Théâtre : Le Fils, de Florian Zeller - Avec Yvan Attal, Rod Paradot, Anne Consigny - Comédie des Champs Elysées



Tenté par la politique, Pierre est un avocat qui a bien réussi. Il vient d'avoir un bébé avec Sofia sa nouvelle compagne. Débordé par son travail, absorbé par sa nouvelle famille, il n'a pas réalisé à quel point Nicolas, son fils de 17 ans issu d'un premier mariage, allait mal. L'adolescent sèche le lycée depuis trois mois, se montre même parfois violent et rumine des idées noires. Lorsqu'Anne, son ex-femme, désemparée, dépassée par le mal être qui ronge leur enfant, vient voir Pierre pour que Nicolas, à sa demande, vienne habiter avec lui, celui-ci ne se rend pas compte de la gravité de la situation. Bien qu'à l'écoute, il ne comprend pas. En refaisant sa vie, aurait-il négligé son fils ? Il est persuadé que Nicolas a simplement besoin d'être mieux cadré, de dormir, de faire du sport. Mais le jeune homme après un temps de répit s'enfonce dans la dépression.







Troisième volet d'une trilogie familiale débutée avec la pièce La Mère, puis prolongée avec Le Père, Le Fils poursuit le travail de dissection des liens familiaux entrepris par Florian Zeller. S'intéressant plus particulièrement aux relations parents-enfants, l'auteur se penche sur les difficultés des enfants de divorcés, auscultant avec finesse la difficulté d'être des adolescents, la douleur insurmontable de la séparation, les dysfonctionnements de la famille recomposée. Florian Zeller atteint une vérité rare, traite de ce sujet douloureux avec pudeur, sans pathos. Il traduit avec subtilité le malaise croissant, la tension qui se resserre, l'impuissance des parents devant l'imminence du drame. 

La mise en scène imaginée par Ladislas Chollat, d'une clarté impeccable, dans un décor dépouillé d'Edouard Laug, souligne la sobriété d'un texte aux dialogues succincts tout en intensité et en émotion grandissante, en réalisme indispensable à la dureté du sujet. Face à face poignant entre un père et son enfant perdu, Le Fils est l'histoire d'une filiation douloureuse. Pierre qui a eu lui-même des rapports difficiles avec son père est un homme pragmatique. Il s'imagine qu'il y a des solutions concrètes à tous les problèmes. Son rôle de père, ses certitudes sont ébranlés par le malaise grandissant de l'adolescent. Entre culpabilité et interrogations sur l'idée de transmission, il vit cette épreuve comme une remise en question de ce qu'il est.




Les comédiens épatants portent la pièce avec brio. Yvan Attal, dans le rôle du père dérouté par ce fils qu'il ne comprend plus, qu'il ne connaît pas autant qu'il le croyait, à qui il pense avoir tout donné, est remarquablement nuancé. Face à lui, incarnant Nicolas, Rod Paradot, César du meilleur espoir masculin en 2016 pour La Tête haute d'Emmanuelle Bercot, est d'un naturel bouleversant, d'une vérité intense dans la détresse. Les rôles féminins - Anne Consigny interprète Anne, Elodie Navarre, Sofia - bien que moins étendus sont également très touchants. Une pièce forte, émouvante. Un beau moment de théâtre.

Le Fils, de Florian Zeller
Mise en scène Ladislas Chollat
Avec Yvan Attal, Rod Paradot, Anne Consigny, Elodie Navarre, Jean-Philippe Puymartin, Raphaël Magnabosco 

Du mardi au samedi à 20h30, matinée le dimanche à 16h
Relâches du 1er au 15 avril 2018 inclus

Comédie des Champs Elysées
15 avenue Montaigne - Paris 8
Réservations : 01 53 23 99 19



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.