Bubble gum - Lolita Pille : Manon a vingt ans et se trouve
trop jolie pour s’étioler dans son village de province. Jeune femme, nourrie de fantasmes sur papier
glacé, elle rêve de gloire instantanée, génération télé réalité. Pour changer de vie, elle monte à
Paris où elle surnage sans grande réussite entre son job de
serveuse dans un restaurant et les castings bidons. Elle rencontre au
cours d’une soirée people à laquelle elle réussit à s'inviter, Derek Delano rejeton
orphelin d’un richissime homme d’affaire pas tout à fait honnête. Blasé, revenu
de tout, rongé par la vacuité, l’alcool, la drogue, les orgies, il s’ennuie et
décide par jeu pervers de la prendre en main et de briser son destin en
réalisant tous ses rêves de carton-pâte. Pendant deux ans, il la soustrait au
monde réel et la fait vivre dans un univers parallèle monté de toute pièce par
ses soins entre agence de mannequins factice, faux tournage de film, sosies de
célébrités, lui faisant croire que sa carrière explose, qu’elle est enfin devenue
l’icône adulée des foules qu’elle désirait tant être. Il la manipule et la
façonne à son image, longue torture psychologique qui fait rejaillir ce qu’il y
a de pire en elle, la plongeant dans la dépression, l’addiction aux médicaments
et à la coke jusqu’à la chute finale.
L’intrigue de Bubble gum manque sérieusement de
vraisemblance. Lolita Pille fait fi de tout réalisme, revendique comme parti
pris le manque de crédibilité. Cela donne une histoire sans aspérités tangibles
teintée de nihilisme convenu à laquelle il est difficile d’accrocher. Dans sa
volonté de subversion facile, l’auteur imagine des personnages sans consistance,
caricature pâlottes dépourvues de substance. Les nantis sont amoraux, suffisants,
dépravés et cyniques. Les modestes, creux, acculturés, avides, bavent devant le
star system et ne reculent devant aucune bassesse pour y accéder. Elle joue
avec les références, accumulation incongrue comme autant de clichés trash mêlés
d’une dose de sous-culture de bon aloi qu’elle semble avoir intégralement pompé
chez Beigbeder qui fut un temps son mentor et modèle littéraire. Le texte a un
côté clinquant très artificiel avec de temps à autre des effets de style un peu
poussifs, des pages particulièrement fastidieuses.
J’avais lu Bubble gum à sa sortie en librairie, il y a un certain temps, sans
en avoir gardé de souvenirs. Cette nouvelle lecture a été fort décevante. D’autant
plus que je suis convaincue de la présence d’un certain talent chez Lolita
Pille. J’aime assez la romancière, ce personnage écorché vif et lettré qui n’a
pas sa langue dans sa poche et ne se laisse pas démonter par les fâcheux auxquels
elle répond avec verve même si parfois sous le feu croisé des critiques
assassines, notamment sur les plateaux télé, elle se laisse un peu emporter
jusqu’à l’arrogance. Une personnalité très loin, à mon sens, du rôle de jolie
poupée neurasthénique, coup marketing d’une maison d’édition qui se repaît de
chaire fraîche, dans lequel les journalistes aimeraient bien la cantonner. Malheureusement
pour ce livre en particulier, je n’ai pas tellement d’arguments en sa faveur. Je
passe.
3 commentaires :
Le nom de Beigbeder comme mentor et modèle suffit à ne pas me donner envie. Dommage, le pitch pouvait donner envie
Les romans de Beigbeder sont de mieux en mieux, à mon sens, maintenant qu'il est enfin sorti de l'ombre de Bret Easton Ellis and co et je crois Lolita Pille pas dépourvue de talent. C'est justement l'histoire qui est mauvaise pour ce roman précis.
Très déçue également à la lecture de son roman, habituée à mieux :s depuis je ne me suis pas trop remise à lire ses autres parutions !
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