Théâtre : Fleur de Cactus, de Barillet et Gredy - Mise en scène Michel Fau - Avec Catherine Frot, Michel Fau - Théâtre Antoine



Sémillant quinquagénaire, le docteur Julien Desforges, un chirurgien-dentiste réputé, a toujours été réfractaire au mariage. Grand séducteur, pour préserver sa liberté et tenir à distance les donzelles en mal d'épousailles, il s'invente auprès de ses maîtresses, une femme et trois enfants. Epris de la jeune Antonia et bien décider à sauter enfin le pas pour convoler en justes noces, il évoque la possibilité d'un divorce tout aussi imaginaire que ses liens matrimoniaux. Le Dr Desforges est alors contraint de produire une épouse pour apaiser sa dulcinée qui exige de la rencontrer. Il demande à son assistante, Melle Stéphane Vigneau, une vieille fille qui ne s'avoue pas les sentiments qu'elle éprouve pour son patron, de lui venir en aide. Si sa collaboratrice dévouée s'offusque de ses frasques, elle accepte néanmoins d'endosser le rôle de l'épouse fantôme.






Portes qui claquent, mensonges, quiproquos, cette histoire de séducteur dépassé par ses mensonges, signée par le duo Pierre Barillet et Jean-Pierre Gredy, tient de la grande tradition du boulevard. Croquant les travers du genre humain, ce tableau de mœurs, irrésistible de drôlerie, oscille entre dérision et folie douce. Dans cette comédie légère mais dotée d'un tempérament explosif, les répliques fusent et font mouche. Les dialogues ciselés révèlent beaucoup d'esprit et versent dans une rare finesse. A l'extravagante gaieté de la farce burlesque se mêlent des nuances d'humour pince-sans-rire, des variations subtiles sur la solitude, un hommage piquant à la solidarité féminine et à l'émancipation de la femme.

A la mise en scène, Michel Fau qui interprète également le personnage du Dr Desforges, a souhaité reproduire le charme désuet des pièces produites dans l'émission disparue depuis le milieu des années 1980 Au théâtre ce soir. Et les swinging sixties de la pièce prennent vie dans un décor d'atmosphère, façon carton-pâte, gentiment kitsch, imaginé par Bernard Fau. Couleurs acidulées, formes géométriques, plexiglas, téléphone à cadran répondent aux costumes de David Belugou, vestes étriqués, mini-jupes, choucroutes. Les lumières jaunes en contreplongée de Joël Fabing confèrent au plateau un grain vintage comme sur les photographies d'époque tandis que musique et chansons idoines complètent l'illusion.




La cocasserie de "Fleur de cactus" prend toute sa dimension grâce au sens du burlesque des huit comédiens qui sont épatants. Piquante, Catherine Frot dans le rôle de Melle Vigneau, Molière de la comédienne dans un spectacle de théâtre privé pour son interpréation, toute en délicatesse, nuance avec précision les intentions, les intonations. Elle excelle aussi bien en vieille fille qui ne demande qu'à s'épanouir qu'en femme fatale libérée qui assume enfin son indépendance, son assurance. Tour à tour comique ou plus grave, Michel Fau incarne avec beaucoup d'humanité, un Dr Desforges dépassé par les événements. Nominée pour le Molière de la révélation féminine dans ce rôle, Mathilde Bisson en jeune maîtresse abusée par les mensonges de son amant brille de grâce et de naturel. Joliment campés, écrits en décalé, les personnages secondaires, très amusants, sont à l'avenant. 

Pièce réjouissante, jubilatoire tout en demeurant élégante, "Fleur de cactus" qui a déjà conquis le public et la critique les saisons précédentes revient en grande forme. A ne pas manquer !

Fleur de Cactus de Pierre Barillet et Jean-Pierre Gredy
Mise en scène Michel Fau 
Avec Catherine Frot, Michel Fau, Patrick Ligardes, Mathilde Bisson, Wallerand Denormandie, Marie-Hélène Lentini, Frédéric Imberty, Audrey Langle

Reprise à partir du 16 mai 2017 jusqu'au 1er juillet
Du mardi au samedi 21h - Samedi et dimanche à 16h

Théâtre Antoine
14 boulevard de Strasbourg - Paris 10
Tél : 01 42 08 77 71



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.