Paris : Jardin Naturel Pierre Emmanuel, un réservoir de biodiversité au coeur de la ville - XXème

 

Le Jardin Naturel Pierre Emmanuel, inauguré en 1995, réserve de biodiversité, se distingue par sa gestion minimaliste propice au développement d'une faune et d'une flore autochtones. La bulle écologique dont le petit bois et la mare où chantent les grenouilles sont les éléments clés, comporte près de deux-cents essences végétales indigènes déployées sur une surface de 6300m2. Son nom rend hommage à Pierre Emmanuel (1916-1984) poète, écrivain, académicien, inhumé au cimetière du Père Lachaise voisin.

Le jardin se veut une reconstitution de microcosmes naturels, autour d'une mare et d'un bois. Il s'agit pour les jardiniers de minimiser l'intervention humaine, laisser faire la nature, avec des techniques biologiques et des traitements chimiques exclus. Les cycles naturels de la végétation sont respectés la litière conservée. Les arbres sont taillés au minimum pour conserver un bon ensoleillement nécessaire à la mare, les prairies fauchées deux ou trois fois par an. Le Jardin naturel Pierre Emmanuel appartient à la Trame verte et bleue, corridor vert des départements de Paris et de la petite couronne, étapes intermédiaires constituées d'habitats naturels. Ce schéma régional de cohérence écologique d'Île-de-France introduit lors du Grenelle de l'environnement en 2009, a été adopté en 2013. 







Ouvert au public tous les jours, sans rendez-vous, contrairement à son aîné le jardin sauvage Saint-Vincent, le Jardin Naturel Pierre Emmanuel est le fruit de la transformation d'une ancienne friche urbaine. L'aménagement mené sous la houlette de Claude Frison du Service Paris Nature de la Direction des Espaces Verts et de l'Environnement de Paris, a donné naissance à un espace vert dont l'atmosphère unique séduit les riverains depuis sa création.

Le concours lancé en 1993 retient le projet des paysagistes Anne Brochet, Laurent Gérard, Virginie Formigé associés à l'écologie Sylvestre Voisin de l'Office du Génie Écologique. Il s'attache à reproduire les milieux naturels d'Ile-de-France, tout en misant sur une régulation minimaliste et un objectif pédagogique. 

Cependant, certains choix formulés ont été contrariés. Afin de créer un écosystème spécifique, l'équipe avait opté pour des terres de découvertes de carrière sur sol calcaire, terres exemptes de pollutions humaines ou naturelles. À défaut de budget, il aura fallu se contenter des terres calcaires issues de chantiers urbains, contaminées notamment par des végétations que les jardiniers ont pris soin d'arracher au fur et à mesure de leur apparition. Lors du creusement de la mare, la mise à jour d'un sol pollué par des hydrocarbures, impropre à la prolifération de la faune, a ralenti la progression du chantier, nécessitant une intervention de dépollution d'envergure.







Les espaces distincts, pelouse sèche, prairie, friche, mare, sous-bois favorisent le développement de la flore francilienne, plantes indigènes tels que des œillets des chartreuses ou des Épipactis à larges feuilles, des essences d'arbres idoine, chênes, érables champêtres, merisiers, noisetiers, figuiers. Fouines, éperviers, chats, redoutables prédateurs pour les oiseaux, rodent. La végétation rupestre s'accroche au mur de soutènement du Père Lachaise, vignes, clématites des bois, lianes, houblons. Les enrochements calcaires évoquent les anciennes carrières de gypse en activité jusqu'au XVIIIème siècle. 

La pelouse sèche, la prairie et la friche, ponctuées de camomilles, de scabieuse bleues, d'achillées blanches, attirent des papillons tels que l'Argus bleu, le Vulcain. Le Tircis privilégie les espaces de sous-bois de la Promenade haute où se développent fougères, campanules, géraniums herbes-à-Robert. 

La mare et ses herbiers aquatiques participe de l'équilibre écologique. Sa faune, prédateurs naturels des moustiques, à l'instar des chauve-souris, des oiseaux, des batraciens ou des libellules, en limite la prolifération. La mare offre un environnement idéal aux amphibiens. Le crapaud commun, la grenouille rousse, le triton palmé, le triton ponctué ont introduits par les créateurs du jardin. L’alyte accoucheur, petit crapaud réputé pour son chant, s'est invité de lui-même parmi ces animaux.







L'importance écologique des mares est aujourd'hui valorisée notamment en tant qu'étapes incontournables de "la Trame bleue". Cet itinéraire aquatique propice à la biodiversité permet aux espèces de se déplacer d'un milieu à l'autre, de cours d'eau en étangs. Dans le XXème arrondissement, le réseau de mares s'étend du jardin naturel Pierre Emmanuel, au jardin Samuel de Champlain, en passant par le square Emmanuel Fleury, le square Antoine Blondin et le jardin Casque d'Or.

Jardin naturel Pierre Emmanuel
120 rue de la Réunion - Paris 20
Heures d'ouverture : Du 1er mai au 31 août, du lundi au vendredi, de 8h à 20h30, le week-end à partir de 9h. Du 1er septembre au 30 septembre, du lundi au vendredi de 8h à 19h30, le week-end à partir de 9h.
Métro Alexandre Dumas ligne 2



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.