gaillard vaguement benêt il faut bien l'avouer, apporte une grande fraîcheur au rôle du jeune héritier présomptif aiguillonné par ses appétits charnels.
Coralie Audret transmet passion et fragilités à sa Marie d'Angleterre, reine calculatrice tourmentée. Maud Baecker, à contremploi dans le rôle de Claude de Bretagne au physique ingrat, est d'une grande finesse tandis qu'Adrien Melin interprète un duc de Suffolk tout en séduction, un charme pimenté de touches d'autodérision. Parmi les rires du boulevard historique, Patrick Raynal apporte une certaine gravité, un élan classique à son personnage de vieux monarque à l'agonie et néanmoins lucide, qui tente désespérément de raviver la flamme pour donner un héritier à sa nouvelle reine. Yvan Garouel se révèle délicieux autant que cocasse dans le rôle de l'horripilant conseiller bègue, Grigneaux.
Coralie Audret transmet passion et fragilités à sa Marie d'Angleterre, reine calculatrice tourmentée. Maud Baecker, à contremploi dans le rôle de Claude de Bretagne au physique ingrat, est d'une grande finesse tandis qu'Adrien Melin interprète un duc de Suffolk tout en séduction, un charme pimenté de touches d'autodérision. Parmi les rires du boulevard historique, Patrick Raynal apporte une certaine gravité, un élan classique à son personnage de vieux monarque à l'agonie et néanmoins lucide, qui tente désespérément de raviver la flamme pour donner un héritier à sa nouvelle reine. Yvan Garouel se révèle délicieux autant que cocasse dans le rôle de l'horripilant conseiller bègue, Grigneaux.
Cette leçon d'histoire pleine de saveur et de fantaisie illustre à merveille la transition du Moyen-âge à la Renaissance. Drolatique, pittoresque, en un mot jubilatoire, La Louve a bien des atouts malgré quelques longueurs dues à la complexité de l'intrigue. Une belle soirée de théâtre et des comédiens superbes.
Mise en scène : Daniel Colas
Avec : Béatrice Agenin, Gaël Giraudeau, Coralie Audret, Adrien Melin, Patrick Raynal, Maud Baecker, Yvan Garouel
Du mardi au samedi à 21h - matinée samedi à 16h, dimanche 15h30
5, rue La Bruyère - Paris 9
Location : 01 48 74 76 99
Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.
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