Paris : Le Kiosque des Noctambules de Jean-Michel Othoniel - Place Colette - Métro Palais Royal - Musée du Louvre - Ier



"Le Kiosque des Noctambules", bouche de métro insolite, réalisation à rebours de l’espace architectural, s’appelait à l’origine "L’Impertinente". D’impertinence, cette œuvre contemporaine du plasticien Jean-Michel Othoniel n’en manque pas. Objet fantastique, cristallin, elle détonne dans le cadre urbain géométrique qui lui est imparti et donne un air de fête à l’entrée de la station de métro Palais Royal - Musée du Louvre juste en face de la Comédie Française, depuis son inauguration le 30 octobre 2000. "Le Kiosque des Noctambules" est une folie colorée destinée à accueillir le flux des passagers comme une pause enchantée dans l’hystérie de la ville. Cette création apporte une touche baroque au décor du Paris historique, touche insolite mise en exergue par l’architecture classique de la place Colette.








En 1996, la RATP prépare les célébrations du centenaire du métro parisien inauguré en juillet 1900, et demande à Jean-Michel Othoniel de réaliser un dessin, le croquis d’une œuvre imaginaire pour illustrer un livre en faisant référence au travail d’Hector Guimard architecte de l’Art Nouveau qui dessina les premiers édicules du métropolitain. Othoniel qui réside alors à la Villa Médicis à Rome est fasciné par le travail des maîtres verriers vénitiens. Il s’inspire des verres de Murano et crée une maquette en trois dimensions de son projet. Les responsables de la RATP sont séduits et décident de lancer la réalisation de cette œuvre offrant aux usagers du XXIème siècle cette bouche de métro féérique pour la modique somme de 3 millions de francs (un peu plus de 450 000 euros.)

"Le Kiosque des Noctambules", composé de deux gloriettes, déploie vers le ciel son treillage aérien façonné en fonte d’aluminium, colonnades élancées et graciles. En sortant de la bouche de métro, les dômes effilés de perles dessinent une voûte céleste ruisselante de pierreries. Deux statuettes de verre trônent au sommet des couronnes agrémentées de bulles colorées en verre soufflé de Murano réalisées par la verrerie Salviati, maîtres verriers vénitiens de légende. Les deux coupoles sont complémentaires, l’une dans des tons chauds représentants le jour, l’autre dans des tons froids la nuit reprenant le jeu sur la dualité, très présent dans l’œuvre de l’artiste.








Lorsque le temps s’y prête, qu’une éclaircie vient frapper de lumière la tonnelle ou que les éclairages publics s’allument, toute la place Colette s’illumine d’un chatoiement coloré comme lorsqu’on ouvre un coffret à bijoux. Il y a un effet colifichet de pacotille joyeusement régressif dans cet édifice légèrement de guingois à la fragilité apparente, garantie anti-vandalisme. 

La balustrade qui enchâsse la bouche de métro reprend le motif tout en bulles et alvéoles représentatif de l’œuvre de Jean-Michel Othoniel, dentelle de métal bosselé complétée à l’arrière du kiosque d’un banc public follement gai. Sous cet angle, l'installation prend des allures de carrosse royal lancé à vive allure, tanguant et cahotant sur les pavés parisiens d'une époque révolue et l'on se surprend à chercher la Cendrillon moderne qui s'échapperait du bal à bord de cet attelage enchanté.

L’installation se poursuit à l’intérieur de la bouche de métro avec les carreaux de faïence mordorés qui retrouvent leur blanc laqué originel un peu loin et deux vitrines encastrées dans le mur, semblables à des hublots dans lesquelles sont exposées les mêmes perles de verre qui ornent l’édicule.








"Le Kiosque des Noctambules" procède d’une poésie de l’étrange comme une invitation à regarder le monde avec des yeux d’enfants. Jean-Michel Othoniel nous convie au cœur même du conte de fée dont il trace les contours, abstraction incarnée, d’arabesques métalliques et de clarté de verre. Cette œuvre singulière distille une touche de magie subtile dans un quotidien qu’elle anime d’un souffle de joie profond.

Le Kiosque des Noctambules - Jean-Michel Othoniel
Place Colette - métro Palais Royal - Musée du Louvre (lignes 1 et 7)




Caroline Hauer, journaliste depuis le début des années 2000, a vécu à Londres, Berlin et Rome. De retour à Paris, son port d’attache, sa ville de prédilection, elle crée en 2011 un blog culturel, prémices d’une nouvelle expérience en ligne. Elle fonde en 2016 le magazine Paris la douce, webzine dédié à la culture. Directrice de la publication, rédactrice en chef et ponctuellement photographe de la revue, elle signe des articles au sujet de l’art, du patrimoine, de la littérature, du théâtre, de la gastronomie.