Cinéma : The Search de Michel Hazanavicius - Avec Bérénice Bejo, Abdul Khalim Mamatsuiev - Par Lisa Giraud Taylor



Quand le réalisateur de The Artist plonge dans le conflit Tchétchène de 1999, il nous entraîne sur les traces de quatre personnages, au cœur de la violence et des atrocités de la guerre. Dans un village tchétchène, Hadji, neuf ans, interprété par Abdul Khalim Mamatsuiev, assiste impuissant à l’assassinat de ses parents. Fuyant le lieu du massacre, il rejoint les cohortes de réfugiés avec son petit frère nouveau-né. Il croise le chemin de Carole (Bérénice Bejo), une chargée de mission pour  l’Union Européenne, militante des droits de l’Homme esseulée- elle ne parle qu’à sa mère- qui prend sous son aile l’orphelin. Sa grande sœur Raïssa (Zukhra Duishvilli) ne voulant pas se résoudre à l’idée que ces frères puissent avoir péri sous les décombres de leur village, les cherche obstinément parmi les civils en exode. Parallèlement, Kolia (Maxime Emelianov), un jeune russe de 20 ans, est enrôlé de force dans l’armée et envoyé sur le front après une condamnation pour avoir fumé un joint. Il tente de résister à l’embrigadement visant à faire de lui un soldat sans pitié, une machine tandis qu’il découvre l’horreur quotidienne de la guerre.







Il faut que je vous avoue, je n’avais pas adhéré à The Artist et j’ai un mal fou avec Bérénice Bejo. Pourtant, le synopsis de The Search m’a attiré car j’ai suivi de près les évènements qui se sont déroulés au summum du conflit russo-tchétchène. Largement inspiré du sublime Anges Marqués de Fred Zinnemann, datant de 1948, qui mettait en scène Montgomery Clift dans un Berlin post-Seconde Guerre Mondiale, le film de Michel Hazanavicius possède les défauts de ses qualités.







Les images de guerre très réalistes, très fortes, filmées comme un documentaire, à la manière de la réalisatrice américaine, Kathryn Bigelow, prennent aux tripes. Elles montrent la lutte d’un individu contre un groupe et s’accommodent bien du côté mélo. La scène d’ouverture est, à ce titre, exceptionnelle. Cependant, ces qualités visuelles sont ternies par certains relents manichéens et un penchant pour la guimauve. Sortez les violons.

Les scènes les plus délicates sont, à mon humble avis, mal faites. Peut-être le choix de l’actrice ? Il y a un problème de distance et le flot de sentimentalisme déborde souvent. Pour exemple, certaines scènes entre la chargée de mission et l’orphelin, soit trop niaisement interprétées par Bérénice Bejo, soit pas assez poussées dans la tragédie. Tandis que l’enfant fait passer toute l’horreur de la situation à travers son silence, son regard et son coup de crayon, les mimiques de la comédienne sont en contradiction avec les sentiments qu’elle est supposée transmettre à ce petit garçon.




Assez ironiquement, le film est souvent pris entre deux feux. Il reste au bout de ces 2h14, un goût d’inachevé presque d’acte manqué. Pourtant, les scènes éprouvantes en font un brûlot efficace dénonçant les conflits qui minent cette région du globe. Ce long-métrage pointe avec pertinence le côté immobile de la diplomatie, notamment européenne. Un film imparfait mais à voir quoique l’on pense de Michel Hazanavicius ou de Bérénice Bejo. Quoique l’on pense de la guerre, du conflit russo-tchétchène. La violence est là, tapie à nos portes et The Search, déclinant l’horreur en quatre langues, la montre crûment.

The Search
Réalisateur : Michel Hazanavicius
Avec Bérénice Bejo, Abdul Khalim Mamatsuiev, Annette Bening, Zukhra Duishvilli, Maxime Emelianov
Sortie : 26 novembre 2014





Lisa Giraud Taylor est écrivain, photographe et blogueuse. Son roman Liverpool Connexion est disponible aux Editions Trinômes. Vous pouvez également retrouver sa plume piquante sur Le blog d'une ItemLiz Girl. Cette jeune femme hyperactive - mais comment fait-elle ? - collabore régulièrement avec les webzines Lords of Rock et So Busy Girls où elle nous régale de chroniques pleines d'esprit, ultra punchy dans un style bien à elle. Humour ravageur et pertinence sont ses marques de fabrique.