Paris : Le jardin Anne Frank, îlot de verdure méconnu - IIIème



Au fond de l'impasse Berthaud, incise de pierre blonde entre les 22 et 24 rue Beaubourg, un jardin secret forme un îlot fleuri au cœur du Marais historique. Recrée par la Mairie de Paris à l'occasion de la réhabilitation de l'hôtel de Saint-Aignan en Musée d'art et d'histoire du Judaïsme, le jardin Anne Frank honore la mémoire de la jeune fille juive victime de la barbarie nazie, auteur du célèbre journal publié en 1947. Inauguré en 2007, cet espace vert méconnu de 4 000 m2 se divise en trois parcelles distinctes qui ont en commun cette quiétude hors du temps des lieux secrets parisiens.











A l'entrée, la parcelle Berthaud a été pensée dans un style contemporain. Quelques bancs, une table d'échecs, elle se déploie à l'ombre des érables du Japon tandis qu'hortensias et azalées apportent une touche fleurie. Un jeune marronnier, issu de celui qu'Anne Frank voyait du grenier à Amsterdam où elle et sa famille se cachaient, a été planté en 2007. Deux statues de bronze du sculpteur Alexander Polzin dressent leurs frêles silhouettes couleur de rouille.  Cette oeuvre est dédiée au poète roumain Paul Celan survivant de l''Holocauste.

En passant un portique creusé dans le haut mur qui entoure la parcelle centrale dite parcelle historique, les visiteurs accèdent au jardin originel celui attenant à l'hôtel de Saint-Aignan. Construit entre 1644 et 1650, sur des plans de Pierre Le Muet, architecte du roi, cet hôtel particulier est une commande de Claude de Mesmes, comte d'Avaux, surintendant des finances de Mazarin. Celui-ci hérite d'une parcelle irrégulière qui suit la courbe de l'ancienne enceinte de Philippe-Auguste. Il fait raser le bâtiment d'origine pour établir un édifice à la hauteur de ses prétentions aristocratiques. En 1688, Paul de Beauvilliers, duc de Saint-Aignan acquiert la propriété. Rénovation et modernisation sont à l'ordre du jour. André Le Nôtre est sollicité pour dessiner un jardin à la française avec des parterres d'ornement. Ce sont précisément ces plans qui ont été retenus afin de recréé le jardin lors du réaménagement.

Saisi en 1792 lors de la Révolution, l'hôtel de Saint-Aignan devient le siège de la septième municipalité en 1795 puis la mairie du VIème arrondissement jusqu'en 1823. Divisé en locaux commerciaux et ateliers de petite industrie à partir de 1842, il perd singulièrement de sa splendeur. Le corps de logis transformé en immeuble de rapport est surélevé de trois étages. De nombreux artisans juifs immigrés de Pologne, de Roumanie et d'Ukraine s'y installent. Durant la Seconde Guerre Mondiale, sous l'Occupation, cette cour industrielle est marquée par les rafles et la déportation de nombreux habitants dont treize périront dans les camps nazis.









En 1962, la Ville de Paris rachète les terrains et l'hôtel de Saint-Aignan est classé au titre des Monuments Historiques en 1963. Une première campagne de restauration sous la direction de Jean-Pierre Jouve, architecte en chef des Monuments historiques débute en 1978. Une seconde est lancée en 1991, menée par Bernard Fonquernie, également architecte en chef des Monuments historiques. En 1998, à l'initiative de Jacques Chirac, alors maire de Paris, l'hôtel de Saint-Aignan devient Musée d'art et d'histoire du Judaïsme.

Cette partie du jardin, entourée d'un haut mur, s'étend sur 2 200m2. La jardinière centrale reprend la courbe de l'ancien bassin voulu par Le Nôtre. La longue pergola, une tonnelle académique de type "cabinet de treillage" croulant sous les fleurs parfumées, rosiers grimpants, jasmins, clématites, chèvrefeuilles, évoque les espaces de déambulation versaillais. Cette parcelle a été reconstitué selon des plans datant du XVIIème siècle.






La troisième parcelle, dite parcelle Lecomte, se développe comme un verger. Plantée d'arbres fruitiers, cerisiers, pommiers, elle accueille en son coeur une aire de jeu pour les enfants. Un peu à l'écart, un petit jardin partagé géré par l'association 1001 feuilles fait la joie des habitants du quartier.

Jardin Anne Frank
14 impasse Berthaud - Paris 3
Accès entre les 22 et 24 rue Beaubourg
Métro Rambuteau ligne 11



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


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