Paris : Villa Gabriel, anciens ateliers d'artistes réenchantés - 9 rue Falguière - XVème



Derrière une grille peu avenante et rarement ouverte, une petite impasse, vestige du passé artistique de Montparnasse, dévoile le charme de ses attraits champêtres. Survivance d'un vieux quartier disparu à la suite des grands travaux de transformation datant des années 1960-70, nouvelle gare et érection de tours vertigineuses, sans âme mais résolument modernes, la villa Gabriel a, pour le plus grand bonheur des arpenteurs de Paris, survécu aux changements radicaux du paysage urbain. Passage typique d'un autre temps, ouverte en 1895 sur les ruines d'une briqueterie, cette allée pavée où les ateliers rénovés ont trouvé une nouvelle vie est un secret préservé précieux. Elle porte le prénom du fils du propriétaire originel du terrain. Quiétude heureuse, végétation abondante et floraison idoine, cette venelle bucolique, à l'ombre de la Tour Montparnasse, vaut bien quelque détour.  








Rive gauche, les nombreuses congrégations religieuses attirent dès le XIIIème siècle les artisans d'art, verriers, ivoiriers, statuaires qui installent des courées artisanales jouxtant les bâtiments ecclésiastiques. A partir du XIXème siècle, ces impasses aux loyers modestes accueillent les artistes impécunieux qui se rassemblant en communauté. Parallèlement, des promoteurs malins jouant sur la réputation artistique de Paris et l'attraction exercée par celle-ci sur les peintres et sculpteur en mal de reconnaissance du monde entier, construisent à peu de frais des ateliers et des cités par centaine, notamment à proximité de l'Ecole des beaux-arts et de la Sorbonne. L'effervescence intellectuelle et artistique atteint son comble durant l'entre-deux-guerres.

A Montparnasse, les courettes bordées de maisonnettes à la charpente de bois, aux larges baies vitrées orientées au nord, ont quasi systématiquement été rasées, ne laissant des anciens ateliers d'artistes que peu de trace. Ces refuges de la création de l'entre-deux-guerres, situés au fond d'impasses, vétustes par manque d'entretien, constructions modestes voire tout à fait rudimentaires donc peu pérennes, ont laissé place au gigantisme de l'actuel quartier.









Jusqu'en 1900, la rue Falguière s'appelle rue des Fourneaux, un nom qu'elle doit à l'abondance des fours à chaux ou des cheminées d'appel des champignonnières qui la bordent. Cette voie existait déjà en 1516 et elle est indiquée à l'état de chemin sur le plan de Roussel de 1730. La voie traverse alors le mur des Fermiers généraux à la barrière des Fourneaux. En 1875 la rue est bordée, jusqu'à Vaugirard, de briqueteries. Lorsque la villa Gabriel est percée en 1865, les Franciscains s'installent sur le terrain qui s'ouvre depuis le 9 rue Falguière - alors rue des Fourneaux donc. Ce couvent accueille le Commissariat de Terre Sainte.

En 1880, les religieux sont expulsés par décret mais dès 1882, le Commissariat est rendu à la congrégation où une petite communauté se reconstitue. La loi de 1901 concernant les associations puis celle de 1905 de séparation de l'Eglise et de l'Etat amènent à la confiscation des biens des Franciscains et à la dissolution du couvent. Dans les bâtiments s'installent la toute nouvelle Ecole Bréguet fondée en 1904, une école d'ingénieur qui conservera les locaux jusqu'à son déménagement en 1987 à Noisy-le-Grand.










La villa Gabriel fait partie de l'ensemble lié à l'ancienne Cité du Maine, actuelle rue Antoine Bourdelle où se trouve aujourd'hui le Musée Bourdelle et qui allait jusqu'au Chemin du Montparnasse bastion de l'Académie russe de Marie Vassilieff et dont je vous parlais ici. Fréquentée par Foujita, Modigliani, Soutine et Bourdelle, elle a été notamment la résidence d'Alfred Maurer (1868-1932) peintre moderniste américain dont l'oeuvre avant-guerre fut soutenue par Gertrude Stein.  Aujourd'hui, l'esprit artistique des lieux perdurent grâce à la présence des peintres Yasmine Moti, Laurence Simon, Jacqueline Manuel, Anouchah Aryana et Régine Sarallier qui habitent les ateliers rénovés.

Villa Gabriel
Accès par le 9 rue Falguière - Paris 15



Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un site culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Cette première aventure s'achève en 2015. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie. 


Bibliographie
Connaissances du vieux Paris - Jacques Hillairet - Editions de Minuit
Dictionnaire historique des rues de Paris - Jacques Hillairet - Editions de Minuit
Ateliers d'artistes à Paris - Jean-Claude Delorme et Anne-Marie Dubois - Parigramme
Le guide du promeneur 15è arrondissement - Florence Chaval - Parigramme

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