Lundi Librairie : Une apparition - Sophie Fontanel



Une apparition - Sophie Fontanel : Alors qu'elle est rédactrice en chef mode du magazine Elle, Sophie Fontanel est poussée dehors après un changement de direction.  Cette situation qu'elle vit comme une injustice la plonge dans une crise intime douloureuse. A Saint-Tropez, la rencontre furtive avec une femme à la chevelure immaculée va lui servir de déclic. Elle entre dans un processus de réapparition à soi cristallisé sur les cheveux. Sophie a l'intuition que sa crinière blanche naturelle serait plus belle que la teinture sombre qu'elle arborait jusque-là. Ce choix tout d'abord esthétique se révèle aventure de l'acceptation de soi. Assumant la transition bicolore entre le brun coloré et le blanc, méthode radicale s'il en est, elle partage son expérience sur les réseaux sociaux, celle d'une lente métamorphose de dix-huit mois, d'une transformation physique vécue comme une forme d'émancipation. 

Journaliste, chroniqueuse, influenceuse, Sophie Fontanel livre un témoignage romancé, une histoire de réconciliation avec soi-même. Drôle, émouvante, chaleureuse, libre, elle a partagé son aventure sur Instagram déclenchant réactions innombrables, remarques positives et négatives. Dans notre société, la question du cheveu blanc est un tabou. Marque du temps qui passe, le manque de mélanine renvoie aux signes du vieillissement vécus comme une honte. Futilité ? Pas si sûr. L'impératif contemporain de la jeunesse est une véritable tyrannie. Alors que la chevelure participe à l'identité sociale des individus, la démarche du "going grey", comme disent les Américains, s'affirme en rébellion contre les diktats, contre l'injonction au jeunisme.

Sophie Fontanel sait rire d'elle-même et du monde dans lequel nous vivons. Cinquantaine épanouie, elle prône la diversité, va à l'encontre des préjugés. Au fil du livre, la virulence des idées préconçues prend une dimension intime. Les cheveux blancs sont perçus comme un signe de renoncement. Dans l'idée d'aversion supposée des hommes, il y a la peur de ne plus plaire, d'avoir l'air dépassé. La pression sociale pousse les femmes à se teindre les cheveux. Choisir d'assumer une chevelure blanche interroge la féminité et les normes de la beauté. Le récit de Sophie Fontanel est un prétexte pour questionner les canons de beauté, une prise de conscience du rejet de la vieillesse féminine, cette violence qui les pousse à simuler, dissimuler, devenir des fausses jeunes en commençant par la triche capillaire, la servitude de la coloration. Dans le même temps, les hommes n'ont pas ce souci, car en vieillissant, le fait qu'ils aient encore des cheveux est déjà bien suffisant pour eux.

Soulignant les incohérences, Sophie Fontanel combat les clichés en soutenant que pour plaire aux autres, il faut d'abord se plaire à soi-même. Les stéréotypes imposés, les conventions esthétiques semblent ignorer la douceur et la séduction des cheveux blancs. La représentation des femmes aux chevelures argentées se fait rare. Il y a un véritable manque de modèles, de références. Etre soi-même, en paix avec son image, c'est réapparaître à soi, affirmer son droit de vieillir, de s'accepter tel qu'on est.

Une apparition - Sophie Fontanel - Editions Robert Laffont 



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.